"Les réseaux sociaux et leurs usages sont un reflet de la société" : avec Elon Musk à sa tête, X peut-il mourir ?
275 millions d'utilisateurs actifs par mois sur Threads, Bluesky qui a passé la barre des 20 millions d'utilisateurs en novembre… Les alternatives à X ont le vent en poupe. De plus en plus critiqué depuis son rachat par Elon Musk en octobre 2022, l'ancien réseau Twitter voit de plus en plus d'utilisateurs quitter la plateforme depuis l'élection de Donald Trump. Que ce soit des stars comme Stephen King ou Barbra Streisand, des médias comme le Guardian et Ouest-France, ou, plus simplement des utilisateurs du quotidien, ils sont de plus en plus nombreux à claquer la porte de X.
Par le passé, de nombreux réseaux sociaux ont émergé, ont été utilisés massivement, et ont fini par décliner jusqu'à mourir. Skyblog, qui a définitivement fermé ses portes en 2023 est l'un des derniers exemples en date.
Mais comment meurt un réseau social ? Par manque d'investisseurs ? D'annonceurs ? Pour Soraya Khireddine, experte en social média et fondatrice de l'agence Yuzoo - Groupe Olyn, la réponse est avant tout une question d'utilisateurs : "Un réseau social est définitivement mort quand plus personne n'est actif, explique-t-elle. Un réseau social émerge et subsiste grâce à ses utilisateurs, parfois bien avant d'avoir un business model établi", analyse-t-elle.
Une question d'usage ou d'esthétique
Et cette fuite des utilisateurs peut se produire pour plusieurs raisons : "Il y a d'abord une question d'usage. Les réseaux sociaux et leur usage sont un reflet de la société et de la technologie. Facebook, par exemple, n'est pas mort, mais a fortement décliné parce que les gens ne postent plus de la même manière. D'où l'acquisition par Mark Zuckerberg d'Instagram. Depuis, les photos, les stories éphémères ont remplacé les posts qu'on faisait pour raconter notre journée."
Un réseau social peut aussi mourir pour des questions esthétiques ou technologiques : "Certaines plateformes ne suivent pas les innovations technologiques ou les attentes des utilisateurs. C'est le cas par exemple de Skyblog ou de Myspace, explique Soraya Khireddine. Ces plateformes ont été remplacées dès que des alternatives à l'interface plus dynamiques sont apparues."
Le cas le plus criant est celui de Vine, une application mobile lancée en 2012 par Twitter, qui hébergeait de courtes vidéos de six secondes maximum tournant en boucle. Le projet est finalement abandonné en 2015. "Le principe était génial, sourit la spécialiste. Ils avaient senti la tendance de la vidéo courte et divertissante. Mais le fait qu'elles étaient limitées à 6 secondes faisait que le cadre était beaucoup trop restrictif pour les créateurs. Ça a donc fini par décliner, mais Vine avait préparé le terrain pour TikTok."
La difficulté de partir
Alors, X peut-il "mourir" face à cette envie de voir ailleurs de nombreux utilisateurs ? Selon Soraya Khireddine, la réponse est claire : "Un réseau peut décliner parce qu'il ne correspond pas à un système de valeurs, comme c'est le cas pour X actuellement".
Pour Elon Musk, en tout cas, c'est non. S'il invite lui-même ses détracteurs à quitter sa plateforme, de nombreux utilisateurs, qui se sont créé un réseau et une "réputation" sur l'ex-Twitter hésitent toutefois, arguant de la difficulté à repartir de zéro. Depuis plusieurs semaines, des "kits de démarrage" sont ainsi lancés par Bluesky afin de retrouver les comptes suivis par exemple sur X.
Pour Soraya Khireddine, plusieurs facteurs sont en effet à prendre en compte : "Ça dépendra d'abord du nombre d'utilisateurs qui resteront actifs sur la plateforme." Et actuellement, les voyants sont en train de virer à l'orange pour X.
"Les chiffres indiquent une diminution significative, et notamment parmi les profils les plus influents."
Soraya Khireddineà franceinfo
La spécialiste confie d'ailleurs que ce désamour est à scruter côté économique : "On ne conseille plus d'investir du temps et de l'argent sur X. L'émergence de plateformes alternatives comme Threads, Mastodon ou Bluesky, beaucoup mieux modérées, et perçues comme plus sécuritaires vont accentuer l'exode", estime-t-elle. Avant de conclure : "Mais je ne pense pas que X va définitivement mourir. Il y a un déclin, mais je ne vois pas une extinction complète..."
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