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Athlétisme : les Kényans dopés à l'or
En Chine, lors des Mondiaux d'athlétisme, les Kényans sont devenus les dieux du stade avec leurs 16 médailles, dont 7 en or, au moment où plusieurs athlètes sont épinglés pour dopage.
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Les Championnats du monde, qui se sont achevés le 30 août 2015 en Chine, ont vu le sacre du Kenya au tableau des médailles. Pour la première fois de son histoire et de celle du continent, un pays africain arrive au sommet et détrône les Etats-Unis. Les Américains finissent à la troisième place, derrière les Jamaïcains menés par Usain Bolt, désormais triple champion du monde du 100m. Les Kényans ont raflé au total 16 médailles dont 7 en or.
Outre les récompenses dans leurs domaines de prédilection – fond et demi-fond –, le Kényan Julius Yego a décroché l’or dans l’épreuve du javelot quand son compatriote Nicholas Bett s’imposait sur le 400 m haies. Cette consécration intervient alors que l’ombre du dopage plane sur l’athlétisme kényan. Deux athlètes, Koki Manunga et Joyce Zakary, ont d’ailleurs été contrôlées positives et par conséquent provisoirement suspendues lors des mondiaux de Pékin.
Des preuves irréfutables
Quelques semaines avant le rendez-vous chinois, la chaîne de télévision allemande ARD et le quotidien britannique Sunday Times, s’appuyant sur un fichier tenu secret par la Fédération internationale d’athlétisme (IAAF), avaient révélé que beaucoup d’athlètes russes et kényans devaient leurs bonnes performances au dopage. Ainsi, rapporte L’Equipe, «la Russie a remporté plus de 80% des médailles grâce à des athlètes (suspectés de dopage), alors que le Kenya a gagné 18 médailles de cette manière». Ces conclusions s’appuient sur 12 000 tests sanguins réalisés sur 5000 athlètes entre 2001 et 2012.
Ce n’est pas la première fois que l'ARD épingle les pratiques de dopage chez les athlètes kényans. Un documentaire diffusé en 2012 en faisait déjà état. Les autorités kényanes avaient alors réfuté en bloc ces accusations. En janvier 2015, la suspension de la marathonienne Rita Jeptoo, contrôlée positif à l'EPO, avait de nouveau jeté un voile sur les performances des Kényans.
Pour Lamine Diack, le président sortant de l’IAAF, «on veut diaboliser le Kenya». Un pays, soulignait-il sur les ondes de RFI, qui «gagnait des médailles avant qu’il sache ce que pouvait exactement être le dopage». Il a par ailleurs relevé la suspicion qui a entouré les Kényans dès le début des championnats du monde.
Donner les moyens au Kenya de lutter contre le dopage
Ce pays, selon Lamine Diack, fait face à un problème ponctuel qu’il tente de résoudre avec l'aide de ses partenaires. Il plaide notamment pour la création d’une agence nationale de lutte contre le dopage. «Le Kenya n'a pas les moyens de faire tout ce qu'il faut pour lutter contre le dopage, je le clame depuis des années.(…) Il faut leur créer la possibilité d'avoir une agence nationale de lutte antidopage, comme cela existe dans beaucoup de pays».
Il est vrai que le phénomène semble nouveau au Kenya. «Je pense que cela date d’environ cinq ans. Ce n’est pas très ancien. Vous savez aussi, à mesure que le nombre d’athlètes a augmenté, de plus en plus d’athlètes se sont tournés (vers) la course sur route (désigne un ensemble de disciplines de l'athlétisme qui comprend, entre autres, le marathon ou le semi-marathon). Je pense que les tricheries ont débuté après les JO de 2008. Cela ne serait jamais arrivé avant. Je ne sais pas pourquoi c’est apparu. (Y a-t-il) un problème avec le Wada, notre agence anti-dopage (à l’état embryonnaire, NDLR)?», a déclaré Benjamin Limo, l’ancien champion du monde de 5000 et de cross, au magazine SPE15.
A l’instar de Benjamin Limo, beaucoup d’athlètes kényans remettent en cause les instances dirigeantes de l’athlétisme dont le laxisme n’aiderait pas à lutter efficacement contre le dopage.
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