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Tempête Gérard : cinq choses à savoir sur le choix du nom des cyclones, ouragans et tempêtes

Un grand quart de la France a fait face à des vents violents dimanche et lundi. Mais pourquoi cette dépression a-t-elle été baptisée Gérard ? Un prévisionniste à Météo France nous explique comment se fait le choix des prénoms de phénomènes extrêmes.
Article rédigé par Valentine Joubin
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 9min
Des vents violents à Etretat (Seine-Maritime), le 18 février 2022. (SAMEER AL-DOUMY / AFP)

La tempête Gérard s'éloigne peu à peu des côtes françaises, lundi 16 janvier. Seuls trois départements restent en vigilance orange pour crues et neige-verglas et plus aucun ne l'est pour vents violents. Près de 90 000 foyers étaient toujours privés d'électricité en fin de matinée, en particulier dans l'Ouest. 

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Mais pourquoi cette dépression est-elle affublée du prénom Gérard, très populaire dans les années 50 ? À chaque dépression, tempête ou cyclone, un nouveau nom est choisi. Par qui, et sur quels critères ? On vous explique, avec Sébastien Léas, prévisionniste à Météo France.  

Pour la France, la liste est établie avec le Portugal et l'Espagne

Armand, Béatrice, Claudio, Denise, Efrain, Fien et... Gérard. Voici, dans l'ordre, les sept premiers noms de tempête (sur une liste de 21 au total) pour la saison 2022-2023 publiés sur le site de Météo France. Les phénomènes qui toucheront la France, l’Espagne ou le Portugal sont, en effet, nommés à partir de cette liste, établie comme chaque année depuis 2017 avec les services météorologiques espagnols (Aemet) et portugais (IPMA). La Belgique et le Luxembourg se joignent également au groupe cette année. Le prochain épisode venteux d'ampleur sera logiquement appelé Hannelore.

Toutes les tempêtes ne méritent évidemment pas d'être baptisées. "Une dépression est nommée lorsque celle-ci risque de générer une vigilance vent au moins de niveau orange sur l'un des pays partenaires", précise Météo France.

Une autre liste concerne "plutôt les îles Britanniques", explique Sébastien Léas, prévisionniste à Météo France. C'est le Met Office du Royaume-Uni et le Met Eireann d'Irlande, mais aussi le KNMI des Pays-Bas, qui déterminent ensemble une liste dans laquelle piocher. Un autre groupe "va concerner la Méditerranée centrale", de l'Italie à Malte en passant par les Balkans, un autre, encore, la Méditerranée orientale (Grèce, Chypre, Israël). Idem pour l'Europe du Nord (Danemark, Norvège, Suède) et du Nord-Est (Finlande et Pays Baltes).

Le choix des noms reste un mystère

Ces listes sont renouvelées chaque année et commencent alternativement par un prénom masculin puis féminin. Elles suivent l'ordre alphabétique. Pourquoi tel prénom plutôt qu'un autre ? Pourquoi Noa, Kamiel, Tiago ou encore Hannelore ont-ils été choisis cette année ? "C'est une bonne question, avoue, avec le sourire Sébastien Léas. En fait, c'est une réunion qui se fait entre tous les services météo concernés. Si on prend les îles Britanniques, ce sont les Irlandais et les Britanniques qui se réunissent et qui choisissent leurs prénoms. On peut voir par exemple sur la liste Méditerranée centrale que cette année, on a du Dino, du Bogdan, ou du Helios." Un choix "polyculturel", avance le prévisionniste. Pour l'Irlande, la Grande-Bretagne et les Pays-Bas, la saison commencera avec Antoni, Betty, Cillian et Daisy.

Pour nommer les phénomènes cycloniques (ouragans, typhons et cyclones)le système est différent. Six listes sont disponibles pour les six bassins océaniques et sont utilisées à tour de rôle. Ainsi, la liste dont se sert actuellement Météo France à Saint-Denis-de-La Réunion, qui gère les prévisions du bassin du sud-est de l'océan Indien, sera de nouveau utilisée en 2028.

