L'affaire Tapie-Lagarde en quatre questions
La justice poursuit activement son enquête autour du règlement du litige entre Bernard Tapie et le Crédit lyonnais. Le domicile et le cabinet de Claude Guéant ont été perquisitionnés aujourd'hui.
Au fil des mois, la justice poursuit son enquête dans "l'affaire Tapie". Dernier fait en date, la perquisition du domicile et du cabinet de Claude Guéant, mercredi 27 février, pour savoir si l'Elysée est intervenue d'une manière ou d'une autre dans le règlement du litige opposant Bernard Tapie et le Crédit lyonnais. Francetv info en profite pour revenir sur cette affaire en quatre questions clés.
C'est quoi "l'affaire Tapie" ?
Une information judiciaire contre X a été ouverte à Paris, en septembre 2012, sur la décision du ministère de l'Economie et des Finances de recourir à un arbitrage dans le contentieux entre Bernard Tapie et le Crédit lyonnais. Ce contentieux portait sur la vente litigieuse d'Adidas par la banque en 1993, comme l'expliquait L'Expansion en 2010.
L'arbitrage avait, au final, été rendu en faveur de Bernard Tapie. En juillet 2008, le tribunal arbitral, instance privée, avait condamné le Consortium de réalisation, gérant le passif du Crédit lyonnais, à verser à l'homme d'affaires 240 millions d'euros de réparation à Bernard Tapie, auxquels s'ajoutaient une centaine de millions d'euros d'intérêts et surtout 45 millions d'euros pour préjudice moral.
Pourquoi la justice a-t-elle ouvert une enquête ?
Le règlement de cette affaire avait provoqué un tollé, le centre et la gauche accusant l'Elysée d'avoir manœuvré pour favoriser Bernard Tapie, ancien ministre de François Mitterrand qui avait créé la surprise en soutenant Nicolas Sarkozy en 2007. Après un rapport du procureur général de la Cour des comptes sur cet arbitrage, la justice ouvre une enquête en septembre 2012 pour "usage abusif des pouvoirs sociaux et recel de ce délit".
Pourquoi Christine Lagarde est-elle mise en cause ?
En 2007, c'est la ministre de l'Economie et des Finances de l'époque, Christine Lagarde, qui décide de recourir à un tribunal arbitral pour régler le contentieux entre Bernard Tapie et le Crédit lyonnais. La décision est d'autant plus surprenante qu'elle est prise contre l'avis des services du ministère, et que l'Etat, en charge du passif du Crédit lyonnais via des entités publiques, avait gagné en 2006 devant la Cour de cassation, plus haute juridiction française, et se dirigeait donc vers une victoire définitive.
Dans une note datée de mai 2011, le procureur général de la Cour de cassation, Jean-Louis Nadal, mettait en cause directement Christine Lagarde. Jean-Louis Nadal reprochait notamment "la constance et l’intensité des interventions ministérielles pour conduire à la solution ayant finalement amené l'Etat à verser [à Bernard Tapie] une somme nettement supérieure à celle qui pouvait découler des sentences judiciaires qui venaient d'intervenir".
L'ancienne ministre devrait être entendue prochainement par la Cour de justice de la République (CJR) dans le cadre de l’instruction qui la vise de "complicité de faux" et "complicité de détournement de fonds publics". A l'issue de l'audience, l'actuelle directrice générale du FMI pourrait être mise en examen.
Nicolas Sarkozy a-t-il joué un rôle en faveur de Tapie ?
C'est en tout cas ce que soupçonnent de nombreux responsables politiques de gauche, et ce que la justice cherche à vérifier. D'après les révélations de L'Express, Bernard Tapie a rencontré Nicolas Sarkozy à dix-huit reprises entre janvier 2007 et novembre 2010. "Parfois, ces rendez-vous recoupent étrangement le calendrier des discussions autour de l'arbitrage" opposant l'homme d'affaires au Crédit lyonnais, constate l'hebdomadaire.
En perquisitionnant les bureaux de l'ancien secrétaire général de l'Elysée, Claude Guéant, mercredi 27 février, les enquêteurs se demandent notamment si l'Elysée a forcé la main de Bercy pour pousser la justice à régler le litige entre Bernard Tapie et le Crédit lyonnais via le tribunal arbitral. Selon France Info, "des documents retrouvés mercredi matin [lors de la perquisition] accréditeraient cette thèse".
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