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Les 100 jours de Samba-Penza ou l’espoir déçu en Centrafrique

C’est le 20 janvier 2014 que Catherine Samba-Panza a accédé à la présidence de la République de Centrafrique. Elle succédait à Michel Djotodia, homme-lige de la Séléka, contraint par ses pairs des Etats voisins de quitter le pouvoir. Les 100 jours de la présidente n’ont malheureusement pas ramené le calme.
Article rédigé par Jacques Deveaux
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 4min
La présidente par intérim de la Centrafrique, Catherine Samba-Penza (AFP)

A l’époque, l’élection d’une femme semblait être un bon présage. Qui plus est, la maire de Bangui arrivait avec une réputation de neutralité et de rigueur.
Elle a bien tenté quelques opérations de réconciliation. Essayé de conduire les deux camps vers la paix. Mais son influence n’a pas pesé bien lourd. Et faute d’avoir son armée et sa police (du moins des hommes équipés et commandés), elle a été contrainte de laisser Sangaris et la Misca s’occuper de sécurisation.
Aussi, dire que le bilan de ces 100 jours de présidence est mauvais est un euphémisme.

Vives critiques de la presse
D'ailleurs, la presse locale est féroce. «En 100 jours au pouvoir, l’état de grâce, passé plus qu’inaperçu, est fini. Et de grâce, nous n’aurons vu que les couleurs de ses beaux tailleurs.» Le propos est définitif. Il émane du journal La nouvelle Centrafrique. Un éditorial au vitriol
RFI n’est guère plus tendre. Principal échec selon la radio, «l'incapacité des forces internationales et des autorités de transition à stopper les violences contre les musulmans». C’est vrai que la seule trouvaille pour faire cesser les violences, a été d’organiser l’exode des musulmans.
 
Ce fut le cas à Boda et à Bangui. Selon le site DW, 90% des musulmans ont quitté Bangui, soit entre 60 et 80 000 personnes.
Un exode qui n’a fait que déplacer le problème, selon Guinée Conakry info. La Séléka semble renaître de ses cendres, et transformer le nord-ouest du pays en coupe-gorge. Quatre jours de combats à Mala, au nord de la capitale, ont fait 28 morts, dont six miliciens de la Séléka.
 
Déplacement des violences
Autre inquiétude, l’hôpital de Boguilla a été attaqué et trois employés de Médecins sans frontière ont été tués. On ne connaît pas l’identité des assaillants. Mais l'ONG a préféré fermer l’hôpital, «consternée par le fait que le gouvernement de transition n’ait pas largement et fermement condamné le massacre de Boguila, ainsi que toutes les violences similaires ayant eu lieu sur l'ensemble du pays.»
 
Enfin lundi 5 mai, les soldats français ont été attaqués dans ce même secteur. Une colonne lourdement armée selon le porte-parole de l’armée. Il a fallu l’intervention de l’aviation depuis N’Djamena pour en venir à bout.
  
Rétablir les services publics
Le 2 mai dernier, le Premier ministre André Nzapayéké a présenté la feuille de route de son gouvernement aux membres de la société civile ainsi qu’aux syndicats. La restauration de la sécurité et la paix sur l’ensemble du pays, l’assistance humanitaire, l’élaboration d’une nouvelle constitution en vue des prochaines élections et la relance économique sont les principaux axes de cette feuille de route. Un programme dont le coût est estimé à 220 milliards de francs CFA (300 millions d’euros).

Après trois mois de présidence, Catherine Samba-Panza n’a pas pu rétablir un minimum de service public dans le pays. Le problème essentiel reste la sécurité de la population. Ainsi le 29 avril, à l’ouverture de l’année judiciaire, elle a dit attendre le redéploiement de la justice dans l’intérieur du pays. 
A cette occasion, le premier avocat général de la cour de cassation, Sylvestre Otto, a dressé un bilan catastrophique de l’état de la justice dans le pays. «Les institutions judiciaires ont été la cible des attaques des rebelles de la coalition Séléka. Cette situation s’est traduite par l’exode forcée des acteurs judiciaires de toutes les juridictions de provinces sur Bangui.» 20 tribunaux sur 24, deux cours d’appel sur trois ne fonctionnent plus.

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