Remplacer les devoirs, mais par quoi ?
Des parents d'élèves et des enseignants ont lancé la Quinzaine sans devoirs ce lundi. L'idée est "d'essayer autre chose". Mais quoi ? FTVi liste les pistes évoquées pour remplacer les exercices à la maison.
Privé de devoirs pendant quinze jours : non, ce n'est pas encore les vacances, mais une opération lancée lundi 26 mars par la FCPE, principale fédération de parents d'élèves, et l'Institut coopératif de l'école moderne (Icem). "Nous dénonçons depuis longtemps la persistance des devoirs à la maison, dont personne n'a jamais prouvé l'utilité", rappellent-ils. Ces associations relancent un débat qui n'est pas nouveau.
En réalité, les exercices à la maison sont interdits dans le primaire depuis une circulaire de 1956, mais pas l'apprentissage des leçons. Pourtant, dans les faits, les enseignants donnent souvent du travail à la maison. Dans le secondaire, ils se justifient, mais en primaire, ils pourraient être évités, selon les partisans de la suppression des devoirs.
L'objectif de la Quinzaine sans devoirs à la maison est donc "de faire réfléchir les enseignants et de les amener à essayer autre chose". Mais quoi ?
• Des devoirs… à l'école
Pendant le temps scolaire. C'est ce que propose principalement la circulaire de 1956. "Il faut que des espaces soient prévus pour que les enfants travaillent à l'école, même au secondaire", confirme Catherine Chabrun, responsable nationale à l'Icem, partisan de la pédagogie Freinet, fondée sur l'expression libre des enfants. "Ils peuvent ainsi travailler ensemble avant de se retrouver seuls chez eux", précise-t-elle à FTVi.
C'est aussi l'avis de Philippe Meirieu, chercheur en pédagogie et auteur de Les devoirs à la maison. Parents, enfants, enseignants : pour en finir avec ce casse-tête (Syros 2000). "Au collège, on peut commencer à donner un peu de travail à la maison. Il faut le faire d'une manière progressive et surtout le faire d'une manière concertée entre les enseignants pour que ce soit équilibré dans la semaine et dans le trimestre", explique-t-il à l'Agence France-Presse.
"Les journées sont trop longues, donc si on impose des devoirs en plus aux enfants, c'est trop", juge François Testu, chronopsychologue spécialiste des rythmes scolaires, contacté par FTVi.
Pendant les vacances. Les devoirs de vacances ont marqué des générations d'écoliers, notamment avec les cahiers dédiés à cette activité. Pour les remplacer, en 1991, l'Education nationale a lancé l'opération Ecole ouverte. Ce dispositif permet aux établissements volontaires des quartiers défavorisés ou des zones rurales d'ouvrir pendant les vacances scolaires. "L'Ecole ouverte se propose de réaccoutumer les élèves au travail, de rafraîchir leurs connaissances, tout en offrant aussi (...) des activités ludiques", relève Dominique Glasman, professeur de sociologie à l'université de Savoie, dans un rapport sur le travail scolaire en dehors de l'école (document PDF) publié en décembre 2004.
• De la lecture suivie
Se plonger dans un livre ou participer au blog de l'école permet d'apprendre d'une manière plus ludique après la classe. "Chacun choisit son livre qu’il lit régulièrement en classe et à la maison et qu’il présente ensuite à la classe ou dans son carnet de lecteur", propose ainsi François Le Ménahèze. "Le soir, ils peuvent lire ou relire un 'aide-mémoire', un texte, une revue, un journal, un livre", poursuit Jean-Charles Huver. Enseignants de CE2, CM1 et CM2, l'un à Saint-Lumine-de-Clisson (Loire-Atlantique) et l'autre à Mouans-Sartoux (Alpes-Maritimes), ils ont participé à un débat publié dimanche sur le site de l'Icem.
• Des leçons pour consolider les apprentissages
Apprendre et réciter un paragraphe de poésie ou une table de multiplication, poser une question sur un point de conjugaison abordé dans la journée peuvent suffire à remplacer des exercices à la maison. "Ces petites piqûres de rappel ne doivent pas faire mal : consacrer un quart d'heure à vingt minutes aux leçons, c'est raisonnable. Le seul intérêt est de consolider les apprentissages vus", estime François Testu.
La leçon constitue un juste milieu entre l'absence totale de devoirs à la maison, mal perçue chez certains parents, et l'avalanche d'exercices à faire le soir. "Je privilégie les leçons à apprendre, témoigne Antoine, enseignant qui fait des remplacements du CP au CM2 à Paris, contacté par FTVi. Si je donne un exercice d'application, c'est seulement pour permettre aux enfants d'appliquer une règle de grammaire vue à l'école. Je ne veux pas que les élèves se retrouvent en échec chez eux : le soir, il n'y a peut-être personne pour les aider." Mais Antoine reconnaît que cela dépend beaucoup du niveau des élèves. Par exemple, sa compagne, Elise, enseigne à des écoliers de CM2. Elle donne davantage de devoirs écrits que lui. "Elle veut les préparer à la 6e", explique-t-il.
Cet argument est repris par Myriam Menez, secrétaire générale de la Peep, autre association de parents d’élèves, interrogée par Le Parisien. "D’une certaine manière, [les devoirs] les prépare[nt] au secondaire, à être autonomes." Pour elle, comme pour certains enseignants et parents d'élèves, finalement, rien ne peut remplacer les devoirs à l'école.
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