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Peu nombreuses, mal calibrées... L'association Respire juge "insuffisantes" les mesures de la pollution par la RATP dans le RER et le métro

Avec le concours du chercheur du CNRS Jean-Baptiste Renard, le collectif a mené une campagne inédite de mesures de la pollution dans le métro parisien et le RER A. La RATP se dit prête à travailler avec eux.

Article rédigé par Thomas Baïetto
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Des passagers sur le quai du RER A, le 22 octobre 2018 à Gare de Lyon. (ESTELLE RUIZ / NURPHOTO/ AFP)

Grâce aux mesures effectuées par la RATP, on savait déjà que l'air du métro et du RER était plus pollué qu'à l'extérieur. Respire, association nationale pour la prévention et l'amélioration de la qualité de l'air, publie, mercredi 18 septembre, une nouvelle étude qui montre que les instruments utilisés par la régie des transports parisiens – trois stations de mesures fixes – sont "insuffisants" pour évaluer l'intensité de cette pollution. "Nous ne pouvons pas nous contenter des mesures actuelles, trop rares" et mal calibrées, explique à franceinfo Olivier Blond, son président.

L'étude a été menée en juin 2019 par l'équipe de Jean-Baptiste Renard, chercheur au CNRS et spécialiste de la pollution aux particules. Les lieux choisis pour l'expérience sont les stations du RER A Gare de Lyon ainsi que Cité et Châtelet, sur la ligne 4 du métro. Des mesures ont aussi été effectuées dans les couloirs d'entrée de la station Châtelet et dans une rame de la ligne 10, entre Odéon et Gare d'Austerlitz. "C'est un acte citoyen, nous avons mis notre instrumentation à la disposition de la société civile", contextualise le scientifique auprès de franceinfo. Il a utilisé un capteur portatif LOAC-Recorder, qui "permet d'obtenir la concentration en particules fines pour 19 gammes de tailles, entre 0,2 et 50 µm". L'appareil ne pèse pas les particules, comme un capteur classique, mais les compte.

Gare aux particules ultrafines

Cette méthodologie apporte un niveau de précision inédit, selon les auteurs des tests : c'est "la première étude à mesurer les particules les plus fines dans les enceintes souterraines du métro et du RER", assure le document. Or, plus les particules sont fines, plus elles peuvent pénétrer dans l'organisme et y provoquer des maladies respiratoires et cardiovasculaires. L'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) avait d'ailleurs mis en garde en juillet sur le danger des particules ultrafines (0,1 µm, PM0,1).

En promenant son appareil dans les couloirs, Jean-Baptiste Renard a constaté la "grande variabilité des mesures" en fonction de l'endroit où l'on se trouve : l'air est ainsi plus pollué sur les quais que dans les couloirs. Les particules fines sont plus présentes à l'avant du quai qu'au milieu. "Dans le RER A, l'arrivée de certaines rames est précédée d'un fort nuage de particules, sans doute liées au freinage, explique le chercheur. Cela montre que ce n'est pas un indicateur suffisant de mettre un appareil fixe [comme le fait la RATP] au milieu de la station." 

Pour des mesures "un peu plus sérieuses"

Ce jour-là, en début de quai, l'appareil mesure un nombre de particules équivalent à une concentration de particules PM10 de 300 μg/m3, contre 30 à l'extérieur. L'OMS recommande de ne pas s'exposer à une concentration supérieure à 50, sur une durée de 24 heures.

Je conseille aux gens de ne pas attendre le RER en bout de quai, de se positionner au milieu ou dans des endroits ventilés.

Jean-Baptiste Renard

à franceinfo

Autre enseignement : l'importance, dans le réseau de transports en commun, des particules fines PM1, inférieures ou égales à un micromètre. D'après l'étude, elles représentent 99,5% des particules mesurées par l'appareil de Jean-Baptiste Renard. Problème, "ces particules sont mal détectées actuellement. Elles sont plus légères, donc on peut passer à côté si on utilise des appareils qui mesurent la masse", insiste le chercheur. Avant de préciser : "Ce ne sont pas que des particules carbonées, il y a une production intrinsèque à l'intérieur du réseau du métro, avec le freinage, le ballast, la voûte et les gens." La confirmation que la pollution ne vient pas seulement de l'extérieur.

Fort de ces nouveaux éléments, Olivier Blond demande à la RATP de mettre en place "un vrai programme de mesures", "un peu plus sérieux que ce qui se passe actuellement", une meilleure information des usagers, ainsi que des dispositions pour dépolluer et mieux ventiler les stations. Il pointe les risques pour la santé des usagers et surtout des employés de la RATP, encore plus exposés. L'étude a d'ailleurs été menée en lien avec la Fédération CFDT Transports.

La RATP vante son "dynamisme sur ce sujet"

Contactée par franceinfo, la RATP défend son action dans le domaine : des mesures menées sur trois stations représentatives, la généralisation en 2030 du freinage électrique pour limiter les particules, 56 millions d'euros entre 2016 et 2020 pour l'amélioration de la ventilation et des expérimentations constantes, comme le système de filtrage "IP'AIR" testé depuis juin à Alexandre Dumas, une station de la ligne 2 du métro. "La RATP est très dynamique sur ce sujet", explique Sophie Mazoué, responsable développement durable à la régie.

Et la responsable de rappeler que la RATP mène des campagnes de mesures ponctuelles, en plus des stations fixes, et qu'elle a déjà fait le constat de la variabilité des mesures.

Leurs résultats confirment les nôtres et apportent une information complémentaire. Leur étude est intéressante, nous sommes disposés à poursuivre ce travail avec eux.

Sophie Mazoué

à franceinfo

Jean-Baptiste Renard est lui aussi prêt à collaborer avec la régie. "Notre but n'est pas d'affoler ou d'alarmer les gens, mais d'expliquer comment on pourrait faire pour améliorer la qualité de l'air dans le métro", explique le scientifique. L'étude souligne également que "ces mesures sont encore préliminaires et nécessiteraient d'être étendues, reproduites, élargies". Le chercheur compte prochainement lancer une nouvelle campagne pour affiner ces premiers résultats.

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