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Séisme au Maroc : le pays face au défi de la reconstruction

Une semaine après le terrible tremblement de terre qui a fait près de 3 000 morts, le Maroc doit se reconstruire. Quelque 300 000 sinistrés sont en attente de relogement, selon l'Unicef.
Article rédigé par Sandrine Etoa-Andegue
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Une enfant marocaine au pied de la tente qui lui sert de toit depuis le séisme, dans le village de Tafeghaghte, au sud-ouest de la capitale Marrakesh. (FADEL SENNA / AFP)

La question du relogement se pose désormais au Maroc, une semaine après le terrible tremblement de terre qui a fait 2 946 morts et 5 674 blessés, selon le dernier bilan officiel. L'Unicef dénombre 300 000 Marocains sans-abri, dont 100 000 enfants. Un grand chantier de reconstruction se prépare dans le pays, notamment à Marrakech et dans la région d'Al Haouz, l'épicentre du séisme.

Un chiffre permet de mesurer l'ampleur des dégâts : 50 000 bâtiments ont été complètement ou partiellement détruits par ce puissant séisme selon le cabinet royal. Certains tiennent à peine debout. Parmi ces bâtiments, 500 écoles sont à reconstruire. 

Sécuriser les bâtiments endommagés

Dans ces quartiers endommagés, les jeux des enfants se mêlent aux grondements des pelleteuses. Des cernes comme des soucoupes sous les yeux, Taoufik s'est posé quelques minutes sur l'une des chenilles de son engin. La semaine de cet ouvrier originaire du nord du pays a été particulièrement éprouvante : "Je suis très fatigué. Pendant cinq jours, j'ai aidé à déterrer des cadavres, des enfants parfois. Ça fait tellement de peine. J'ai aussi fait en sorte que des familles puissent rentrer dans leur maison pour récupérer des papiers ou des biens précieux. Je ressens à la fois une grande détresse et une grande fierté."

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En fin de semaine, sa nouvelle mission a été de démolir les maisons défigurées, déracinées et potentiellement dangereuses. Certains habitants installés dans des camps continuent d'y faire de brefs aller-retour pour récupérer des affaires. "C'est du cas par cas... Les maisons qui sont très endommagées et donc complètement inhabitables, nous devons les détruire au plus vite pour stopper ces allers-retours dangereux, explique Taoufik. Les autres qui sont abîmées mais tiennent encore seront réhabilitées, selon les dernières instructions des autorités."

D'après le cabinet royal, 140 000 dirhams (environ 12 800 euros) vont être alloués aux "logements totalement effondrés" et 80 000 dirhams (environ 7 300 euros) seront dédiés à la réhabilitation d'habitations partiellement endommagées.

Le deuil sous les tentes

Pour certains, les conséquences du séisme représentent une double violence. D'un côté il y a la douleur infinie d'avoir perdu leurs proches, de l'autre la douleur de n'avoir plus rien, plus de maison et plus de ressources. C'est une vie dans une grande précarité qui se profile pour eux dans les prochaines semaines, voire mois, dans la rue ou sous une tente dans le froid et la promiscuité.

Khadijia et son petit-fils Lahcen dans leur tente à Ouirgane (Maroc), septembre 2023 (SANDRINE ETOA ANDEGUE / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

La tente où Lahcen vit avec sa grand-mère, allongée et pensive sur une natte, est en toile cirée blanche. C'est un don du royaume du Koweït. Elle est posée en bord de route, à quelques mètres de leur maison construite de façon traditionnelle, en utilisant un mélange de pierre et de terre, qui sera bientôt démolie. La grand-mère y est née, sa fille et sa petite-fille y sont mortes dans les décombres : "Reconstruire avec les nouveaux matériaux ou les anciens peu m'importe, moi ce qui me préoccupe c'est l'avenir de mes deux petites-filles orphelines."

"Si l'État ne nous garantit pas des constructions aux normes antisismiques, on ne partira pas de notre tente."

Lahcen, rescapé du séisme

à franceinfo

Bien que la question du bâti ne soit pas non plus la première préoccupation de Lahcen, il ne veut pas revivre un tel épisode : "Je préfère qu'on reconstruise mais pas avec de la terre cuite, avec des matériaux modernes, avec des normes antisismiques. Si l'État ne nous le garantit pas, nous on ne partira pas de notre tente." L'État marocain va octroyer une aide d'urgence d'environ 2 750 euros aux ménages concernés par la catastrophe.

Mêler "tradition" et "sécurité"

Une grande réflexion est menée notamment par les architectes : 300  bénévoles se sont portés volontaires dans le pays. Ils sont urbanistes, ingénieurs, sociologues, membres de la société civile. Ils se constituent en commissions mixtes et ont des réunions quotidiennes depuis une semaine. Le défi qui s'impose pour eux est de devoir trouver un équilibre entre traditions, topographie des terrains et sécurité, explique Jawad El Oussri, président du conseil régional de l'ordre des architectes de Marrakech-Safi : "Ces villages ont été construits avec des matériaux locaux, c'est un patrimoine extraordinaire. Le futur modèle urbanistique et architectural de ces villages doit être débattu. Il faut que l'on retrouve encore cet aspect vernaculaire, cette adaptation à la nature."

"Il n'est pas question de bétonner la montagne. Nous avons des modèles de construction en terre qui sont parasismiques."

Jawad El Oussri

à franceinfo

L'architecte prévient aussi qu'il y aura des zones où il sera interdit de construire et des villages déplacés. Après le séisme à Agadir en 1960, qui avait fait 12 000 morts, la ville rasée avait été reconstruite plus au sud.

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