Au cours d'"A vous de juger", jeudi sur France 2, le patron du FMI s'est démarqué du "dogme" de la retraite à 60 ans
En se tenant ainsi à l'écart de la position officielle du PS, Dominique Strauss-Kahn a provoqué des remous au PS, tout en creusant son sillon vers une éventuelle candidature en 2012, estiment certains observateurs.
"Si on arrive à vivre 100 ans, on ne va pas continuer à avoir la retraite à 60 ans, il va bien falloir que, d'une manière ou d'une autre, ça s'ajuste", a-t-il affirmé.
Le débat au PS
Mardi encore, en présentant le contre-projet de sa formation, la première secrétaire du PS, Martine Aubry, avait fermement prévenu que le Parti socialiste s'opposerait de "toutes ses forces" à une remise en cause des 60 ans. La députée Marisol Touraine, à la fois "strauss-kahnienne" et en charge des retraites au PS, a temporisé vendredi, assurant que le PS "non plus" ne considèrait pas les 60 ans comme un "dogme", mais comme "un droit protecteur". Elle voit des points de convergence: DSK "a une formulation différente, mais il a la même préoccupation de prendre en compte la pénibilité".
Le plus fidèle lieutenant de Dominique Strauss-Kahn, Jean-Christophe Cambadélis, dédramatise aussi: "Avant que nous soyons tous à 100 ans, il y a quand même quelques années qui vont passer". DSK "n'est pas libéral. Quand on veut taxer les banques, quand on veut réguler le marché mondial, on n'est pas libéral", estime le député de Paris. A droite, certains pourraient faire valoir que l'actuel gouvernement UMP a des projets similaires...
Quant à Pierre Moscovici, qui a été un proche du directeur général du FMI, il se désolidarise de son ex-mentor: "Dominique Strauss-Kahn ou pas, je défends l'âge légal de départ à la retraite à 60 ans", a-t-il lancé. A l'aile gauche du parti, Razzy Hammadi, proche de Benoît Hamon, défenseur acharné des 60 ans, prévient: "Nous ne sommes ni dans le dogme, ni dans les grandes théories, nous sommes dans la réalité: les 60 ans sont une mesure de justice", un "bouclier pour les femmes et les plus pauvres".
En coulisses, les commentaires se font plus acerbes: "Je trouve très sincèrement dommage pour une telle pointure socialiste de remettre en cause un acquis social tellement fort de la gauche", explique un membre de la direction. "Ca va faire des vagues utilisées par la droite", ajoute-t-il. L'"utilisation" a déjà commencé: le ministre du Budget, François Baroin, s'est empressé de qualifier d'"intelligent" l'ancien ministre PS...
Il "a une faiblesse du côté électorat populaire", or là,"il conforte son image de responsable auprès des classes moyennes où il n'a rien à gagner. Ce n'est pas sûr qu'avec cette sortie, il renforce son image populaire", renchérit un proche. Pour un autre dirigeant PS, "DSK a été pour le moins imprudent du point de vue de la politique intérieure".
Du côté des politologues
Pour l'analyste de l'institut de sondages IFOP Frédéric Dabi, sa "position, à double tranchant, était mûrement pesée". Elle comporte un "risque", celui "de renforcer son image libérale". Mais en même temps, estime le sondeur, elle a "un avantage" car "il se démarque ainsi peut-être positivement des propositions du PS sur les retraites", et il "apparaît comme plus concret, plus pragmatique et plus réaliste". Il se compose "une figure de recours, d'expert à la stature présidentielle".
Emmanuel Rivière (TNS Sofres) juge, lui, qu'avec cette position, il "se débarrasse d'un caillou dans la chaussure" car si la droite repousse l'âge légal, DSKcandidat ne prônera pas dans son programme "un retour en arrière". Alors que Martine Aubry "devra mécaniquement le faire", pense-t-il.
Les autres partis de gauche renâclent: Jean-Luc Mélenchon (Parti de gauche) a d'emblée prévenu qu'une candidature DSK en 2012 "compliquerait très sérieusement les capacités de rassemblement" de la gauche. Et le communiste Pierre Laurent a reproché au patron du FMI "de mettre ses pas dans ceux des libéraux de tous poils".
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