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Lutte contre la déforestation : la volonté de la Commission européenne est "un moment important", estime l'eurodéputé Pascal Canfin

Le président de la Commission de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire appelle les instances européennes à aller encore plus loin.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Pascal Canfin, député européen La République en Marche-Renaissance et ancien directeur général de WWF France.  (FRANCEINFO / RADIOFRANCE)

"C'est un moment important. Nous sommes les premiers au monde à adopter le principe d'une telle législation", a affirmé mercredi 17 novembre sur franceinfo Pascal Canfin, député européen du groupe Renew et président de la Commission de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire, alors que la Commission européenne veut interdire les importations de certains produits dans l'Union européenne, lorsqu'ils contribuent à la déforestation. Le projet de texte de la Commission européenne cible "le cœur des matières premières les plus impactantes pour les forêts tropicales", précise Pascal Canfin.

franceinfo : Est-ce que vous soutenez la proposition de la Commission européenne et est-ce qu'elle est applicable ?

Pascal Canfin : Non seulement on la soutient, mais on a mis beaucoup de pression sur la Commission européenne pour qu'elle mette ce texte sur la table. Aujourd'hui, c'est un moment important, parce que nous sommes les premiers au monde à adopter le principe d'une telle législation. Sur le côté pratique, cela peut marcher de manière très simple. Des entreprises comme Danone, Nestlé ou Mars, que tout le monde connaît, pratiquent déjà la lutte contre la déforestation importée dans leurs achats, dans leur chaîne de valeur. C'est en discutant avec elles que l'on a appris comment elles faisaient concrètement en utilisant les coordonnées GPS et les images satellites. Si vous êtes Danone et que vous achetez de l'huile de palme en Indonésie, vous demandez les coordonnées GPS de l'huile de palme qui vous a été fournie pour savoir sur quel hectare elle a été produite. Vous utilisez les images satellites de Copernicus. Et vous regardez si, en 2021, c'est bien une plantation d'huile de palme, et si en 2018 c'était une forêt tropicale en Indonésie. Et si les images parlent d'elles-mêmes, vous n'achetez plus l'huile de palme. Et si vous l'achetez, vous avez des sanctions très importantes.

Sur des millions de produits, est-ce que cette méthode est possible ?

Il n'y a pas des millions de produits. Ce que l'on cible, ce sont les matières premières agricoles qui sont le plus responsables de la déforestation dans le monde. Les intermédiaires économiques qui achètent le café, le chocolat, le bois, l'huile de palme, ce sont des marchés très concentrés. Par exemple, Cargill, le premier trader de marché de matières premières au monde, est américain. Mais si cette entreprise américaine veut vendre sur le marché européen demain, elle devra assurer la traçabilité du café ou du chocolat qu'elle achète, et garantir à l'acheteur européen, Carrefour ou Danone par exemple, que ce café ou ce chocolat provient d'un hectare qui n'a pas été déforesté récemment. Les photos satellites aujourd'hui sont précises au km2 près.

Si ces produits sont ciblés, cacao, café, huile de palme, soja, bœuf, bois. Est-ce qu'il n'en faudrait pas plus ?

Le Parlement européen, et moi le premier, on est prêts à mettre sur cette liste l'hévéa, qui sert à fabriquer le caoutchouc, qui est l'une des principales causes de déforestation en Asie du Sud-Est. On peut éventuellement étendre un petit peu la liste, et je pense qu'on le fera au Parlement européen. Mais le cœur des matières premières les plus impactantes pour les forêts tropicales sont déjà concernées.

Le principe est donc d'aller à la racine du problème et non pas de laisser le soin au consommateur de faire lui-même la différence ?

Vous êtes un consommateur européen. Vous prenez une tasse de café le matin. Vous avez beau être parfaitement convaincu de la nécessité de lutter contre le dérèglement climatique, et donc de protéger les forêts tropicales, vous n'avez aucun moyen, au moment où l'on parle, de garantir que le café que vous achetez et que vous buvez, n'est pas issu directement de la forêt amazonienne qui a été rasée et remplacée par une plantation de café. Donc ce que l'on va faire, c'est que l'on va apporter cette garantie au consommateur européen. Vous allez me dire, 'si on ne le fait que sur les quelques pour cent de consommateurs européens qui sont prêts à acheter éventuellement plus cher ce café zéro déforestation, finalement on n'aura pas d'impact massif sur la déforestation'. Or, on a plus le temps. On sait que l'on est dans une situation d'urgence climatique.

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