"Si l'instruction en famille disparaît, la liberté d'instruction n'existe plus en France" : des parents se mobilisent pour faire l'école à la maison
La loi sur le séparatisme encadre plus strictement l'instruction en famille (IEF). Face à des refus de demandes d'autorisation, les parents favorables à ce type de scolarisation se mobilisent.
Jusqu'à cette année, pour pratiquer l'instruction en famille (IEF), il suffisait de le déclarer : cela concernait 71 000 enfants au 1er juin 2022, selon des chiffres de l'Education nationale. L'entrée en vigueur d'un volet de la loi sur le séparatisme change la donne et l'IEF est désormais soumise à autorisation. Quatre motifs dérogatoires existent pour ce type de scolarisation : le handicap, le sport, la musique et le libre choix des parents. Depuis la promulgation, il faut demander une autorisation à l'académie et les refus sont nombreux, en particulier pour ce quatrième motif.
C'est le cas pour ce père de famille, habitant en région toulousaine. "Mon fils cadet n'a pas eu l'autorisation : on s'est battus contre l'académie qui ne veut rien entendre. On n'a eu pour seule réponse : il n'y a pas de situation propre qui le concerne et qui justifie la solution familiale." Néanmoins, la famille n'a pas suivi l'avis de l'académie : "On a décidé de ne pas écouter leur décision. On ne place pas notre cadet à l'école : grâce à cette magnifique loi qui est censée lutter contre le séparatisme, nous devenons des séparatistes."
Le "séparatisme" dénoncé par ce père de famille est aujourd’hui dans le viseur de nombreux parents révoltés. Pour ces parents, ces refus de l'académie n'ont pas lieu d'être : ils rappellent que 98%, des contrôles d’inspection se passaient bien dans le cadre de l’IEF. "Les parents sont sommés, parce que c'est l'objet de la nouvelle loi, de fournir un projet éducatif complet, explique Denis Verloes, représentant du collectif Félicia, qui défend l’IEF. Ça va assez loin puisqu'il faut avoir un diplôme de baccalauréat minimum, il faut être capable de fournir un planning. Les parents font tout ça, ils envoient leur demande et ils reçoivent en retour une feuille A4 dans laquelle on leur dit : 'merci, mais non merci, nous estimons que vous ne répondez pas aux conditions pour pratiquer l'instruction en famille'."
"Le gouvernement veut mettre fin à l'instruction en famille"
Ce qui est en question, ce sont des chiffres assez étourdissants, selon les associations : on parle de plusieurs milliers de dossiers refusés en cette rentrée scolaire. Gwendoline et Céline, membres d’un collectif des Hauts-de-France qui dépend de l’asso Les Enfants d’Abord (LED’A), sont convaincues que "le gouvernement veut en fait mettre fin à l'instruction en famille", mais elles ne savent pas bien en expliquer la raison.
"Ce que nous montre l'Etat aujourd'hui, ce n'est absolument pas une volonté de maintenir la liberté d'instruction qui est un droit constitutionnel. Aujourd'hui, si l'instruction en famille disparaît, la liberté d'instruction n'existe plus en France."
Gwendoline, membre d'un collectif des Hauts-de-Franceà franceinfo
De son côté, le ministère de l'Education nationale dément vouloir mettre un terme à l'instruction en famille : il rappelle les recours qui sont en train d'être étudiés, et affirme que les chiffres vont être harmonisés. Sur France Bleu Occitanie, Pap Ndiaye, ministre de l'Education nationale, a reconnu qu'il existe localement "des variations dans l'acceptation des demandes des familles" et "des académies plus ou moins raides sur le sujet". Il a promis d'encadrer tout cela et d'apporter "des réponses raisonnables aux familles", tout en rappelant que "l'école à la maison est possible, mais (que) c'est une procédure évidemment encadrée, avec des critères qui doivent être respectés. Et la norme, c'est la scolarisation des enfants à partir de trois ans". De leur côté, les associations demandent à voir les chiffres du ministère publiés.
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