Corée du Nord : les enjeux du dernier tir de missile
Le tir réussi de Pyongyang est une première, après trois échecs lors d'essais similaires depuis 2006. Il marque une nouvelle étape dans la course à l'armement du pays.
ASIE-PACIFIQUE – Le Conseil de sécurité des Nations unies doit se réunir en urgence, mercredi 12 décembre au soir. Raison de cette convocation : le lancement ce même jour par la Corée du Nord d'une fusée dans l'espace, qui défie la communauté internationale. Ce tir réussi est une première, après trois échecs sur des essais similaires depuis 2006. La télévision japonaise Fuji TV a diffusé cette vidéo qui aurait été filmée du côté chinois de la frontière nord-coréeenne. Elle affirme qu'on y voit la fusée tirée par la Corée du Nord.
De Washington à Pékin, les chancelleries ont immédiatement condamné cette nouvelle étape dans la course à l'armement du régime de Pyongyang. Francetv info revient sur les enjeux et les conséquences de l'annonce nord-coréenne.
Pourquoi ce tir alarme la communauté internationale ?
Les résolutions 1718 et 1874 de l'ONU interdisent à Pyongyang toute activité nucléaire ou balistique. Officiellement, la Corée du Nord affirme que cet essai a lieu dans le cadre d'une mission scientifique civile et pacifique, pour placer un satellite en orbite.
A Pyongyang, une présentatrice vêtue du costume traditionnel coréen, se félicitant de ce succès, a ainsi expliqué que "le satellite est entré en orbite comme prévu". "Le tir réussi (...) est une percée dans le développement des technologies scientifiques et de l'économie de notre pays et exerce notre droit à l'utilisation pacifique de l'espace", a ensuite renchéri l'agence officielle nord-coréenne KCNA.
Mais les autres pays soupçonnent en réalité le pays de chercher à mettre au point un missile balistique intercontinental, le Taepodong-2, capable d'atteindre le continent américain avec une portée de 6 700 kilomètres et pouvant être armé avec des charges chimiques ou nucléaires. On connaît peu de choses sur le programme nucléaire nord-coréen, mais les experts estiment que le pays possède suffisamment de plutonium pour la fabrication de six à huit bombes nucléaires.
Où en est le pays dans sa course à l'armement ?
Pyongyang a assuré, début octobre, qu'il possédait des missiles stratégiques capables de frapper le territoire des Etats-Unis. Une déclaration interprétée alors comme un coup de "bluff" par les experts. Mais le lancement annoncé de ce mercredi 12 décembre le rend subitement plus crédible. Le Commandement de la défense aérienne nord-américain (NORAD), qui surveille ce type de tirs, a prudemment confirmé le succès de la mission. Selon le NORAD, la fusée aurait bien "déployé un objet qui s'est placé en orbite".
Or, "placer un satellite en orbite signifie que vous possédez la technologie pour envoyer une ogive vers un endroit voulu. La Corée du Nord devient à présent non seulement une menace pour les pays voisins, mais aussi une menace réelle pour les Etats-Unis", explique Masao Okonogi, spécialiste de la Corée du Nord à l'université Keio, au Japon, cité par l'AFP.
Plusieurs analystes jugent cependant que la Corée du Nord fait encore face à de nombreux défis techniques : miniaturiser une bombe nucléaire en tête nucléaire pouvant être fixée sur un missile balistique présente ainsi d'énormes difficultés.
Il faut ensuite être capable de l'envoyer à l'endroit voulu. "C'est une chose d'avoir un missile capable d'atteindre Hawaï. C'est autre chose d'être capable de frapper exactement là où vous l'avez décidé", indique Ralph Cossa, président du Forum pacifique du centre d'études internationales et stratégiques, basé à Hawaï. "Mais [les Nord-Coréens] s'améliorent et on doit les prendre au sérieux".
Que peut faire la communauté internationale ?
La Corée du Nord s'expose à un renforcement des sanctions internationales adoptées en 2006 et 2009, après les essais nucléaires réalisés par le régime. Un diplomate occidental aux Nations unies a annoncé que le Conseil de sécurité tiendrait des "consultations", mercredi vers 18 heures (heure française), à la demande des Américains et des Japonais, augurant d'une "réaction forte".
La Chine, seul allié de poids de Pyongyang, a toujours brandi sa menace de veto au Conseil pour limiter leur portée. Mercredi, Pékin a cependant estimé que Pyongyang "devrait se plier aux résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU".
L'Union européenne a également brandi, par la voix de la représentante de l'UE pour la politique étrangère, Catherine Ashton, la menace de nouvelles sanctions "en conformité avec les délibérations du Conseil de sécurité des Nations unies".
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