Les eurobonds, c'est quoi ?
Deux camps pourraient s'affronter sur ce sujet devenu polémique, lors du sommet informel des 27 pays européens mercredi soir. FTVi vous explique ce que sont ces obligations et pourquoi elles divisent.
C'est l'une des solutions avancées pour lutter contre la crise de la dette en Europe : les eurobonds, aussi appelés euros-obligations ("bonds" signifie obligations en anglais). L'idée n'est pas neuve et vient des partisans d'une Europe plus fédérale. Dès 1993, Jacques Delors l'avait imaginée, pour financer des projets d'avenir, relatait La Tribune.
Les eurobonds devraient être au cœur des discussions des dirigeants de l'Union européenne qui se retrouvent, mercredi 23 mai, pour un dîner informel à Bruxelles. Au menu : la relance de la croissance, l'inquiétante situation de la Grèce et la fragilité des banques espagnoles. François Hollande plaide depuis longtemps pour la mise en place de ces titres. Les dirigeants espagnol, italien, et autrichien y sont aussi favorables. Tout comme le président de la Commission européenne et celui du Conseil européen. Mais l'Allemagne, par la voix d'Angela Merkel, rejette vigoureusement cette solution.
• Les eurobonds, comment ça marche ?
Les eurobonds, c'est un système d'emprunt en commun entre les 17 pays de la zone euro. Actuellement, chaque pays emprunte de son côté quand il a besoin de lever des fonds. Le taux d'intérêt dépend de la santé économique du pays en question et en particulier du niveau de sa dette. A titre d'exemple, l'Allemagne a pu emprunter, la semaine précédente, de la dette à 10 ans au taux historiquement bas de 1,47%. La France, elle, fait face à un taux de 2,87%, l’Italie de plus de 5% et la Grèce frôle les... 30% !
L'avantage. Avec les eurobonds, les obligations seraient donc émises au niveau européen, et non plus des pays, en leur nom commun, avec un taux d'intérêt unique, qui serait une moyenne de ceux auxquels les différents pays membres se financent. Ces eurobonds entraîneraient une plus grande intégration au sein de la zone euro et la dette des 17 pays serait mutualisée. Grâce à cette solidarité, il n'y aurait aucune raison pour que la zone euro, dont le déficit 2012 est deux fois moindre que celui des États-Unis, n'obtienne pas des taux aussi avantageux que les Américains, estime Le Figaro. Ce qui donnerait une bouffée d'air aux pays en difficulté qui peinent à se refinancer en raison des taux élevés auxquels ils sont soumis (Grèce, Espagne, Italie, Portugal). Ils pourraient ainsi entreprendre de combler leur déficit et rembourser leurs créanciers.
L'inconvénient. Mathématiquement, les pays qui bénéficient déjà de la confiance des investisseurs (comme l'Allemagne) et de taux peu élevés verraient leur taux d'intérêt augmenter.
• Pourquoi l'Allemagne est farouchement contre
Les eurobonds sont un sujet tabou à Berlin depuis longtemps. Trois raisons à cela. Les Allemands estiment que leur faible taux d'intérêt est le résultat de leur vertu budgétaire. Ils ne veulent donc pas payer pour les mauvais élèves de la zone euro. Berlin considère aussi que ce système inciterait les Etats les plus fragiles économiquement à ne pas entreprendre les réformes nécessaires (contrôle des dépenses, réduction du budget...), les encourageant à se reposer sur la mutualisation des dettes. Enfin, la création d'eurobonds impliquerait une politique budgétaire commune. Comprendre, un fédéralisme économique beaucoup plus poussé, explique L'Expansion.
"Tant qu'un pays mène sa propre politique budgétaire, il est exclu de mettre en commun la garantie pour les obligations", a répété mercredi le ministre des Finances allemand, Wolfgang Schäuble, avant le sommet informel de Bruxelles, estimant que cela n'inciterait pas à la discipline au sein de la zone euro. Le rejet des eurobonds, maintes fois exprimé par Berlin ces dernières semaines, est "notre position ferme et cela le sera aussi en juin", lors du sommet européen, a également martelé mardi une source haut placée du gouvernement allemand.
• Le compromis des "project bonds"
Autre outil mis sur la table des Européens pour s'attaquer à la crise : les project bonds. C'est le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, qui est à l'origine de ce qui pourrait marquer un compromis avec l'Allemagne.
Il s'agirait aussi d'emprunts lancés en commun par plusieurs pays européens. Mais leur but serait de lever des fonds pour financer des grands projets d'infrastructures afin de stimuler les investissements. En clair, favoriser la croissance plus qu'éviter la spéculation sur les Etats affaiblis.
Grâce à une enveloppe de départ de 230 millions d'euros du budget européen, l'Union européenne pourrait lever, en s'appuyant sur la Banque européenne d'investissement (BEI) et des capitaux privés, jusqu'à 4,5 milliards pour financer dès juillet cinq ou six chantiers dans les transports, l'énergie ou l'économie numérique. Un "projet pilote [qui] paraît bien modeste pour répondre aux réels besoins de l'économie européenne", estime Euractiv.com. Le site spécialisé dans l'actualité de l'UE estime en effet les besoins européens d'investissements dans des infrastructures liées aux transports, à l'énergie, aux technologies de l'information et de la communication à 1 500 milliards d'euros pour la période 2010-2020.
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