Avant 2017, les tempêtes avaient des noms allemands

Avant 2017 et la création des listes officielles européennes, "personne ne nommait les dépressions, raconte Sébastien Léas, à part l'Université libre de Berlin qui en avait même fait un commerce en vendant directement les noms". Contre 199 euros, il était ainsi possible de donner le nom de son choix à une dépression. L'achat était accessible à tous via un service intitulé "Adopt a Vortex" (adoptez une tornade). "On utilisait surtout la liste des Allemands, raconte le prévisionniste de Météo France. Lothar, Martin, Klaus... Toutes ces tempêtes qui ont concerné notamment la France – on peut même penser à Xynthia – ont eu des conséquences assez dramatiques par moments." 

L'Allemand qui avait "acheté" Xynthia était évidemment loin de s'imaginer que ce nom serait donné à une dépression européenne majeure qui a coûté la vie à 49 personnes, fin février 2010. "C'est un grand-père qui avait acheté ce petit vortex pour sa petite fille qui s'appelait Xynthia, raconte Sébastien Léas, et qui a été catastrophé de voir les conséquences de la tempête. C'est malheureusement un peu le risque dans ces cas-là. Il faut savoir que les Allemands font le commerce des dépressions, mais aussi des anticyclones."

Il y a parfois des "couacs" entre pays

Même si toutes les tempêtes, fort heureusement, ne deviennent pas des catastrophes naturelles et humaines, voir son nom associé à une tempête n'est pas très agréable. Mais que les Armand se rassurent (un peu). La prochaine dépression qui touchera la France métropolitaine ne portera pas forcément leur prénom. Comme l'explique Sébastien Léas, c'est le premier pays à être touché qui baptise la dépression. À titre d'exemple, l'Italie a fait face à une tempête qu'elle a baptisée Dino. Si cette dépression avait gagné les côtes méditerranéennes françaises, Météo France aurait dû s'aligner sur ce choix italien. Pas question de piocher dans notre liste et de l'appeler Armand.

Il y a quand même parfois des couacs entre voisins. Sébastien Léas se souvient de la tempête Aurore (en octobre 2021)  "qui aurait dû être nommée par les Britanniques et qu'ils n'ont pas nommée, pensant que ça n'allait pas les concerner. Et finalement, ils ont eu des vents à 100, 120 kilomètres par heure avec une vigilance orange. C'est nous [Météo France] qui l'avons nommée puisqu'on avait prévu justement des vents forts le long des côtes de la Manche sur un large quart nord-ouest". Cette dépression aurait ainsi dû s'appeler Arwen. Quant aux Allemands, ils n'ont pas suivi le choix fait par Météo France, et baptisé cette tempête automnale Hendrik.

Parfois, ce n'est pas un pays, mais tous les pays concernés qui sont pris de court, poursuit le prévisionniste : "D'un coup, ça se creuse énormément. C'est extrêmement actif et on nomme [la tempête] un peu en catastrophe. Ça a été par exemple le cas de la tempête Zeus [en mars 2017] qui avait balayé une bonne moitié nord de la France, mais aussi quasiment toute la moitié sud des îles britanniques et le Bénélux".

Certains noms sont "blacklistés"

Les listes de tempêtes européennes étant renouvelées chaque année, la question de la réutilisation d'un nom ne se pose pas. Mais pour désigner les phénomènes cycloniques, les mêmes listes revenant par cycle de six ans, les prénoms peuvent être utilisés plusieurs fois. "On peut très bien retrouver des ouragans qui ont exactement les mêmes noms à six ans d'intervalle, s'il n'y a pas eu des conséquences dramatiques", pointe Sébastien Léas. 

Certains noms d'ouragans ont ainsi été retirés des listes par l'organisation météorologique mondiale (OMM) parce qu'ils avaient causé "beaucoup de dégâts avec un nombre de décès et de victimes extrêmement important", explique Sébastien Léas. L'OMM dresse sur son site une "funeste" liste de noms qui ne seront plus jamais donnés : Mangkhut (Philippines, 2018), Irma et Maria (Caraïbes, 2017), Haiyan (Philippines, 2013), Sandy (États-Unis, 2012)Katrina États-Unis, 2005), Mitch (Honduras, 1998) et Tracy (Darwin, 1974).

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