La réforme de l'audiovisuel public annoncée par Nicolas Sarkozy le 8 janvier entre dans sa dernière ligne droite
L"Assemblée a commencé à débattre du texte de loi gouvernemental mardi. Un texte sur lequel le gouvernement a demandé l"urgence ce qui impose une lecture unique au parlement.
Ce texte a suscité les critiques de l"opposition de gauche mais aussi du centre et de professionnels des médias, sans compter l"inquiétude des personnels de France Télévisions.
Les objectifs officiels de la réforme (concernant la télévision):
« Inventer la télévision de service public du XXIème siècle » nécessite une réforme du groupe France Télévisions pour lui permettre de marquer davantage sa différence en renouvelant en profondeur l"identité et le visage du service public à travers une offre culturelle plus dense, plus créative et plus audacieuse. Pour ce faire, le projet de loi comporte deux volets :
1. Il libère la télévision publique de la pression de l"audience, qui résulte principalement de la commercialisationd"espaces publicitaires au sein de ses programmes. Il garantit expressément le financement pérenne de France Télévisions. Pour donner au budget de l"Etat les moyens de cette compensation, sont instituées deux taxes sur le chiffre d"affaires des opérateurs du secteur de la communication audiovisuelle et du secteur des communications électroniques.
2. Il rénove la structure de France Télévisions afin de favoriser l"émergence d"un « média global » permettant la présence du secteur public audiovisuel sur tous les supports de diffusion. Cela implique un nouveau modèle de gouvernance qui aboutit à transformer France Télévisions en une entreprise unique et conduit l"État actionnaire à reprendre la responsabilité de la nomination de son président. (Communication du Conseil des ministres du 22 octobre 2008).
Les inquiétudes suscitées par le texte:
Les explications apportées par le gouvernement et le président de la République n'ont pas atténué les principales inquiétudes sur le texte gouvernemental qui ont trait aux :
-questions liées à la disparition de certaines recettes de l"audiovisuel public en raison de la suppression d"une partie de la publicité (après 20 heures).
-questions liées au soutien des grands groupes privés de communication (Bouygues, M6…) principaux bénéficiaires du transfert de recettes publicitaires.
-questions liées à l"indépendance éditoriale de France Télévisions en raison du mode de nomination et de révocation de son PDG voulu par le président de la République et de sa dépendance aux arbitrages budgétaires annuels.
-questions liées aux programmes qui pourront être diffusés par France Télévisions.
-questions liées à la création d'une société unique et ses conséquences éventuelles sur l'emploi.
Les principales mesures du texte
Principaux points contenus dans la loi sur l'audiovisuel discutée mardi:
Suppression de la publicité:
Elle se matérialisera dans un premier temps par un arrêt de la publicité sur les chaînes de France Télévisions entre 20H00 et 6H00 du matin à compter du 5 janvier 2009.
L'arrêt complet de la publicité doit intervenir à compter de l'extinction de la télévision analogique en faveur du numérique, prévue fin 2011.
Toutes les chaînes de France Télévisions sont concernées par cette mesure sauf RFO, qui gardent pour l'instant la publicité le soir.
Selon le projet de loi, le manque à gagner résultant de la suppression de la publicité sera compensée par une taxe de 3% sur la publicité diffusée par les chaînes de télévision privées qui ont des recettes publicitaires supérieures à 11 millions d'euros. Les députés ont cependant voté en commission un amendement remplaçant la taxe de 3% par une taxe modulable pouvant varier entre 1,5% et 3%. Le texte gouvernemental instaure par ailleurs une taxe de 0,9% sur les services fournis par les opérateurs de télécom dont les encaissements annuels excédent 5 millions d'euros. Là aussi, en commission, les députés l'ont remplacée, en votant un amendement, par une taxe progressive comprise entre 0,5% et 0,9% selon les résultats des entreprises.
Gouvernance des présidents de l'audiovisuel public:
Les mandats en cours des présidents de France Télévisions, Radio France et de l'Audiovisuel extérieur de la France ne seront pas interrompus. A l'avenir, ces présidents seront nommés par décret pour 5 ans, après avis conforme du CSA et accord des commissions parlementaires compétentes à une majorité qualifiée des 3/5ème. Comme dans les autres entreprises publiques, le président est révocable.
France Télévisions devient une entreprise unique:
Tout en conservant ses différentes chaînes (marques), la holding France Télévisions devient une société nationale de programmes unique.
Autres points contenus dans la réforme:
-Le projet de loi maintient le principe de financement du secteur public audiovisuel par la redevance qui sera indexée chaque année sur le taux de l'inflation à compter de 2009.
-Le projet de loi prévoit la possibilité d'une seconde coupure publicitaire par tranche de 30 minutes lors de la diffusion de fictions et de films par les chaînes privées. Un décret autorisera au 1er janvier le passage de 6 minutes à 9 minutes de publicité par heure sur les chaînes hertziennes et le passage de l'heure glissante à l'heure d'horloge, ce qui permet de concentrer la publicité pendant les pointes d'audience (par exemple entre 20H45 et 21h15).
France Télévisions en chiffres
Le groupe France Télévisions réunit cinq chaînes (France 2, France 3, France 4 sur la TNT, France 5 et France Ô) pour un budget global de 2,927 milliards d'euros.
- Les ressources de France Télévisions se sont élevées au total à 2,927 milliards d'euros en 2007. La redevance audiovisuelle a constitué les 2/3 des ressources (1,879 milliard euros) en 2007.
Les recettes publicitaires et celles du parrainage se sont élevées à 823 millions d'euros en 2007. A fin 2006, le groupe représentait 24,4% du marché publicitaire télévisé français (contre quelque 55% pour TF1).
Les autres ressources (ventes de DVD, produits dérivés...) se sont élevées à 225 millions d'euros.
- Résultats: France Télévisions a réalisé en 2007 un résultat net part du groupe de 22,2 millions en hausse de 70% par rapport à 2006. Le chiffre d'affaires s'est élevé à 2,9 milliards d'euros (+2,6% sur 2006).
- Effectifs: le groupe compte 11.000 salariés, dont 2.100 à France 2, 5.300 à France 3 et 1.900 à RFO.
- Budget: le coût des grilles de programmes a atteint 1,857 milliard d'euros en 2007. Le budget de l'information de France 2 s'est élevé à 139 millions d'euros. Le budget de l'information nationale de France 3 a atteint 67 millions et celui de l'information régionale 270 millions. Le budget de l'information nationale de RFO s'est élevé à 11,3 millions d'euros et celui de l'information régionale à 72,3 millions.
France Télévisions a par ailleurs consacré 353 millions d'euros à la création française en 2007.
- Audiences: le groupe a réalisé en mai 2008 une part d'audience de 34% (en données hertziennes) contre 36% en mai 2007, selon les chiffres de médiamétrie. Cette baisse, à l'image de celles enregistrées par les autres grandes chaînes hertziennes, s'explique par la montée en puissance des chaînes de la TNT gratuite, qui grignotent leurs parts d'audience.
En un an, France 2 a perdu 0,5 point de part d'audience à 17,3% en mai 2008, France 3 1,1 point à 13%, France 5 0,4 point à 2,9%. Sur les seuls horaires de diffusion en hertzien analogique, la part d'audience de France 5 est de 5,6% en mai, contre 6,7% un an avant.
Au sein des foyers dont la télévision est munie d'un adaptateur TNT, France 4 est à 1,9% de part d'audience (contre 1,5% en mai 2007).
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