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Famine en Afrique : "Il faut mettre en place des distributions massives et urgentes de nourriture"

L'ONU a lancé, le 22 février, un appel aux dons pour lutter contre la famine qui touche la Corne de l'Afrique. Elle espère récolter 4,4 milliards de dollars pour éviter un désastre humanitaire. franceinfo fait le point sur la situation avec Pierre Mendiharat, directeur adjoint des opérations de Médecins sans frontières.

Article rédigé par franceinfo, Julien Moch
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Un médecin examine un enfant de 3 ans qui souffre de malnutrition, au Soudan du Sud, le 11 octobre 2016. (ALBERT GONZALEZ FARRAN / AFP)

Antonio Gutteres, le Secrétaire général des Nations-Unies, a lancé un appel aux dons le 22 février, pour lutter contre la famine qui sévit au Nigeria, en Somalie, au Soudan du Sud et au Yémen. Plus de 20 millions de personnes souffrent de sous-nutrition et de malnutrition, causées en grande partie par les conflits qui sévissent dans ces quatre pays. L'ONU espère récolter 4,4 milliards de dollars en urgence pour les aider. Pierre Mendiharat, directeur adjoint des opérations à Médecins sans frontières dresse, lui aussi, un constat alarmant, mercredi 23 février sur franceinfo.

franceinfo : Quelle est la situation sur le terrain ?

Pierre Mendiharat : Au Soudan du Sud, en particulier, le conflit s'est étendu depuis le mois de juillet sur l'ensemble du territoire et surtout dans des zones qui étaient auparavant épargnées par cette guerre. Ils s'agit des régions du sud de l'équateur, les régions d'approvisionnement depuis le Kenya et l'Ouganda. Il y a une intensification des combats aussi dans le nord, un peu partout. C'est une guerre qui dure depuis trois ans.

Comment Médecins sans frontières intervient sur place ?

Toujours au Soudan du Sud, par exemple, il y a une population nombreuse et répartie à travers un pays gigantesque, avec des infrastructures catastrophiques. Il y a ce conflit très dispersé avec beaucoup de milices, qui n'ont pas de commandement central. Et le gouvernement a une tradition de guerre qui remonte à plusieurs dizaines d'années, avec des niveaux de violences très élevés, c'est donc très compliqué. Par exemple, dans la région de l'Unity State [un État du sud du Soudan], où la famine a été déclarée récemment, l'hôpital, soutenu par MSF, a été attaqué et pillé trois fois ces deux dernières années. Finalement, on s'est rabattus sur des modes d'interventions moins importants, mais moins efficaces aussi. Des unités mobiles suivent les populations qui se déplacent pour fuir les combats.

Quelle est l'urgence absolue aujourd'hui ?

Les quatre pays concernés sont tous en guerre. Des guerres qui provoquent un effondrement du système économique, du système sanitaire, de la production agricole et une inflation. C'est tout ça qui fait la famine, donc il n'y a pas UNE solution. Il faut déjà mettre en place des distributions massives et urgentes de nourriture. Mais dans beaucoup de pays, il y a des zones inaccessibles et c'est là que la famine pourrait être la plus importante. Un simple cessez-le-feu améliorerait la situation pour les populations. Malheureusement, actuellement, il n'y a aucune négociations entre les parties en conflit dans ces quatre pays.

En 1985, la grande famine en Éthiopie avait donné lieu à une grande mobilisation à travers le monde. Est-ce qu'il ne manque pas la même prise de conscience aujourd'hui ?

En 1985, ce n'est pas ce grand mouvement à travers le monde qui a contribué directement à arrêter la famine. Les conditions politiques doivent être aussi réunies. Je ne pense pas que ce soit une mobilisation dans les pays occidentaux qui va amener les parties en conflit à conclure un accord de paix. En l'absence d'un règlement politique ou d'un cessez-le-feu, ça ne risque pas de s'améliorer. Évidemment une aide humanitaire accessible et financée convenablement, c'est l'autre priorité.

"Il faut mettre en place des distributions massives et urgentes de nourriture." Pierre Mendiharat, directeur adjoint des opérations de Médecins sans frontières.

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