Nord : le Conseil d'Etat retoque la décision de la ville de Caudry de priver les "délinquants" ou leurs familles d'aides sociales
Le centre communal d'action sociale (CCAS) de cette commune laissait la possibilité à son président de "supprimer l'accès aux aides facultatives" aux personnes ayant notamment "fait l'objet d'un rappel à l'ordre", "d'un jugement définitif suite à une infraction troublant l'ordre public" ou ayant "causé un préjudice à la commune".
Le Conseil d'Etat a suspendu, vendredi 24 juin, une délibération de la ville de Caudry (Nord), qui prévoyait de priver certains "délinquants" ou leurs familles d'aides sociales facultatives versées par la commune. La plus haute juridiction administrative française, saisie par la Ligue des droits de l'homme (LDH), annule ainsi une ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Lille, qui déboutait la LDH au motif qu'elle ne "justifiait pas" d'un intérêt à agir contre cette décision locale.
La délibération contestée, "de nature à affecter les personnes vulnérables", présente, "dans la mesure notamment où elle répondait à une situation susceptible d'être rencontrée dans d'autres communes, une portée excédant son seul objet local". La ligue des droits de l'homme est donc "fondée" à agir, assure le Conseil d'Etat.
Dans une délibération d'avril 2021, le centre communal d'action sociale (CCAS) de Caudry offrait la possibilité à son président de "supprimer l'accès aux aides facultatives" aux personnes ayant notamment "fait l'objet d'un rappel à l'ordre", "d'un jugement définitif suite à une infraction troublant l'ordre public", ou ayant "causé un préjudice à la commune".
Une "grande victoire"
Lorsque les personnes concernées étaient mineurs, la "famille directe" pouvait alors être ciblée. Les prestations visées incluaient une aide à la cantine pouvant atteindre 260 euros, une aide au paiement de frais d'électricité ou encore l'accès à l'épicerie solidaire de la commune. "En raison de ses imprécisions quant aux circonstances pouvant conduire à la suspension des aides sociales facultatives et de l'absence de tout encadrement de la faculté ainsi reconnue au président du CCAS, la délibération contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation", et "de nature à créer un doute sérieux quant à sa légalité", écrivent les Sages.
Le Conseil d'Etat estime aussi que la condition d'urgence invoquée par la LDH était bien "remplie", au regard des "effets" sur la "situation des personnes" concernées. Les Sages enjoignent enfin la ville de Caudry à verser 3 000 euros à la Ligue des droits de l'homme au titre des frais de justice.
"La proposition de la ville de Caudry était un ballon d'essai. Plusieurs hommes politiques, dont Laurent Wauquiez, ont déjà imaginé généraliser ce type de sanction. Le Conseil d'Etat vient de doucher froidement leurs velléités", a commenté l'avocat de la LDH, Patrick Spinosi, qui salue une "grande victoire".
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