Calais à cran après trois jours de heurts entre migrants et policiers
La ville a été le théâtre d'affrontements et de violences durant deux nuits depuis dimanche. Les riverains ont exprimé, mardi, leur "ras-le-bol" face à une situation de plus en plus tendue.
La spirale de la violence se poursuit à Calais (Pas-de-Calais). Depuis dimanche 8 novembre, les heurts entre migrants et policiers se multiplient dans les environs de la ville, point de convergence des Syriens, Afghans, Erythréens ou Soudanais qui souhaitent rejoindre l'Angleterre. Dans l'attente d'un hypothétique passage outre-Manche, près de 4 500 réfugiés vivent dans la précarité de la "Jungle", un bidonville insalubre.
Francetv info revient sur ces deux nuits de violences qui ont fait quelques blessés légers chez les forces de l'ordre.
Dimanche : "On n'avait pas tiré autant de grenades depuis très longtemps", témoigne un syndicaliste
Selon le récit des syndicalistes policiers, c'est un chauffeur routier qui a donné l'alerte, peu avant 22 heures. "Des migrants sont montés sur un pont, route de Gravelines, et ont jeté une pierre, qui a frappé le pare-brise de son véhicule, côté passager", raconte Denis Hurth, du syndicat de CRS Unsa-Police, à francetv info. Les lanceurs de pierre, jusqu'à 200 selon la préfecture, tentent de ralentir le trafic sur la rocade portuaire pour pouvoir se glisser dans les camions.
Les CRS, entre 80 et 90 selon le syndicat CRS Alliance, arrivent sur place et sont pris à partie. "On n'avait pas tiré autant de grenades [lacrymogènes] depuis très longtemps", selon Denis Hurth. Des heurts filmés par un riverain.
Au total, 18 policiers sont blessés. "C'est la première fois que c'est aussi violent et qu'on a malheureusement autant de collègues blessés, regrette Gilles Debove, responsable du syndicat SGP Police-Force ouvrière dans le Calaisis. On est inquiets. Si un jour on a une révolte au sein du camp, ça va être la folie." Le trafic a fini par reprendre vers 1 heure.
Lundi : 11 blessés "très légers" parmi les policiers
La même scène se répète la nuit suivante. Entre 23 heures lundi et 4 heures mardi, quelque 250 migrants tentent, "à plusieurs reprises, de ralentir le trafic sur la rocade portuaire en posant divers objets sur la chaussée", indique la préfecture. "Les policiers ont dû repousser à plusieurs reprises les migrants de la rocade. Des projectiles ont été lancés sur les forces de l'ordre", poursuit la préfecture.
Au total, on dénombre "11 blessés très légers parmi les policiers". La préfecture ne fait pas mention d'éventuels blessés parmi les migrants. Selon le Centre régional d'informations et de coordination routière (CRICR), la rocade portuaire a été fermée pendant deux heures, avant de rouvrir et fermer à plusieurs reprises.
Mardi : des riverains expriment leur "ras-le-bol"
Quelques heures plus tard, mardi vers 9 heures, entre 200 et 250 migrants ont fait irruption sur la rocade portuaire. "Une cinquantaine d'entre eux ont jeté quelques pierres sur la rocade en vue de créer un ralentissement. Les CRS ont été déployés sur place et à 9h30 la zone était entièrement sécurisée", a déclaré la préfecture. La rocade portuaire a rouvert vers 11 heures, selon le CRICR.
A quelques mètres de là, les riverains, qui ont été victimes de dégradations, sont excédés. "Ras-le-bol, ras-le-bol, ras-le-bol, lance l'un d'eux à France 3 Pas-de-Calais. On est fatigués. On n'a pas dormi ces deux dernières nuits. C'est déjà arrivé trois fois la semaine passée". "On sait qu'ils sont tristes, mais c'est nous qui devenons tristes maintenant. On doit vivre avec une peur au quotidien", ajoute Sandy, une voisine.
La préfète du Pas-de-Calais, Fabienne Buccio, a réagi à ce "phénomène nouveau". "Il n'y a pas eu d'affrontements physiques, mais des migrants ont souvent pénétré dans la propriété des riverains de la 'Jungle' pour se procurer des objets pouvant servir à bloquer des camions sur la rocade". Mardi après-midi, la police est allée rencontrer "tous ces riverains pour leur donner des conseils, pour les rassurer, pour les inviter à porter plainte pour que l'action judiciaire puisse s'accomplir", a poursuivi la représentante de l'Etat dans le département, précisant qu'il n'y avait pas eu d'interpellations.
Pour la préfète, la situation de ces derniers jours s'explique par l'impossibilité pour les migrants de rejoindre l'Angleterre. "Plus aucun étranger en situation irrégulière ne franchit la Manche par quelque moyen que ce soit. Donc, on a peut-être plus d'agressivité de la part des migrants, avec certaines associations comme No Border [altermondialistes militants pour la suppression des frontières] qui les organisent, qui leur donnent des outils pour venir à la rencontre des forces de l'ordre. Je le déplore malheureusement, car c'est une attitude irresponsable et dangereuse pour les migrants", a-t-elle déclaré.
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