"L'État n’a pas les moyens du contrôle" : les mesures contre la vie chère en Martinique suscitent beaucoup d’interrogations
Un voyage pour éteindre les flammes. De la visite de quatre jours du ministre des Outre-mer, François-Noël Buffet, les Martiniquais retiendront une annonce : la baisse de 20% au 1er janvier sur les plus de 6 000 produits les plus consommés sur l'île. Un dispositif supporté par l'exonération de la TVA et de l'octroi de mer sur ces produits ciblés, ainsi que la compensation des fameux "frais d'approche". En clair, les frais de port et de douanes. L'État met six millions d'euros sur la table.
Ce dispositif, expérimenté jusqu'en 2027, affirme le ministre des Outre-mer, aura des résultats concrets sur ce panier de produits. À ceux qui craignent une hausse immédiate des prix sur tous les autres produits avec des marges réalisées par les grands groupes locaux de la distribution. François-Noël Buffet répond par "plus de contrôle" : "Il y a des systèmes de contrôle qui existent, des organismes qui vont nous permettre de faire ces contrôles. Ils ont déjà commencé à travailler sur les prix actuels pour éviter un effet d'inflation. Il y a des bureaux d'études qui ont été saisis, des rapports qui vont être rendus pour construire un système qui dure."
Une question alimentaire insuffisante
Les quatre groupes familiaux (GBH, CréO, le groupe Parfait et SAFO) qui détiennent 80% du marché de la distribution alimentaire martiniquaise sont accusés de ne pas jouer le jeu de la transparence. "Malgré la loi, ils ne déposent pas leurs comptes", remarque Francette Florimond qui analyse le tissu économique de l'île depuis des décennies. "L'État n'a pas les moyens du contrôle", dit-elle. "Vous dites que vous faites des contrôles, mais avec qui, par qui et comment ?, interroge-t-elle. À tel point que la collectivité, où ce n'est pas son rôle, a dit qu'elle va financer des contrôleurs et aider l'État. Et quant aux observatoires des marges, des prix et des revenus, ils ont un budget de 15 000 euros par an. Qu'est-ce que vous faites avec ça ?"
Le gel des marges de la grande distribution locale, Eddie Marajo n'y croit pas. Pour cet autre analyste de l'économie en Martinique, la question alimentaire n'est que la partie émergée de l'iceberg. Pièces détachées automobiles, BTP, télécoms… Selon lui, les vrais acteurs de la vie chère n'étaient pas dans la lumière lors des quatre jours du ministre. "Ces gens-là, on aurait dû les consulter. Ah ben non, on fait un focus sur la distribution alimentaire. La distribution alimentaire, c'est 15% du panier de la ménagère. Les 85%, c'est quoi ? Il y a un moment, faut arrêter de nous prendre pour des cons", dénonce Eddie Marajo.
Symbole de cette exaspération qui dure : l'interpellation lundi du leader du mouvement de la vie chère qui demandait à rencontrer le ministre. Son arrestation a provoqué une nouvelle flambée de violence. Trois gendarmes mobiles ont été blessés.
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