Au procès de l'assassinat de Samuel Paty, la défense de Brahim Chnina demande son acquittement

Les trois avocats du père de la collégienne à l'origine de la rumeur, jugé pour avoir orchestré une campagne de haine à l'encontre de Samuel Paty avec le prédicateur Abdelhakim Sefrioui, ont martelé mardi que l'accusé n'était pas un terroriste.
Article rédigé par Violaine Jaussent
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Les avocats de la défense, dont Frank Berton, et les accusés dans le box, dont Brahim Chnina, le 16 décembre 2024 au procès de l'assassinat de Samuel Paty. (ELISABETH DE POURQUERY / FRANCEINFO)

"Imaginez la sensation de cet homme-là. Imaginez-vous, imaginez que votre enfant, que vous chérissez, vienne délivrer cette souffrance." Pour justifier la crédulité de Brahim Chnina face à sa fille, qui a lancé la rumeur sur le cours de Samuel Paty en octobre 2020, Nabil El Ouchikli, l'un de ses avocats, a demandé à la cour d'assises spéciale de Paris de "se mettre dans la peau" de son client pour le juger, lors de sa plaidoirie au procès de l'assassinat du professeur d'histoire-géographie, mardi 17 décembre.

"Liberté pour Brahim Chnina", a réclamé de son côté Louise Tort, qui a demandé l'acquittement, tout comme Frank Berton, le troisième et dernier avocat de l'accusé de 52 ans à plaider. Même s'"il faut du courage" pour prendre cette décision, a-t-il concédé. Car Brahim Chnina est renvoyé pour une "association de malfaiteurs terroriste" avec le prédicateur islamiste Abdelhakim Sefrioui, à la suite de "leur entente pour cibler et stigmatiser", avec "un discours empreint de haine", Samuel Paty, décapité le 16 octobre 2020 par Abdoullakh Anzorov, un jeune islamiste radical tchétchène. "Pardon, mais je n'ai pas eu la démonstration", de cette "association de malfaiteurs terroriste", de cette "entente", a considéré Frank Berton.

"Sa famille, c'est sa vie"

Lors de son interrogatoire, le 2 décembre, l'accusé avait nié toute responsabilité dans l'attentat, mais émis plusieurs regrets, dont celui d'avoir "cru sa fille à 100%". "Cette fille de 13 ans s'est enfermée dans un mensonge", "objectivement indétectable, parce qu'elle a mêlé le vrai et le faux", a défendu Nabil El Ouchikli, tantôt en haussant le ton, tantôt en chuchotant. "Il n'y a rien de terroriste chez Brahim Chnina", a martelé l'avocat, qui s'est évertué à présenter son client comme "un père de famille qui va protéger sa fille". Mais son raisonnement, détonnant, est difficile à suivre : si, en début de plaidoirie, il a cité Honoré de Balzac, à la fin, il n'a pas hésité à pointer la responsabilité de Charlie Hebdo dans la republication des caricatures de Mahomet en septembre 2020.

"Juger Brahim Chnina, c'est ça l'objet de ce procès", a ensuite rétabli sa collègue Louise Tort. Avec un ton vif et plus humoristique, l'avocate a détaillé "toute la catastrophe d'un père de famille qui a tout raté", alors que "sa famille, c'est sa vie". "Brahim Chnina, depuis qu'il est tout petit, c'est un aidant", a-t-elle vanté, en référence à l'emploi d'aide à domicile qu'occupait son client avant sa détention provisoire. "La première chose qu'il fait en arrivant à [la prison de] Fresnes, c'est de donner au Téléthon", a-t-elle confié.

"Vous ne le transformerez pas en salaud absolu parce qu'on en a très envie", a enfin lâché Louise Tort. "Soit vous cédez à l'opinion publique et à son cortège, soit vous faites ce qui est le plus dur et, à mon avis, c'est de le juger. Juger un homme pareil, qu'on veut voir terroriste", a estimé Frank Berton, en s'adressant à la cour d'assises spéciale de Paris, qui rendra son verdict jeudi ou vendredi.

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