Interdiction des distributions alimentaires aux migrants de Calais : les associations saisissent la justice
Les associations craignent que cette interdiction ne soit mise en place dans d'autres villes que Calais.
Les défenseurs des migrants ont saisi, mercredi 16 septembre, le tribunal administratif de Lille pour demander la suspension d'un arrêté préfectoral interdisant à certaines associations les distributions alimentaires dans le centre de Calais, dénonçant une atteinte aux "libertés fondamentales". Dans un arrêté du 10 septembre, la préfecture du Pas-de-Calais a interdit, jusqu'à la fin du mois, "toute distribution gratuite de boissons et denrées alimentaires" effectuée par une association non-mandatée par l'Etat dans une vingtaine de rues, quais et places du centre de cette ville emblématique de la crise migratoire de 2015. Les autorités invoquaient, dans ce texte, les risques sanitaires dans le contexte du Covid-19 et de salubrité publique.
Cet arrêté porte des "atteintes graves et manifestement illégales (...) à plusieurs libertés fondamentales", estiment douze ONG et associations, dont le Secours Catholique ou encore la Fédération des acteurs de la solidarité, qui en demandent la "suspension immédiate" dans un recours. Un juge des référés doit examiner leur requête vendredi.
Une interdiction qui pourrait faire tâche d'huile
Le texte préfectoral est "attentatoire au droit à la dignité, au principe de fraternité, à la possibilité d'aider autrui, et aboutit à interdire, en pratique, toutes les distributions et dons en centre-ville, y compris ceux de simples citoyens", commente Me Patrice Spinosi, qui représente les organisations requérantes. Pour lui, l'arrêté est d'autant plus grave qu'il pourrait faire tâche d'huile : "On sait que la ville de Calais fonctionne comme un laboratoire en ce qui concerne les migrants" et que cette "solution pourrait être reprise par d'autres villes", craint-il.
"On a été estomaqués par cette décision qui ouvre une brèche considérable. Une ligne rouge a été franchie. Cette volonté d'opposer opérateurs de l'Etat et associations caritatives est perverse et dévastatrice pour la cohésion sociale", s'indigne Laurent Giovannoni, responsable des questions migratoires au Secours catholique. La décision, officiellement motivée par "le non-respect des mesures de distanciation sociale" ainsi que des distributions "suffisantes" de la part de l'association mandatée par l'Etat, avait suscité une vague d'indignation.
Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a dénoncé lundi une "caricature malhonnête" de la mesure prise "à la demande de la maire de Calais" pour mettre fin aux "distributions de repas anarchiques".
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