: Reportage "C'est notre Club France à nous" : à l'hôpital de Clamart, des mini-olympiades apportent la magie des Jeux de Paris 2024 aux enfants malades
Elle prend toute la place dans les couloirs. Portée à bout de bras, l'énorme peluche d'Oly la Phryge, l'une des mascottes des Jeux de Paris 2024, fait sensation à chaque étage. "Nos donateurs ont été généreux", sourit Pierre-Henri Goulden, de l'association Du Sport et plus, qui coorganise une animation olympique à l'hôpital Antoine-Béclère (AP-HP) de Clamart (Hauts-de-Seine), ce matin du mercredi 7 août. A la vue du gros "doudou rouge", les enfants réunis dans la salle de jeux du service pédiatrie ne cachent pas leur excitation.
"Qui veut une photo avec elle ?", lance une soignante aux petits patients, qui ne se font pas prier. La plupart sont venus pour des examens ou des soins légers, et ne resteront qu'une journée à l'hôpital. Avant sa ponction lombaire, Alyah, 5 ans, est plus concentrée que jamais sur son jeu. Avec application, elle vise le trou percé dans une planche, tentant d'y lancer de petits sacs de sable. Le pied un peu au-delà de la limite, la fillette enchaîne les points sous les applaudissements de la salle. "Attention, on dirait que tu triches !", pointe Olivia, sa mère, déclenchant un éclat de rire malicieux.
"Malgré ses deux chimiothérapies, c'est une battante", poursuit fièrement Olivia. Les jours "où ça va bien", Alyah adore faire du vélo et bouger dans tous les sens. "Par contre, elle déteste perdre !", prévient sa mère. Après une hospitalisation d'un mois en mars, la fillette est soignée à domicile. Ce qui n'empêche pas ses parents de la pousser à s'activer. "Le sport, c'est important pour la guérison de nos enfants. On veut qu'ils retrouvent leur santé d'avant, qu'ils soient dans une forme olympique même", complète Olivia. Après sa performance, Alyah a le droit d'aller chercher un lot. Mais la voilà déjà partie sur une autre activité.
"Se sentir capable, c'est un boost pour le moral"
Au programme du jour, les enfants ont le choix entre du babyfoot, du tir sur cible ou encore de la décoration d'objets aux couleurs des JO. C'est à cet atelier que Léo, 9 ans, dessine avec soin sur une casquette blanche. Il n'est pas fan de sport, "plutôt de comédie musicale et de chant", mais l'animation olympique égaye tout de même sa matinée. "C'est bien de faire des choses plus artistiques aussi", souligne le jeune garçon. Autour de lui, plusieurs employées de l'hôpital ont pris une courte pause pour enfiler leurs accessoires bardés des anneaux olympiques. "La salle de jeux, c'est notre Club France à nous !", plaisante l'une d'entre elles.
Au total, "plus de 20 000 enfants bénéficient de notre aide chaque année", explique Pierre-Henri Goulden, bénévole pour Du Sport et plus. A travers la France, l'association fournit du matériel non médical à 32 services hospitaliers. Télévisions, jouets, poussettes, livres, mobilier... "On apporte tout le nécessaire pour vivre une vie d'enfant", résume-t-il. L'hôpital de Clamart est le premier à avoir reçu des bénévoles dans ses murs, il y a une dizaine d'années. "Depuis, l'assistance s'est bien diversifiée", se félicite Pierre-Henri Goulden.
En plus de cette aide matérielle, l'association fait venir des figures du sport dans les différents services. L'hôpital de Clamart est, par exemple, fier d'avoir reçu le tennisman Paul-Henri Mathieu, ainsi que les pilotes automobiles Margot Laffite et Kévin Estre. "Nous proposons aussi des sorties pour les enfants, à Roland-Garros ou lors de courses automobiles", ajoute Pierre-Henri Goulden. A l'occasion des Jeux olympiques, un petit groupe a récemment pu assister aux épreuves de gym, d'athlétisme ou encore de beach-volley. "Un moment magique" pour les jeunes et leurs parents, se félicite le bénévole.
