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[À vrai dire...] Maroc : quelles sont les vraies cibles du boycott des produits Danone, Afriquia et Sidi Ali ?

Publié Mis à jour
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Article rédigé par TV5MONDE
France Télévisions

Depuis bientôt deux mois, les produits de trois grandes marques -Danone, Afriquia et Sidi Ali- sont largement boycottés par les consommateurs marocains. Ils répondent à des appels mystérieux lancés sur les réseaux sociaux. Les cibles indirectes sont des proches du roi Mohammed VI.

Tout à démarré le 20 avril 2018 avec une série de publications anonymes sur Facebook puis sur d'autres réseaux sociaux : un appel à ne plus acheter les produits laitiers de Centrale Danone, les eaux Sidi Ali ou le carburant des stations Afriquia. Objectif affiché : dénoncer la chèreté des produits.

Quelle est l'ampleur du mouvement ?

Le mouvement a connu une nette accélération quelques jours plus tard ; lorsque plusieurs dizaines de célébrités marocaines ont relayé l'appel au boycott

Les consommateurs marocains ont largement suivi cet appel et le suivent encore presque 2 mois plus tard.

Une enquête publiée par le journal marocain l'Economiste fin mai affirmait que 57% des personnes informées du mouvement le suivait en tout ou partie.

Quelles sont les conséquences du boycott ?

La filiale marocaine du français Danone affirme que son chiffre d'affaires s'est réduit de 50% depuis le 20 avril et que ses pertes s'élèvent à plus de 13 millions d'euros.

Le groupe a même décidé de mettre fin à quelques 886 contrats en intérim et de réduire ses achats auprès des producteurs.

Les titres boursiers des maisons mères d'Afriquia et de Sidi Ali souffrent. Le distributeur d'eau rappelle par communiqué qu'il emploie plus de 2000 personnes dans le pays.

L'autre conséquence aura été politique : le ministre des Affaires générales Lahcen Daoudi a été poussé à la démission. Son tort : avoir participé à une manifestation contre le boycott.

Qui est visé ?

Si l'origine exacte de cet appel reste un mystère, ses cibles sont plus claires : des personnalités influentes des milieux économiques marocains.

Miriem Bensalah-Chaqroun d'abord. Elle est la dirigeante des eaux minérales Sidi Ali. Elle a été jusqu'à fin mai la présidente de l'organisation patronale marocaine, la CGEM. Proche du roi Mohammed VI, elle a souvent été citée comme potentielle ministrable.

Aziz Akhannouch lui est déjà un ministre du gouvernement actuel. Il est également un proche du roi. Milliardaire, propriétaire de la maison mère des stations Afriquia, il est pressenti pour diriger l'opposition face aux islamistes lors de prochaines élections.

"Economie minée par la rente..."

Enfin, avec Centrale Danone, certains internautes pensaient s'attaquer au groupe Al Mada, le fonds d'investissement de la famille royale. Sauf que le holding royal s'est retiré du capital de Centrale Danone depuis 3 ans. C'est donc la maison mère française qui est ciblée.

Alors attaque politique ou simple colère contre la vie chère ? Sans doute les deux, comme le résume l'organisation Transparency Maroc dans un communiqué du 19 mai : "c'est toute la gouvernance d'une économie minée par la rente, la corruption et l'interférence du pouvoir qui est visée".

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