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"Je veux enfin avancer" : deux ans après l'attentat de Nice, Audrey se rendra au feu d'artifice du 15 août

Audrey, survivante des attaques terroristes du 14 juillet 2016, qui avait fait 86 morts et 206 blessés à Nice, assistera au premier feu d'artifice organisé sur la promenade des Anglais depuis l'attentat. Cet événement du 15 août représente pour elle un "véritable défi"

Article rédigé par franceinfo - Céline Delbecque
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Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Mercredi 15 août, le premier feu d'artifice depuis les attentats du 14 juillet 2016 sera organisé sur la promenade des Anglais, à Nice. (JEAN DANIEL SUDRES / AURIMAGES / JEAN DANIEL SUDRES)

Le 14 juillet 2016, à Nice, Audrey, 22 ans, décide de se rendre sur la promenade des Anglais pour admirer le feu d'artifice donné en l'honneur de la fête nationale. Installée "près des rochers, juste au bord du béton", elle profite du spectacle et des lumières. Quelques instants plus tard, elle assiste, impuissante, à la course folle du camion conduit par Mohamed Lahouaiej-Bouhlel, un terroriste qui tuera 86 personnes et blessera 206 victimes. Deux ans plus tard, la jeune femme a choisi de retourner sur la célèbre avenue et d'admirer un nouveau feu d'artifice, le premier depuis l'attentat de Nice organisé sur la promenade, pour "enfin avancer"

"J'ai orienté vers l'hôpital ceux qui pouvaient marcher"

"Ce soir-là, j'ai décidé de me rendre seule au spectacle du 14 juillet", raconte Audrey à franceinfo. Auxiliaire de puériculture, elle travaille alors à l'hôpital Lenval, lui-même situé sur la promenade des Anglais. "Je suis restée un peu plus longtemps que prévu, tout simplement parce que j'étais au téléphone." La jeune femme se fraye un chemin à travers la foule pour se diriger vers son scooter, garé sur le trottoir. "Soudain, j'ai entendu un homme crier 'Attention !', et j'ai vu le camion. Je me suis écartée très vite", se rappelle-t-elle. Sous ses yeux, le véhicule renverse son scooter, et zigzague à toute vitesse à travers la foule.

"Mon premier réflexe a été de courir derrière lui, pour essayer de l'arrêter. Mais je n'ai rien pu faire." Deux ans après l'attentat, Audrey reste choquée. "Il faisait exprès d'exploser les scooters, pour faire des dégâts. Il ne roulait pas droit, pour toucher le plus de monde possible." Déboussolée, la jeune femme retrouve sur les lieux du drame une autre infirmière de l'hôpital Lenval. Ensemble, elles se dépêchent de soigner les premiers blessés. "J'ai orienté vers l'hôpital ceux qui pouvaient marcher, j'ai pratiqué des massages cardiaques, calmé les familles de ceux pour qui on ne pouvait plus rien faire", se souvient-elle. 

"Le premier rassemblement que j'ai fait, c'était la finale de la Coupe du monde"

De cette soirée, Audrey garde des souvenirs précis et clairs. "J'ai marché pendant longtemps, on me disait qu'il fallait que je rentre chez moi. Je ne pouvais pas." Une amie vient la chercher. Pendant quinze jours, l'auxiliaire de puériculture ne sort plus. "J'ai arrêté le travail. Je n'y suis retournée que récemment, en janvier 2018", confie-t-elle. Après avoir tenté une thérapie, elle s'oriente vers l'hypnose. "Petit à petit, j'ai réussi à prendre du recul sur les événements. C'est la seule chose qui a fonctionné. Cela a duré un an et demi."

Audrey a mis du temps avant d'assister, à nouveau, à un spectacle en plein air. "Le premier rassemblement que j'ai pu faire, c'était pour la finale de la Coupe du monde de football, il y a quelques semaines." Pour l'occasion, des centaines de Niçois se sont retrouvés sur la promenade des Anglais, ravis de célébrer cette victoire. "Il y avait du monde, des pétards, du bruit. C'était difficile, mais nous étions là pour fêter quelque chose de beau. C'était positif." 

"C'est quelque chose que je fais pour moi"

Lorsqu'elle entend parler d'un éventuel feu d'artifice sur la promenade des Anglais, pour le 15 août, Audrey prend la décision de s'y rendre même si elle aurait préféré que cet événement soit célébré un 14 juillet, pour "rendre hommage aux victimes". Audrey ne sait pas encore comment elle réagira. D'autant que les mesures de sécurité qui vont être mises en place ne semblent pas la rassurer : "Il y a deux ans, tout était censé être sécurisé. Mais il n'y avait que des plots en plastique, des petites barrières", se rappelle-t-elle.

Pour elle, la ville aurait pu "attendre un ou deux ans avant de reproposer un feu d'artifice", mais la jeune femme trouve tout de même de bonnes raisons d'y aller. "J'ai prévu d'aller le regarder exactement comme je l'ai vu il y a deux ans. Seule, au même endroit."

Je voudrais avoir un autre souvenir de cette promenade des Anglais

Audrey, témoin des attentats du 14 juillet 2016 à Nice

à franceinfo

"C'est quelque chose que je fais pour moi. Je resterai jusqu'à la fin. Je vais leur montrer que le 14 juillet était peut-être une catastrophe, mais ce n'est pas pour autant qu'on ne vit plus."

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