Un deuxième fournisseur de PIP reconnaît lui avoir fourni du silicone industriel
La composition du gel pour les implants de la société française, soupçonnés de provoquer des cancers du sein, est au cœur du scandale. Du silicone servant d'additif pour carburants aurait été utilisé.
Quelle était la composition des prothèses PIP ? L'avocat de Jean-Claude Mas, le fondateur de Poly Implants Prothèses (PIP), a évoqué le 27 décembre un "gel maison". Dans la liste des ingrédients de ce produit que contenaient des prothèses mammaires défectueuses, on retrouve notamment du Baysilone, une huile de silicone utilisée habituellement comme additif pour carburants, du Silopren ou encore du Rhodorsil, qui servent dans l'industrie du caoutchouc, révèle RTL lundi 2 janvier.
"Ce n'est pas vrai du tout, se défend l'avocat de PIP, Yves Haddad. [Le produit utilisé] est un produit qui existe depuis 1980 et qui était acheté à [l'entreprise pharmaceutique] Rhône-Poulenc. Il ne s'agit pas d'un produit industriel, mais d'un produit alimentaire du même type que ceux qui entrent par exemple dans la composition des rouges à lèvres."
Jusque-là, l'avocat a toujours nié la toxicité du gel, qu'il reconnaît cependant non conforme. "Je ne suis pas chimiste, mais monsieur Mas s'expliquera sur tout ceci dans la semaine", a promis l'avocat de Jean-Claude Mas.
Dans la construction ou l'électronique
Pourtant, le plus important distributeur de produits chimiques au monde, l'allemand Brenntag confirme lundi avoir procuré du silicone industriel à PIP. "Nous avons fourni le produit et les caractéristiques du produit à PIP et nous sommes en contact avec les autorités sanitaires françaises", explique à Reuters le porte-parole de Brenntag. Ce silicone s'appelle bien Baysilone et est normalement utilisé pour sceller des matériaux de construction ou dans la composition d'équipements électroniques.
Autre témoignage accablant pour PIP : celui du producteur lyonnais de silicone Bluestar Silicones. "Nous n'avions aucun contact avec la société PIP (...) On livrait des produits auprès de nos distributeurs, qui eux-mêmes répondaient à des appels d'offre" de la part de PIP, explique mardi 3 janvier le directeur de la communication de Bluestar Silicones. Les livraisons de silicone Rhodorsil à la société PIP se sont étalées de 2001 à 2010. Atteignant quelques kilos lors des premières années, elles ont grimpé jusqu'à une dizaine de tonnes par an, selon Bluestar Silicones. Problème : "Le silicone qu'on livrait était destiné à un usage industriel et pas à un usage médical", ajoute-t-il. "C'est un silicone qu'on va retrouver dans des produits de lubrification, de chauffage, de climatisation, dans des isolants électriques. Mais en aucun cas pour un usage médical".
Selon RTL, l'éventuelle nocivité du mélange de produits commandés à de grands groupes de chimie industrielle n'a jamais été testée sur le corps humain. Ce sont d'ailleurs ces produits (Baysilone, Silopren et Rhodorsil) qui pourraient être à l'origine de la rupture des implants.
Un mélange différent selon les pays ?
"D'après l'Afssaps [Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé], on savait qu'il s'agissait d'un gel impropre, plutôt utilisé dans l'alimentaire et l'informatique", explique le médecin-conseil d'une association de porteuses d'implants PIP, Dominique-Michel Courtois. "On ne pouvait pas penser que le gel ait pu contenir un additif pour carburants. C'est pourquoi on réclame des analyses de prothèses directement prélevées sur les patientes", ajoute l'un des avocats des plaignantes, Philippe Courtois.
Selon lui, des analyses à l'étranger sont aussi nécessaires, après la révélation dans la presse britannique d'un taux de rupture des prothèses PIP bien plus élevé outre-Manche. "Le mélange variait peut-être selon les expéditions", suggère l'avocat. En France, vingt cas de cancers sont survenus chez des femmes porteuses de prothèses mammaires PIP.
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