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La croissance française repart… vraiment ?

Selon l'Insee, le PIB a augmenté de 0,2% au troisième trimestre 2012. Francetv info vous explique pourquoi il faut relativiser cette bonne nouvelle. 

Article rédigé par Marie-Adélaïde Scigacz
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Depuis l'été 2011, tous les indicateurs de l'économie se dégradent. Et pour le moment, rien ne semble montrer que le début d'année 2013 échappe à cette tendance, selon l'économiste Christophe Marques. (MILENA BONIEK / ALTOPRESS / AFP)

ECONOMIE – Dans son numéro à paraître samedi 17 novembre, l'hebdomadaire britannique The Economist offre à la France une couverture dont elle se serait bien passée. Taux de chômage à 10%, compétitivité grippée, l'Hexagone serait "une bombe à retardement en plein cœur de l'Europe". Dans ce contexte de scepticisme à l'égard des perspectives économiques françaises, l'annonce par l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) d'une hausse de 0,2% de la croissance au troisième trimestre par rapport au précédent est apparue comme salutaire en ce jeudi 15 novembre.

La France, qui échappe ainsi à la récession, définie comme deux trimestres consécutifs de croissance négative, est-elle pour autant sur la voie de la reprise ? Cet indicateur confirme-t-il que le pays est, comme l'a assuré le ministre de l'Economie, Pierre Moscovici, "une économie solide" ? Francetv info vous dit pourquoi il convient de ne pas s'emballer.

Parce qu'il s'agit d'une estimation provisoire

Les économistes n'étaient pas optimistes : initialement, l'Insee avait annoncé une croissance nulle pour ce troisième trimestre. Non seulement la France crée la surprise en enregistrant une croissance de 0,2%, mais elle rejoint le taux observé en Allemagne sur cette même période. 

Pas de quoi parader pourtant : ce résultat s'accompagne d'une révision à la baisse du taux de croissance du trimestre précédent, qui passe de 0% à -0,1%. 

Alors que la France pouvait se féliciter d'avoir enchaîné deux trimestres de parfaite stabilité, elle enregistre donc a posteriori la première rechute en territoire négatif depuis le printemps 2009, époque à laquelle la France s'était sortie de la plus grave récession depuis l'après-guerre.

Le PIB et ses composantes selon les estimations de l'Insee publié le 15 novembre 2012. (INSEE / FTVI )

Pour Philippe Waechter, directeur des études économiques chez Natixis Asset Management, interrogé par francetv info, cette correction "indique que nous ne sommes pas sur une dynamique très robuste"

Enfin, il n'est pas exclu que l'Insee revienne dans les semaines à venir sur ces chiffres qui ne sont pour l'instant que des estimations. En effet, "plusieurs enquêtes récentes montrent une activité assez forte sur le plan de la production industrielle au cours de l’été, suivie de sa baisse en septembre et octobre", note l'économiste. Pas de quoi laisser présager une reprise immédiate.

Parce que les entreprises ne suivent pas 

Pour interpréter ce chiffre de 0,2% de croissance, il faut entrer dans le détail. "Lorsque l'on regarde dans le détail l'évolution des différents indicateurs qui constituent le PIB, cela fait plusieurs trimestres qu'on s'interroge sur la contribution du secteur privé, poursuit Philippe Waechter. Or, on note qu’il contribue très modestement. Par ailleurs, on relève que l’investissement des entreprises se replie." L'investissement recule en effet légèrement au troisième trimestre (-0,2 % après +0,5 %). 

Parce que la consommation reste fragile

Après avoir enregistré un recul de 0,2% au deuxième trimestre, la consommation des ménages a augmenté de 0,3%. Mais cette hausse reste fragile. François Hollande a d'ores et déjà prévenu que 2013 serait marqué par une hausse du chômage, ce qui devrait inévitablement entraîner une baisse de la consommation. Les hausses d'impôts décidées par le gouvernement n'amélioreront pas la situation. Et selon un baromêtre BVA-BFM-Challenges-Avanquest, le "moral économique" des Français reste très dégradé : 72% des personnes interrogées se disent "plutôt moins confiantes" sur l’avenir de la situation économique en France. Les économistes de Natixis anticipent au final une baisse de la consommation des ménages de 0,5% en 2013

Parce qu'il n'annonce pas forcément une embellie durable

Avec ces nouvelles données, l'acquis de croissance pour 2012 (soit le résultat si le PIB venait à stagner au dernier semestre) s'établit à 0,2%. Il faudrait donc une nouvelle progression du PIB au quatrième trimestre pour atteindre l'objectif du gouvernement, à 0,3%. Une ambition certes modeste, mais néanmoins optimiste.

En ce qui concerne les prévisions pour 2013, le gouvernement table sur un taux de croissance à 0,8%. Ce taux , prudent, "reste un objectif réaliste, mobilisateur et atteignable", a aussitôt réagi Pierre Moscovici.

"Pour 2013, on sait que l’on va avoir une croissance autour de 0. Un peu plus ou un peu moins, ce sera toute la question, mais compte tenu des éléments donnés par l'Insee, on peut imaginer que la dynamique va rester faible", analyse Philippe Waechter. La commission européenne ainsi que le FMI estiment ainsi l'objectif irréalisable, lui préférant un taux de croissance divisé de moitié, 0,4%.

Parce que le contexte européen est de plus en plus dégradé

Si la France se félicite d'une légère hausse de son PIB, la zone euro est, elle, entrée officiellement en récession au troisième trimestre, pour la deuxième fois en trois ans, a indiqué jeudi 15 novembre l'office européen de statistiques Eurostat. Le PIB a reculé de 0,1% au troisième trimestre, après s'être déjà replié de 0,2% au trimestre précédent.

En Allemagne, première économie de la zone euro, il a progressé de seulement 0,2%. L'Italie et l'Espagne sont quant à elles restées en récession, avec respectivement un recul du PIB de 0,2% et de 0,3%. Mais les pays du Sud ne sont pas les seuls à trinquer : l'activité s'est contractée de 0,1% en Autriche et de 1,1% aux Pays-Bas. 

Dans ce contexte, "on ne voit pas d’où pourrait venir une reprise de l’activité économique", remarque Philippe Waechter.

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