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Botswana : le calvaire des Bushmen expulsés de leurs terres ancestrales
C’est l’une des communautés les plus marginalisées d’Afrique. Premiers habitants de l’Afrique australe, les Bushmen, également appelés San, seraient au nombre de 100.000, répartis pour l’essentiel en Namibie et au Botswana. C’est dans ce dernier pays qu’ils sont particulièrement persécutés. La plupart d’entre eux ont été chassés de leurs terres ancestrales.
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Leur calvaire débute en 1997. Les Bushmen sont brutalement expulsés de leurs terres ancestrales du Kalahari, au cœur du Botswana. Cette réserve naturelle de gibier avait pourtant été créée pour protéger leur territoire ainsi que les animaux sauvages dont ils dépendent.
Leurs huttes sont démantelées. Ceux qui sont surpris en train de chasser pour nourrir leurs familles sont arrêtés, battus et torturés.
«Le gouvernement botswanais a interdit la chasse au niveau national en 2014. Ce qui a rendu la vie des Bushmen pratiquement impossible. Ils risquent d’être arrêtés, frappés et torturés par la police paramilitaire qui les accuse de braconnage.Tandis que les chasseurs de trophées sont privilégiés», s’indigne Survival International, une ONG britannique qui défend les droits des peuples indigènes.
Les Bushmen du Kalahari sont confinés dans les camps de relocalisation du gouvernement et deviennent dépendants des rations alimentaires distribuées par les autorités.
D’importants gisements de diamants
Les expulsions forcées se sont déroulées en trois vagues. En 1997, en 2002 et en 2005. Pour se justifier, le gouvernement du Botswana avait affirmé que le mode de vie d’agriculteurs sédentaires des Bushmen, autrefois fondé sur la cueillette et la chasse à l’arc, était devenu incompatible avec la protection de la vie sauvage dans la réserve.
Mais pour les ONG, les diamants du Kalahari ont tout simplement eu raison de ce peuple de chasseurs-cueilleurs.
«C’est la vérité», explique Stephen Khory, directeur de Survival International. Et de préciser que la réserve se situe au cœur de la région la plus riche en diamants au monde : «Bien que le gouvernement soutienne que le diamant n’a rien à voir avec les expulsions, il n’en reste pas moins que des gisements sont actuellement exploités en territoire bushman. Et les gens n’achèteront tout simplement pas ces diamants lorsqu’ils sauront ce qui est arrivé aux Bushmen», martèle-t-il.
L’avocat des Bushmen interdit d’entrée au Botswana
Depuis 2013, l’avocat britannique des Bushmen, Gordon Bennet, est frappé d’interdiction d’entrée au Botswana. C’est lui qui les avait représentés lors du procès historique que les Bushmen ont intenté au gouvernement pour dénoncer l’illégalité de leur expulsion. Un procès financé grâce au soutien de Survival International.
«Ce procès a été le plus long et le plus coûteux de toute l’histoire du Botswana», témoigne l’organisation de défense des peuples indigènes. Les Bushmen apprirent qu’ils l’avaient remporté le 13 décembre 2006. Les juges décrétèrent que l’éviction des Bushmen avait été «illégale et anticonstitutionnelle» et qu’ils avaient de ce fait le droit de retourner librement sur leur territoire ancestral.
La cour conclut également que les Bushmen avaient le droit de pratiquer librement la chasse et la cueillette dans la réserve et qu’ils n’avaient pas à demander d’autorisation pour y entrer.
Nouvelle victoire judiciaire en janvier 2011. La cour la plus puissante du Botswana a reconnu aux Bushmen le droit d’accéder à l’eau au sein de la réserve du Kalahari. L’une des mesures mises en place par le gouvernement pour empêcher les Bushmen de retourner sur leur territoire a été de les priver de leur source d’eau.
«Une politique digne de l’apartheid»
L’histoire aurait pu s’arrêter là, explique Survival International, mais le Botswana continue de persécuter impitoyablement et sans relâche ses premiers habitants afin de les chasser de leurs terres : «Aujourd’hui, le gouvernement affirme que seul un petit nombre de Bushmen nommés dans des documents de justice ont le droit de rentrer chez eux», dénonce l’ONG britannique qui décrit un système comparable aux lois de «laissez-passer» en vigueur à l'époque de l’apartheid en Afrique du Sud: «Le gouvernement force maintenant les enfants et proches des personnes vivant dans la réserve à demander un permis pour leur rendre visite, faute de quoi ils encourent sept ans de prison», affirme l’ONG britannique.
Survival appelle à un boycott international du tourisme au Botswana, tant que le gouvernement ne garantira pas les droits des Bushmen.
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