Cet article date de plus de cinq ans.

Tunisie: la mystérieuse mission du pilote libyen qui a posé son L-39 en catastrophe à Medenine

Désertion du pilote, patrouille de reconnaissance ou mission de combat ? Le mystère demeure quant aux véritables motivations de l’avion de chasse libyen, qui a atterri sur une route en Tunisie.

Article rédigé par Alain Chémali
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
L'avion de guerre libyen, L-39 Albatros, appartenant aux forces de Khalifa Haftar, l'homme fort de Cyrénaïque, après son atterrissage d'urgence dans la ville de Médenine, dans le sud-est tunisien le 22 juillet 2019. (FATHI NASRI / AFP)

Lundi 22 juillet 2019, un avion de chasse libyen de type L-39 est entré de manière impromptue dans l’espace aérien tunisien et a procédé à un atterrissage de fortune sur une route bitumée dans la région de Médenine, à une centaine de kilomètres de la frontière libyenne.

"Nous avons vu deux avions voler aux alentours de 7h15 ce matin", a indiqué à l’AFP l'un des habitants qui s’étaient rassemblés autour de l’appareil, "et puis l'un d'eux s'est posé ici", a-t-il ajouté.

Des sources proches de l’Armée nationale libyenne (ANL), citées par RFI, avaient aussitôt affirmé que l'avion et son pilote appartenaient au Gouvernement d’accord nationale (GNA) basé à Tripoli.

Selon elles, l’avion, qui a dû atterrir en urgence, était parti de la base située dans l'académie d'aviation militaire à Misrata. Les mêmes sources ont affirmé que le pilote avait fait défection.

Une mission de reconnaissance interrompue par une panne 

Après un moment de flottement, un communiqué officiel du ministère libyen des Affaires étrangères du gouvernement de transition de l’Est confirmait que l’avion de chasse appartenait bien aux forces de l’autoproclamée Armée Nationale Libyenne du maréchal Haftar, l’homme fort de Cyrénaïque.

(Le communiqué du ministère des Affaires étrangères du gouvernement libyen de transition posté sur twitter)

L’appareil "était en mission de reconnaissance et de patrouille, quand il a été frappé d’une panne technique qui l’a contraint d’atterrir dans la région de Beni Ghezaiel", indiquait le communiqué.

Le ministère a ajouté être en contact permanent avec les autorités tunisiennes pour assurer le retour du pilote sain et sauf et de l’avion sur le territoire national.

De son côté, le Gouvernement d’accord national (GNA) de Fayez el Sarraj, basé à Tripoli, reconnu par l’ONU et en butte depuis le 4 avril à une offensive de l’ANL, a lui aussi confirmé que le L-39 appartenait aux forces de son rival Haftar.

Des informations contradictoires sur le pilote et ses objectifs

Des informations contredites pourtant par le ministre tunisien de la Défense. "Selon les premiers éléments, il n’y avait à bord qu’une seule personne, un colonel loyaliste au GNA", a affirmé Abdelkrim Zoubeidi cité par TunisBondy, et "il n’avait aucune intention de nuire à la Tunisie ou d’attenter à sa sécurité".

Toujours selon le ministre, le pilote a été contraint d’atterrir par manque de kérosène. Il est possible, a-t-il dit, "qu’il ait fuit la Libye, parce qu’il se sentait menacé", révélant, lui, que l’avion avait décollé de l’aéroport de Watiya, situé à 70 kilomètres de la frontière tunisienne.

Des éléments démentis à leur tour par le site Tunisnumérique. Selon la correspondante de cette publication à Médenine, l’avion était piloté par un colonel de l’armée libyenne et son copilote. Les deux ont été remis aux unités de la garde nationale de la région.

Les équipes spéciales du génie militaire se sont affairées sur le champ à désarmer et désactiver les missiles que l’avion portait sous ses ailes, a encore indiqué le site.

"Il s’est avéré, écrit Tunisnumérique, que l’avion portait quatre missiles armés, ce qui confirme que l’avion était en mission de combat, quand il a eu une panne de ses instruments de navigation".

Une mésaventure rocambolesque

Fabriqué en Tchécoslovaquie et destiné à former des pilotes, le L-39 a en effet été développé en Libye pour pouvoir transporter des missiles et mener des frappes.

Cette mésaventure rocambolesque de l’appareil intervient en tout cas en pleine relance de l’offensive du maréchal Haftar contre la capitale. Une offensive demeurée jusque là sans résultat.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.