"Nous recevons de plus en plus de demandes d'hôpitaux pour les aider à développer le sport chez eux. C'est un enjeu qui commence vraiment à s'imposer."
Pierre-Henri Goulden, bénévole de l'association Du Sport et plusà franceinfo
Des ateliers sportifs sont aussi proposés aux enfants hospitalisés. A Clamart, ils ont lieu le mardi après-midi, dans le cadre du programme d'activité physique adaptée en pédiatrie (Apap). "Grâce au sport, on travaille aussi sur la confiance que les enfants ont en eux, détaille Pierre-Henri Goulden. Se sentir capable, c'est un boost pour le moral et pour la forme en général."
Mini-Jeux, grandes retombées
Sous les décorations olympiques suspendues pour l'occasion, les points s'enchaînent pour Matteo, 11 ans, qui affronte sa mère à un jeu de tir de boules à scratch. Très enthousiaste, il lance avec tellement d'envie qu'il finit par faire tomber la cible en tissu. "A toi ! On va voir si tu peux me battre !", défie-t-il après avoir remis l'installation en ordre. Bonne joueuse, Sandrine, la maman, fait de son mieux pour viser les quartiers rapportant le plus de points. "Dans notre famille, le sport et la compétition, c'est très important", confie-t-elle. Malgré un petit retard de croissance, Matteo est très investi dans le judo. Ce qui l'a d'ailleurs amené à croiser des stars olympiques.
"Je m'entraîne parfois dans le club de Joan-Benjamin Gaba", révèle-t-il avec fierté. Pour ne rien rater des rencontres du judoka français, médaillé d'argent puis d'or par équipe, Matteo et sa famille se sont même rendus dans l'une des fan zones parisiennes. "Sur grand écran, c'était génial, se souvient Sandrine. Il n'y avait pas de coupures, on a pu regarder absolument tous les combats." De ces duels, Matteo n'a raté aucune miette. En prime, il a même pu repérer "des techniques spéciales", qu'il compte bien reproduire sur les tatamis à la rentrée.
Un tee-shirt Paris 2024 sur les épaules, Anne-Marie Petit, éducatrice au sein du service pédiatrie, ne sait plus où donner de la tête. Un lot à distribuer par-ci, un enfant à redresser par-là : les olympiades lui prennent beaucoup d'énergie. "C'est extrêmement important pour nous de trancher avec la monotonie et la solitude des chambres, insiste-t-elle. Les ateliers nous permettent en plus de travailler sur l'adresse, l'équilibre, le sens du collectif... C'est un tout." Grâce aux animations, l'équipe médicale a aussi l'occasion d'échanger avec les familles sur l'importance de l'activité physique. "Le but, c'est de les encourager à reproduire ces gestes à la maison", précise l'éducatrice spécialisée.
"On peut absolument tout adapter dans le sport. Un enfant est en fauteuil roulant ? Ce n'est pas grave, on bascule sur des Jeux paralympiques !"
Anne-Marie Petit, éducatrice au service pédiatrie de l'hôpital Antoine-Béclère (AP-HP)à franceinfo
Preuve que ces activités sont appréciées, "beaucoup d'enfants ne veulent plus quitter l'hôpital une fois passés par la salle de jeux", sourit Anne-Marie Petit. Entre ses jambes, plusieurs patients filent pour la dernière épreuve de la journée : un jeu de piste à travers le service. Avec l'aide des soignants ou de leurs parents, ils reviendront tous avec les trois rectangles de papier coloré nécessaires à la fabrication du drapeau français.
Après la remise des cadeaux, sans oublier les médailles d'or pour tous les participants, il est déjà l'heure de retourner dans sa chambre. "Avec tout ça, on aurait presque oublié qu'on est à l'hôpital", s'amuse l'une des mamans présentes. Dans un coin de la salle, un écran diffuse une épreuve de plongeon, après les courses d'athlétisme de la matinée. De quoi tenir compagnie à la peluche Phryge, offerte à l'hôpital, qui devrait faire le bonheur des jeunes patients bien au-delà des Jeux de Paris 2024.
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