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Toux, yeux qui piquent et gorge irritée : pas de doute, vous êtes malade de la pollution

Le pic de pollution provoque des symptômes souvent handicapants, parfois à prendre au sérieux. Ils disparaîtront normalement après l'épisode, mais les risques à long terme, eux, subsisteront.  

Article rédigé par franceinfo - Alice Maruani
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Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Paris sous un nuage de pollution, le 12 octobre 2016. (PATRICK KOVARIK / AFP)

Depuis quelques jours, Eléonore a la gorge qui pique, du mal à respirer et les narines noires. Des maux de tête aussi. Fumeuse, elle a beaucoup ralenti sa consommation et allume les rares cigarettes qu'elle s'autorise encore uniquement dans son appartement, fenêtres closes. "Quand j'ouvre, les odeurs de voiture sont intenables", précise-t-elle à franceinfo. Cette étudiante en droit habite à côté de la Défense, à Paris, près d'un axe où la circulation est très dense. Eléonore n'est pas sûre, dit-elle, que ces symptômes soient liés au pic de pollution hivernal qui touche notamment l'Ile-de-France depuis le jeudi 1er décembre. Ou même qu'ils soient bien réels : "Il y a peut-être un facteur psychologique", s'interroge-t-elle.

Mais Eléonore ne rêve pas. Ses symptômes ont toutes les chances d'être liés à l'épisode de pollution aux particules fines et à l'azote. Généralement, ils apparaissent vingt-quatre à quarante-huit heures après le démarrage du pic de pollution, explique Bruno Housset, Chef du service de pneumologie au Centre hospitalier intercommunal de Créteil. Et ils peuvent toucher tout le monde. "Vous avez la gorge qui pique, les yeux qui brûlent et un drôle de goût dans la bouche ? Il n'y a pas de doute, c'est ça", affirme-t-il à franceinfo.

Coincée chez soi

La gêne est parfois telle qu'elle amène à modifier les emplois du temps pendant le pic. C'est le cas de Joffrey, 18 ans, qui habite en pleine campagne, en Seine-et-Marne. Ses balades quotidiennes avec son chien durent d'habitude une bonne trentaine de minutes, à marche rapide. "Mais j'avais plus de mal à récupérer qu'avant, et même à respirer. Du coup, je vais plus lentement et je marche moins longtemps". Idem pour Julien, 31 ans, qui se dit "un peu asthmatique" : il a décidé de laisser son vélo au garage et de prendre le métro pour se rendre à son travail, à Paris.

Julie, elle, ne peut carrément "plus sortir" de chez elle : "Je n'arrive pas à respirer, tout simplement." Cette animatrice socio-culturelle, "en parfaite santé" précise-t-elle, qui habite à La Plaine Saint-Denis, en banlieue parisienne, explique avoir dû annuler ses rendez-vous, tout en toussant au téléphone. 

Je vais déménager hors de Paris, dans le sud peut-être, je ne vais pas rester ici et m'empoisonner ! 

Julie, animatrice socio-culturelle

à franceinfo

"Plusieurs centaines de morts"

Plus grave, certaines personnes tombent gravement malades lors de ces épisodes."Les services de pneumologie voient arriver beaucoup de personnes ces derniers jours. Et ce n'est pas la grippe", explique Bruno Housset. Les services qui traitent les maladies cardio-vasculaires sont aussi débordés, témoigne le médecin. Ces personnes qui arrivent aux urgences en état d'insuffisance respiratoire ou cardiaque sont souvent celles qui présentaient déjà des maladies de types bronchite chronique, asthme ou maladies cardio-vasculaires.

Sacha, 10 ans, a par exemple été victime d'une grosse crise d'asthme dimanche soir, au point d'être hospitalisé depuis lundi 5 décembre, raconte sa mère Magali à franceinfo. La famille habite à une trentaine de minutes en voiture de Toulouse, région touchée par la vague de pollution, mais moins que d'autres. Magali explique : "On ne fait pas vraiment partie d'une zone à risque. Mais ça faisait cinq ans que Sacha n'avait pas eu de crise, donc on a fait le lien." 

Même si le lien de cause à effet est difficile à prouver, la pollution de l'air par les oxydes d'azote, qui inflamment les bronches, peut provoquer une souffrance respiratoire et des crises d'asthme. Emeline, étudiante en journalisme à Lille et asthmatique "stabilisée", a dû reprendre son traitement pour éviter la crise. "Je sais quoi faire maintenant car ce n'est pas le premier pic de pollution ici. Il faut bien que j'aille encore en cours", remarque la jeune femme.

Même si les données n'existent pas encore pour cet épisode particulier, Bruno Housset ne doute pas que "plusieurs centaines de morts supplémentaires seront à déplorer à cause de la pollution de ces derniers jours." Ces décès ne seront pas directement dus à la pollution, mais "à une aggravation de la maladie causée par la pollution ", précise le médecin.

Un bon gros rhume ?

Conséquence plus bénigne mais tout de même pénible de ce bain d'azote et de particules fines : vous risquez d'attraper un bon gros rhume dans quelques jours. Après les pics de pollution, le nombre d'infections pulmonaires augmente, assure Bruno Housset. Joffrey pense attendre la fin du pic pour consulter un médecin, "si les symptômes ne passent pas". S'il échappe à la bronchite ou à la rhinopharyngite, il y a en fait toutes les chances pour que ça se calme presque immédiatement.

Bruno Housset met néanmoins en garde : "Cela ne retire rien aux risques à long terme de cette exposition. Pour les jeunes enfants ou les fœtus, le risque de développer de l'asthme par exemple. Et pour les autres, le diabète ou le cancer du poumon." Pour minimiser ces risques, le médecin conseille de bien s'informer sur les zones polluées, de passer peu de temps à l'extérieur et de ne pas faire de sport pendant l'épisode. "Et, plus globalement, il faut mettre en place des politiques anti-pollution efficaces, comme la circulation alternée. Et s'adresser aux industriels".

Des risques de cancer et de maladies cardio-vasculaires qui restent cela dit bien moindres que ceux liés à la consommation de cigarettes, rappelle Bruno Housset. "Mais qui concernent énormément de monde, et des personnes qui n'ont pas choisi d'être exposées aux polluants".

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