Il y a 20 ans, les journalistes Johanne Sutton, Pierre Billaud et Volker Handloik étaient tués en Afghanistan
Le 11 novembre 2001, ces trois grands reporters ont été pris dans une embuscade tendue par les talibans, en Afghanistan. Vingt ans après, franceinfo leur rend hommage.
C'était il y a vingt ans, en Afghanistan. Les talibans vivaient leurs dernières heures au pouvoir à Kaboul, sous la pression d'une offensive de la rebellion afghane et d'une coalition internationale menée par les Etats-Unis. Sur le terrain, dans le nord-est de l'Afghanistan, Johanne Sutton, journaliste à RFI, Pierre Billaud, journaliste à RTL et ancien de Radio France, et Volker Handloik, journaliste allemand envoyé par le magazine Stern. Le 11 novembre 2001, ils suivent un convoi de soldats de l'Alliance du Nord entre Taloqan et Kunduz quand ils sont pris pour cible par les talibans. Au terme de l'embuscade, les trois journalistes sont retrouvés morts.
Ce 11 novembre 2001, Véronique Rebeyrotte, grande reporter à France Culture, était sur le char, entre Johanne Sutton et Pierre Billaud. Elle se rappelle la violence de l'attaque, alors qu'il fait nuit noire, les tirs de Kalachnikov, de roquettes, le char qui freine brutalement, fait des embardées et elle qui s'accroche.
Les proches toujours "sans réponse" sur les circonstances de la mort
Pierre Billaud et Johanne Sutton sont-ils tombés ? Ont-ils sauté ? Sont-ils morts sur le coup ou plus tard ? "On ne le saura jamais", dit Véronique Rebeyrotte. Aujourd'hui, Elisabeth Sutton souffre toujours de ce manque d'informations sur la mort de sa sœur Johanne. "La seule chose que l'on sait, c'est que les trois corps n'étaient pas au même endroit. Est-ce qu'ils ont été juste blessés, est-ce qu'ils sont tombés et qu'ils ont été sauvagement assassinés ? On est toujours sans réponse." Le chef du bureau Afghanistan de Reporters sans frontières explique qu'il n'y a jamais eu d'enquête, en tout cas publique, ni du côté de la force internationale mandatée par l'Otan, ni du côté de l'Alliance du Nord. "D'habitude, nous savons de quelles façon meurent les journalistes. Là, nous n'avons eu quasiment aucune information", précise Reza Moini.
Dans un de ses derniers reportages pour RTL, peu avant de disparaître, Pierre Billaud racontait la vie de femmes afghanes sous le régime taliban. Elles décrivaient à son micro leurs vies dans un pays devenu "une prison pour femmes", le maigre espoir suscité pour elles par la perspective de la chute des talibans. Des témoignages qui résonnent avec la situation en Afghanistan en 2021, où les talibans ont repris le pouvoir. Comme si, à vingt ans d'écart, cette actualité que Johanne, Pierre et Volker aimaient tant décrire bouclait sur elle-même.
Dans ce reportage, c'est la voix de Johanne Sutton que l'on entend : c'est elle qui ce jour-là assure pour Pierre Billaud les traductions des témoignages.
Pierre Billaud, âgé de 31 ans, était en Afghanistan depuis trois semaines au moment où il a été tué. Avant RTL où il était grand reporter au service étranger depuis deux ans, il était passé aux micros de France Inter et franceinfo. Johanne Sutton allait avoir 35 ans. Entrée à RFI en 1990, elle avait été correspondante à Londres. Ancienne cheffe du service reportage de RFI qu'elle avait intégré en 1996, elle avait choisi de redevenir reporter de terrain. Volker Handloik, 40 ans, travaillait pour le magazine allemand Stern.
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