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Algérie : le projet de rénovation de la Casbah d'Alger oscille entre Paris et La Havane

Pure rumeur ou préparation des esprits, la presse algérienne s’est faite l’écho du changement de main du projet de rénovation de la Casbah d’Alger initialement confié à Jean Nouvel. Une information laconiquement infirmée par le ministère algérien de la Culture.

Article rédigé par Alain Chémali
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 6min
Un éboueur conduit un âne dans la vieille ville d'Alger, connue sous le nom de "Casbah", le 22 mai 2017. (RYAD KRAMDI / AFP)

Citant des "sources généralement bien informées", le site en ligne Algérie patriotique affirme dans sa livraison du 15 mai 2019 que "la rénovation de la Casbah d’Alger a été retirée aux Français et confiée aux Cubains qui ont une longue expertise dans ce domaine".

Un plan de sauvegarde et de revitalisation

Dans le cadre d’un partenariat "stratégique" entre la wilaya (préfecture) d’Alger et la région Ile-de-France, l'atelier de l’architecte Jean Nouvel, de renommée mondiale, s’est en effet vu confier officiellement le 16 décembre 2018 une mission. Celle d’élaborer un plan de sauvegarde et de revitalisation de la médina d’Alger, le quartier historique de la capitale algérienne classé Patrimoine mondial depuis 1992.

Entrelacs de venelles et de rues étroites réparties par corps de métiers, "la plupart des échoppes sont fermées ou relouées à des familles qui s’y entassent dans des conditions épouvantables", raconte Le Monde. En constante dégradation. Détérioration des logements, écroulement de maisons... cinq personnes d’une même famille y sont encore mortes le 22 avril 2019, dans l’effondrement de leur immeuble vétuste.

Le projet de revitalisation de la Casbah "qui associera experts français et algériens, inclura notamment la réalisation d’une vision architecturale globale ainsi que la reconversion du palais Dar El-Hamra en équipement culturel métropolitain", indiquait un communiqué de l’ambassade de France en décembre 2018.

Une pétition contre Jean Nouvel signée par 400 personnes

Sitôt rendue publique, la convention tripartite entre la Wilaya, la région Ile-de-France et les ateliers Jean Nouvel a provoqué un tollé. Plus de 400 signataires des deux rives de la Méditerranée se disant "choquées" ont adressé une lettre ouverte à l’architecte de l’Institut du monde arabe à Paris et du musée du Louvre d'Abou Dhabi. "La Casbah d’Alger, pour nous, bien avant d’appartenir à l’humanité appartient d’abord à ses habitants, qu’ils possèdent un titre de propriété ou non et aux Algériens dont la lutte révolutionnaire contre le colonialisme français a régulièrement pris appui sur sa capitale et en particulier, sa Casbah", écrivent les signataires de cette lettre publiée dans L'Humanité du 20 décembre 2018.

Rappelant que les Français "ont déjà partiellement détruit trois fois" la Casbah dans son histoire, en 1830 suivant l’invasion de la régence, à la fin des années 30 lors de "la guerre aux taudis"  et dans les années 50 en pleine guerre d’indépendance, les signataires appellent Jean Nouvel à se désister. "Nous, architectes, historiens, électriciens, agents d’entretien, universitaires, artistes, et autres militants internationaux, pour qui la Casbah continue de représenter l’un des symboles les plus forts d’une architecture révolutionnaire, nous faisons appel à votre conscience politique afin que vous renonciez à ce projet. N’acceptez pas d’être complice d’une quatrième vague de transformation brutale française de la Casbah", écrivent-ils.

En réponse, Jean Nouvel a rappelé à ceux qu’il a qualifiés "de professionnels de la profession" qu’il a toujours été "un homme de convictions et d’engagements. Fils d’enseignants laïques, ils m’ont inculqué le sens de la droiture et la tolérance. Ils m’ont appris aussi à exprimer sans honte mes pensées, à ne pas rester silencieux face à l’humiliation."

"L’heure est au respect mutuel et à l’amitié. Un demi-siècle après, personne n’est responsable des crimes et des erreurs des générations d'alors. J’ai toujours considéré que l’architecture doit être un don, un cadeau, un acte d’amour pour un lieu et ceux qui le vivent", a-t-il encore ajouté, relançant la polémique.

Dernier cadeau de Bouteflika à la France avant éviction

Qualifié de dernier cadeau d’Abdelaziz Bouteflika à la France avant son éviction, le projet n’a pas fini de susciter les oppositions et les rumeurs. La révélation d’Algérie patriotique est intervenue au lendemain d’une rencontre entre la ministre algérienne de la Culture, Meriem Merdaci, et l’ambassadeur de Cuba à Alger, Clara Margarita Pulido Escodell.

Examinant les voies et moyens de renforcer la coopération bilatérale dans le domaine culturel, les deux parties ont convenu de conclure "dans les semaines à venir" un accord portant sur la restauration de la Casbah d'Alger, a rapporté la Radio algérienne.

A cette occasion, la ministre de la Culture a salué l'association de la société civile aux différentes actions de restauration menées à Cuba, au niveau des quartiers séculaires de La Havane. L'expérience de Cuba est pionnière en matière de restauration du patrimoine, notamment dans La Habana Vieja (la Vieille Havane) a encore précisé la radio.

Vrai faux démenti du ministère de la Culture

Toutefois, suite aux informations affirmant que le dossier de la Casbah avait été retiré à la France, Meriem Merdaci a apporté des précisions en forme de vrai faux démenti. "Au cours de l’audience accordée par la ministre de la Culture à son excellence l’ambassadeur de Cuba à Alger, le dossier relatif à la rénovation de la casbah n’a jamais été à l’ordre du jour", rapporte le site DIA (dernières infos d’Algérie).

"Les deux parties ont examiné les moyens de renforcer la coopération bilatérale dans le domaine de la culture et en particulier celui de la formation dans le domaine de la restauration et de la réhabilitation des médinas", précise encore le communiqué du ministère.

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