: Reportage "Sœur Emmanuelle a tout changé" : 15 ans après sa mort, l’héritage de la religieuse perdure en Égypte
Ceux qui l’ont connu se souviennent de cette petite femme au regard vif et à la voix aiguë. Pour retrouver la trace de Sœur Emmanuelle au Caire il suffit de se rendre dans le quartier de Mokattam, le quartier des chiffonniers, une ville dans la ville, qui abrite près de 100 000 personnes. Et si vous tendez bien l’oreille vous pourrez peut-être même l’entendre…
Romani Badir ne peut en effet s’empêcher de l’imiter. Aujourd’hui, il a les cheveux gris et l’âge de la retraite mais pourtant il continue de travailler car il n’a jamais oublié que Sœur Emmanuelle a donné sa vie pour que lui et les siens soient libres et fiers. "La première construction de Mokattam, c’était du temps de Sœur Emmanuelle en 1984-1985, raconte-t-il. C’était juste une chambre pour chaque famille. Sans Sœur Emmanuelle, tout cela n’existerait pas".
C’est ainsi que Mokattam s’est construit. La décharge à ciel ouvert est devenue un quartier avec des immeubles, des rues, des écoles… La misère a laissé la place à la pauvreté et Melad Mounir Zekri chiffonnier sait en tout cas à qui il doit cela. "Soeur Emmanuelle a tout changé. Elle a changé la vie de tout le quartier."
"On était dans un bidonville et elle a développé tout un quartier. Elle nous a aussi appris l’importance de l’éducation et l’importance d’envoyer les enfants à l’école."
Melad Mounir Zekri, chiffonnier au Caireà franceinfo
C’est alors qu’intervient une personne pas comme les autres, qui raconte son premier échange avec Sœur Emmanuelle. Il s’agit de Sœur Sarah Ayoub Gattaz qui peut raconter à l’infini cette journée de 1976 où elle a rencontré, pour ne plus jamais la quitter, Sœur Emmanuelle. Ensemble, elles ont affronté la pauvreté mais surtout changé à jamais la vie de ces milliers d’enfants du Caire. "Un travail de 20 ans, se souvient la sœur. Nous avons construit des écoles", s’enorgueillit la religieuse.
"Plus une fille ne se marie ici avant l’âge de 22 ou 23 ans maintenant. Elles poursuivent des études et certaines deviennent médecin, pharmacienne ou encore professeur."
Sœur Sarah Ayoub Gattaz, comparse de Sœur Emmanuelleà franceinfo
Dans le quartier populaire d’El Marg, l’association de Soeur Emmanuelle, Asmae, reste bien présente, quinze ans après sa disparition. Dans la salle des enfants, filles et garçons participent à un atelier sur le respect de l’autre. On les retrouve aussi dans l’une des 17 écoles communautaires ou encore dans d’autres associations destinées aux enfants handicapés que soutient Asmae. "Après la mort de Sœur Emmanuelle, Asmae a commencé à travailler sur l’héritage de ses enseignements en Égypte mais l’association s’est aussi structurée avec la mise en place de stratégies et nous avons élargi son action à d’autres secteurs, explique sa responsable égyptienne Nashwa Fayek. C’est ainsi que nous avons grandi et nous avons maintenant les autorisations pour intervenir dans les 27 régions du pays pour aider encore plus d’enfants."
"Je crois que Sœur Emmanuelle serait fière, contente de ce que nous réalisons et du fait que nous poursuivions son action en Égypte."
Nashwa Fayekà franceinfo
Fière de poursuivre l’action de Sœur Emmanuelle en Égypte, mais pas seulement. Asmae organise aussi des actions d’urgence dans huit pays, comme celle qui va se mettre en place pour les enfants réfugiés soudanais. "Aujourd’hui, on est réactif à des situations d’urgence comme, par exemple, à Assouan où il y a un afflux important de personnes réfugiés du Soudan notamment des femmes et des enfants, qui ont vécu un parcourt de migration traumatique et qui arrivent à Assouan avec des besoins importants en terme d’appui psychologique et social", évoque Adrien Sallez, directeur général d’Asmae.
L’association, qui fonctionne à 50% avec des dons privés, aide ainsi pas moins de 40 000 enfants tous les ans, y compris en France.
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