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Rachid Nekkaz : qu’est-ce qui fait courir l’homme qui marche ?

Il a tenté de se présenter à la présidentielle à Paris, puis à Alger. Il paie de sa poche toutes les amendes contre le port du niqab en France et en Belgique (environ 200.000 euros). Rachid Nekkaz crée le buzz des deux côtés de la Méditerranée. Il lance une pétition pour une présidentielle anticipée en 2015 pour «remplacer le président Bouteflika très malade».
Article rédigé par Mohamed Berkani
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 4min
Rachid Nekkaz à Alger en 2014. (Farouk Batiche/AFP)

Sans programme politique clair, avec un aplomb incroyable, toujours le sourire aux lèvres, Rachid Nekkaz est un as du marketing. Sa marque déposée ? Lui-même. En quelques mois, il a réussi à se faire un nom en Algérie en occupant, voire en saturant, l’espace médiatique. Son parcours est pour le moins énigmatique. Il aurait fait fortune dans l’immobilier et les nouvelles technologies avant de se lancer dans la politique. Durant la campagne présidentielle de 2014, les Algériens découvrent un «winner» à l’américaine qui prône des réformes, mais pas trop. Il est pour le changement mais dans la stabilité, contre la burqa mais pour la liberté de la porter, pour ou contre mais…
 
Une date : le 23 octobre 2013. Ce jour-là, il convoque la presse devant l’Elysée. Il voulait rendre son passeport français en présence de journalistes. Il est prié de prendre contact avec la préfecture de Créteil. Rachid Nekkaz n’est plus français, uniquement algérien. Et peut donc se présenter à la présidentielle. Il serait faux de croire qu'il a coupé radicalement ses relations avec la France. Le jeune millionnaire y a toute sa fortune et refuse d’investir le moindre dinar en Algérie où, selon lui, il est impossible de faire des affaires sans être corrompu ou corrupteur.


Aventures «abracadrabantesques»
Le jeune quadra traîne une réputation sulfureuse. En 2011, il tente vainement de se présenter aux primaires du PS. Pour «démontrer la fragilité de la procédure électorale», il achète le parrainage d’un maire. Résultat : il écope d’une condamnation de 18 mois de prison avec sursis et 5.000 euros d’amende. Le maire, qui avait accepté 648 euros en liquide en échange de son parrainage, se voit infliger 2.000 euros d’amende pour corruption passive.
 
C’est désormais de l’autre côté de la Méditerranée qu’il mène son combat politique. Là aussi, avec des coups médiatiques dont il a le secret. Le soir du dépôt des 60.000 parranaiges nécessaires à sa candidature devant le Conseil constitutionnel, le camion les transportant avait mystérieusement disparu. Rachid Nekkaz, qui ne peut plus se présenter, laisse entendre qu’on l’a empêché de succéder à Bouteflika.


L’hymne national ? «Lalala, lala-lala...» 
L’homme a réussi son coup : il existe médiatiquement sur les deux rives. Il arrive même à transformer ses déboires en opérations de communication. A un animateur d’une chaîne de télévision privée qui lui demandait s’il connaissait l’hymne national algérien, le natif de Choisy-Le-Roi reprend le premier mot (kassamane) avant de poursuivre par tara-ne, tara-ne… Buzz assuré sur les réseaux sociaux et un élan de sympathie pour le jeune millionnaire.
 
L’ancien étudiant en philosophie de la Sorbonne a toujours un coup d’avance sur ses adversaires. Après une marche de 673 km en Algérie en novembre et décembre 2014 pour appeler au changement, il débarque à Paris pour faire face à la justice et régler les PV dressés aux femmes portant le niqab. L’homme d'affaires qui  se dit «contre le niqab, mais pour la liberté de circuler avec» aurait déjà réglé les amendes de 877 femmes en France, pour un montant 198.000 euros, et 123 amendes en Belgique. Marié religieusement à une Américaine catholique, il se présente comme musulman laïc. Sans parti politique derrière lui, il semble condamné à faire de l’activisme. Sa dernière initiative : une pétition pour «des élections présidentielles anticipées pour remplacer le président Bouteflika très malade». Une initiative qui a peu de chance d’aboutir mais l’essentiel est ailleurs…

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