Témoignage Cyclone Chido à Mayotte : "C'était comme si le cyclone nous suivait dans les couloirs", raconte un médecin de la maternité de Mamoudzou

Roger Serhal, chef du service obstétrique à l'hôpital de Mamoudzou, était à l'hôpital au moment du passage du cyclone Chido. Il rapporte jusqu'à 70% de lits endommagés par la tempête.
Article rédigé par franceinfo
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Des plafonds de la maternité de Mamoudzou se sont effondrés après le passage du cyclone Chido. (ROGER SERHAL - FRANCEINFO)

"Du jamais vu". C'est ainsi que résume la situation le chef du service obstétrique à l'hôpital de Mamoudzou, Roger Serhal, sur franceinfo dimanche 15 décembre après que le cyclone Chido s'est abbatu sur Mayotte. Alors que les secours s'organisent face aux dégâts, le gynécologue déplore une maternité qui n'est plus "adaptée" pour accueillir les patientes.

franceinfo : Quelle est la situation à l'hôpital de Mamoudzou ?

Roger Serhal : L'hôpital est dévasté. Il n'est pas apte parce qu'il y a eu beaucoup de destructions avec le cyclone. On a été inondé pendant trois heures, l'eau est montée à près de 30 cm, tous les toits sont tombés. La structure n'est plus du tout adaptée pour accueillir les patients à la maternité il y a environ 30 % des des chambres et des salles qui sont aptes, mais 70 % sont en état de destruction partielle ou totale.

Le chef du service obstétrique à l'hôpital de Mamoudzou rapporte que 70% des lits de la maternité sont inutilisables en l'état.
La maternité de Mamoudzou a subi de gros dégâts après le passage du cyclone Chido. Le chef du service obstétrique à l'hôpital de Mamoudzou rapporte que 70% des lits de la maternité sont inutilisables en l'état. (Roger Serhal)

Il y a une cinquantaine de patientes dans votre service actuellement, que s'est-il passé pour elles ?

Samedi, ça a commencé à souffler le matin et à partir de 11h30 les portes et les fenêtres ont commencé à éclater et l'eau est montée tout de suite. On a essayé de vider un petit peu des patients de l'hôpital vendredi mais il y avait quand même effectivement une cinquantaine de patientes, la maternité de Mayotte est la plus grosse maternité d'Europe avec près de 160 lits. C'est comme si le cyclone  nous avait suivi dans les couloirs, on a essayé de trouver un couloir adapté pour abriter les patientes, c'était la panique totale, les larmes, c'était très dur, entre 11h30 et 14h, c'était vraiment une scène d'horreur. J'ai été à la limite d'être dans l'obligation de césariser une patiente sur son lit avec l'anesthésiste parce que le bloc opératoire était inondé, heureusement finalement on a tout fait pour l'accoucher et on n'a pas effectué la césarienne.

Vous risquez de voir arriver à l'hôpital des dizaines et des dizaines de blessés, êtes-vous en mesure de les accueillir ?

Aux urgences générales il y a aussi beaucoup de salles qui sont détruites après le cyclone. Les effectifs de personnels sont un peu limite aux urgences générales. À la maternité, les effectifs sont plutôt corrects mais le problème c'est la structure. Elle n'est pas adaptée à accueillir les patients. J'ai le personnel, je n'ai pas la structure. Lors des réunions qu'on a effectuées une semaine avant, on a parlé de la manière dont ont allait devoir s'adapter au niveau du personnel, mais on n'a jamais parlé de barricader les fenêtres, on ne s'est pas demandé si les tôles allaient tomber.  

"Mayotte est trop mal adaptée pour faire face à un cyclone."

Roger Serhal

à franceinfo

La structure de l'hôpital n'est pas du tout adaptée pour un cyclone. La construction c'est pratiquement du niveau zéro, les murs sont tombés, les toits sont tombés, c'est incroyable, c'est une catastrophe, c'est une scène de guerre.

Vous avez vous-même perdu votre maison ?

Je suis dévasté, j'avais une maison de 100 mètres carrés, mais elle n'est plus là. Même ma voiture s'est écrasée. J'attends que les magasins ouvrent un peu pour acheter des choses car je n'ai pas de vêtements, je n'ai rien sur moi, seulement les tenues avec lesquelles je suis venu à l'hôpital vendredi soir. Pour le moment j'habite dans mon bureau, on va voir si l'hôpital va organiser quelque chose pour nous, mais ça va être très compliqué car je ne suis pas le seul, il y a plusieurs médecins qui ont perdu leur maison.

La maison du Dr Roger Serhal a également été détruite par le cyclone. (ROGER SERHAL - FRANCEINFO)
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