Natation aux Paralympiques 2024 : Ugo Didier, un "intellectuel" médaillé d'or mais loin d'être rassasié

Le paranageur tricolore a emmené avec lui tout le public de Paris La Défense Arena, jeudi, pour remporter le premier titre paralympique de sa jeune carrière.
Article rédigé par Clément Mariotti Pons
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 3 min
Ugo Didier peut savourer : après l'argent et le bronze glanés à Tokyo, le nageur tricolore a remporté son premier titre paralympique sur le 400 m nage libre (catégorie S9), jeudi 29 août lors des Jeux de Paris. (FRANCK FIFE / AFP)

"Je fais combien ? 4'12''55 ? C'est pas mal !! J'avais dit quoi ??" Ugo Didier adore quand un plan se déroule sans accroc. Et la référence facile à Hannibal de l'Agence tous risques n'a peut-être jamais aussi bien collé à la peau du nouveau champion paralympique du 400 m nage libre (catégorie S9), qui a fait exulter Paris La Défense Arena, jeudi 29 août.

Un as du calcul qui ne laisse rien au hasard

Il suffit de revenir quelques heures en arrière. Vainqueur de sa série matinale mais "seulement" 4e temps des engagés (4'21''28), la question de savoir le chrono à viser pour décrocher l'or en finale lui est posée. "Pour être honnête, je ne vois pas la course aller aussi vite qu'à Tokyo (4'10''25). Je pense que ça peut se gagner en 4'12 ou 4'13". Evidemment, la précision sera chirurgicale de la part de celui qui, en parallèle, est étudiant ingénieur à l'Insa du côté de Toulouse.

"Ugo a une redoutable intelligence, qui lui est favorable des fois et qui peut lui faire défaut parce que le cerveau va souvent plus vite que le corps." Samuel Chaillou, son entraîneur, le connaît par cœur. Les deux hommes travaillent ensemble depuis au moins dix ans, tant sur l'aspect technique dans l'eau que sur la préparation physique. Le regard ému, il décode le succès de son protégé, auteur d'un finish exceptionnel dans les 150 derniers mètres – "comme il l'avait prévu" – pour aller chercher sa première couronne, en France qui plus est.

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Paralympiques 2024 - Natation : Ugo Didier se pare d'or sur 400m . (.)

"Il y a trois ans au Japon, il avait fini deuxième en nageant plus vite. Aujourd'hui, sa façon de nager, de gérer sa stratégie de course, tout était complètement différent. Il a grandi, il a appris beaucoup de choses. Sa force, c'est que c'est un grand sportif mais aussi quelqu'un qui réfléchit. Parfois, il faut faire attention à ne pas être trop dans sa tête."

"Il maîtrise mes allures, mes coups de bras, mes fréquences... C'est un allié primordial", confiait le nageur licencié au Cercle des nageurs de Cugnaux à franceinfo: sport il y a quelques mois à propos de sa relation avec celui qui, en définitive, est bien plus qu'un coach. "Dans la vie de tous les jours, je suis son seul nageur. Cela crée une proximité incroyable."

"C'est un beau nageur, il représente ce qu'on a envie de montrer au public sur ces Jeux, avec un handicap pas forcément visible, comme la majorité des handicaps, mais qui peuvent concerner tout le monde."

Charles Rozoy, ancien champion paralympique en paranatation

à franceinfo: sport

Médaillé d'argent sur la distance à Tokyo et en bronze sur le 200 m 4 nages, Ugo Didier est officiellement devenu le successeur de Charles Rozoy, dernier homme titré en paranatation lors des Jeux de Londres en 2012. Consultant pour France Télévisions lors de ces Jeux de Paris, ce dernier porte un regard tout aussi lucide sur le jeune homme, avec qui il s'est déjà entraîné par le passé et qu'il connaît bien. "Il fait partie des gens qui ont besoin de leur espace, c'est un intellectuel. Il analyse tout très vite. Il a une vraie réflexion et ressent le besoin d'être dans sa bulle. Désormais il a un vécu, ce n'est plus un jeune qui arrive."

Didier a encore de l'appétit

Jeudi matin, au sortir de sa série du 50 m nage libre (catégorie S10), la nageuse tricolore Emeline Pierre glissait en zone mixte une petite indiscrétion sur une citation, écrite au feutre noir par les coachs, pour encourager tout le collectif. "Ça a marqué les esprits de tout le monde, teasait la jeune femme, amie d'Ugo Didier depuis leur première sélection commune en équipe de France en 2015. C'était écrit : 'On fait des milliers de choses à l'entraînement que personne ne voit, aujourd'hui on va faire un tout petit truc que tout le monde va voir.""

En décrochant l'or, le natif du Chesnay (Yvelines) a en effet été vu de tout le monde. Et ce sacre – "un accomplissement", comme il le confiait quelques minutes après sa course – pourrait en appeler d'autres pour le fer de lance des Bleus, encore engagé dans trois épreuves individuelles et une en relais d'ici la fin des Jeux. "Ça tombe bien, il y a encore plein de choses à faire pour la natation française", s'amusait, le sourire carnassier, celui dont le plan ne s'arrête certainement pas à une seule médaille à Paris.

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