Faut-il avoir honte d'utiliser encore Internet Explorer en 2016 ?
Longtemps en position de leader incontesté, le navigateur de Microsoft a vu en avril Google Chrome lui chiper la première place du marché.
C'est une petite révolution dans l'univers d'internet. Pour la première fois depuis le début du siècle, Internet Explorer a perdu son statut de leader des navigateurs web. Le logiciel de Microsoft, qui dominait outrageusement le marché jusqu'au début des années 2000 avant de commencer à décliner, est devenu en avril le deuxième navigateur le plus utilisé au monde, derrière son concurrent Google Chrome, selon le site NetMarketshare.
Selon NetMarketshare, qui base ses statistiques sur le recensement des visiteurs uniques sur plus de 40 000 sites, 41,33% des ordinateurs du monde utilisaient Internet Explorer en avril, contre près de 51% six mois plus tôt. Dans le même temps, Google Chrome prenait dix points de parts de marché.
Maintenant que le roi est détrôné, devez-vous vous sentir coupable si vous continuez à cliquer sur le petit "E" bleu caractéristique d'Internet Explorer pour naviguer sur le web ? Francetv info pèse le pour et le contre.
Oui, parce qu'il est encore loin de la polyvalence de ses concurrents
Utiliser Internet Explorer en 2016, c'est effectivement se priver d'un nombre important de fonctionnalités disponibles chez les logiciels concurrents, Google Chrome et Mozilla Firefox en tête. Contrairement à ces deux navigateurs, Internet Explorer n'a pas dès le départ incité les internautes à développer des extensions permettant d'ajouter des fonctionnalités au programme.
Sur son site, Microsoft propose seulement une poignée de modules complémentaires permettant par exemple de filtrer certaines publicités, mais reste très loin des milliers d'extensions proposés sur le Chrome Web Store ou la page "Modules" de Mozilla Firefox. Si certains de ces programmes relèvent du gadget, voire peuvent être nocifs en rajoutant des publicités intrusives, de nombreuses extensions peuvent être très pratiques selon la manière dont vous utilisez votre navigateur.
Il est par exemple enfantin de rajouter à Chrome un programme vous permettant de garder à tout moment un œil sur votre boîte mail, ou un autre vous donnant accès à vos pages favorites même sans connexion internet. Si vous souhaitez améliorer votre anglais, une extension de Firefox permet de traduire n'importe quel mot surligné en un clic.
Et cette différence de taille avec Internet Explorer n'est pas prêt de s'arranger. Pour l'heure, le navigateur Microsoft Edge, conçu pour remplacer Internet Explorer sur les ordinateurs équipés de Windows 10, ne propose carrément pas d'extensions du tout.
Non, car il s'est débarassé des défauts qui lui collaient à la peau
Si vous avouez à votre tante ingénieure en informatique que vous utilisez encore Internet Explorer, vous avez de bonnes chances qu'elle se mette à vous rire au nez. La faute à la réputation horrible que traîne le navigateur depuis le début des années 2000. A l'époque, la sixième version du programme avait eu l'honneur d'être désignée par la publication PC World comme le "logiciel le moins sécurisé au monde", et ne respectait pas du tout les normes du web recommandées par le W3C, consortium international spécialisé en la matière.
Mais le navigateur, livré par défaut avec Windows XP, était si populaire que les développeurs de sites internet étaient obligés de s'adapter à ce logiciel bancal au moment de concevoir leurs pages. "C'était l'horreur absolue, on était obligé d'insérer du code spécialement pour ce navigateur", se souvient Stéphane Bortzmeyer, ingénieur spécialisé dans les réseaux, interrogé par francetv info.
Depuis, Microsoft a fait d'importants progrès. Comme tous les navigateurs modernes, Internet Explorer passe désormais avec succès le test Acid3, destiné à vérifier la compatibilité d'un programme avec les standards du web. Son successeur Microsoft Edge est même arrivé en tête dans deux tests sur cinq effectués en octobre par le site spécialisé Hot Hardware (article en anglais). Qu'est-ce que qu'on en dit, tatie ?
Non, car Google Chrome n'est pas exempt de reproches
Ce n'est pas parce que Chrome est devenu le navigateur le plus populaire au monde qu'il n'a rien à se reprocher. "Au motif de vouloir améliorer l'expérience de ses utilisateurs, Chrome communique un nombre important d'informations à Google, explique Stéphane Bortzmeyer. C'est parfois utile, notamment lorsqu'il s'agit de vérifer les certificats de sécurité des sites que vous visitez, mais en terme de protection de la vie privée, c'est très dangereux."
L'ingénieur spécialisé dans les réseaux lui préfère l'alternative libre Firefox, "même s'il reste des problèmes de performances quand un onglet utilise de la vidéo ou du langage JavaScript [utilisé pour les pages interactives]", ou Chromium, "une version simplifiée de Chrome débarassée du code non-libre qu'y insère Google".
Mais pour Stéphane Bortzmeyer, c'est l'existence même d'une domination du marché par un acteur qui pose problème. "L'idéal serait de ne pas être lié à un seul navigateur, et que le passage d'un logiciel à un autre soit simple. Si demain, Chrome atteint 70 ou 80% de parts de marché, il pourra abuser de sa position dominante pour influer sur les usages du web". Comme Internet Explorer l'a fait au début du siècle.
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