Cet article date de plus de huit ans.

Islamisme : l’ambiguïté mauritanienne

Depuis 2011, aucun attentat n’a frappé le sol mauritanien. Pourtant, l’islam radical tente de se renforcer dans le pays comme dans ceux de la région sahélienne. Trafiquants et mouvements terroristes profitent d’une frontière poreuse, impossible à contrôler. Assurer la sécurité dans ce contexte est un argument pour le pouvoir qui a reçu, le 25 juillet 2016, le sommet de la Ligue arabe.
Article rédigé par Marc Taubert
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Des membres de la Garde nationale mauritanienne se reposent dans une zone désertique près de Bassikounou en Mauritanie, le 22 mai 2012. (REUTERS / Joe Penney)

Jusqu’ici, tout va bien. C’est ce que peuvent se dirent les autorités mauritaniennes face à l’absence d’attaques terroristes sur leur territoire. Beaucoup d'Etats frontaliers aimeraient pouvoir en dire autant, comme le Mali, avec qui la Mauritannie partage plus de 2 000 km de frontières.

Si la situation est aujourd'hui calme, ce ne fut pas toujours le cas. A la fin des années 2000, le pays était touché par de nombreux attentats. En 2007, quatre touristes français ont ainsi été assassinés par al Quaida au Maghreb islamique (Aqmi) mettant fin aux ambitions touristiques des dirigeants sur leur territoire.

Acheter la paix
La recette mauritanienne est avant tout sécuritaire. Depuis deux ans, le budget de l’armée a augmenté, et pourrait doubler pour atteindre les 20 millions d’euros. Dans le même temps, les forces mauritaniennes sont renforcées par une présence française dans le nord du pays, dans le cadre de l'opération Barkhane.

Pour autant, le président mauritanien, Mohamed Ould Abdel Aziz, serait prêt à des accords moins avouables pour sauvegarder la paix. Selon l’agence de presse Reuters, le pays aurait tenté de conclure un pacte de non-agression en 2010 avec Aqmi. De l'argent aurait été versé et des prisonniers auraient été libérés.

Des femmes passent devant une affiche du président Mohamed Ould Abdel Aziz à Nouakchott, le 18 juin 2014. (REUTERS / Joe Penney)

Un accord que conteste l’ancien numéro 3 d’al Quaida et conseiller de Ben Laden, lui même mauritanien, qui vit désormais à Nouakchott. Interrogé par Le Figaro, Mahfoudh Ould Waled pense que la Mauritanie est protégée car elle n’est pas intervenue dans la guerre au Mali en 2012.

Pas directement du moins. Selon les autorités maliennes, la Mauritanie soutiendrait les groupes indépendantistes touaregs comme l’Azawad ou le MNLA, groupes qui furent alliés à d’autres djihadistes au début du conflit.

Des liens avec les terroristes seraient également entretenus via certaines agences de presses mauritaniennes comme l'Agence Nouakchott d'Informations (ANI) ou l'agence Al-Akhbar, toutes deux privées. Elles reçoivent en effet régulièrement des revendications d'attentats perpétrés par des organisations terroristes sahéliennes. Cité par le Huffingtonpost.fr, Ulysse Gosset, spécialiste des relations internationales, affirme à propos de l'ANI que «cette agence est l'un des canaux habituels, un des relais d'influence des islamistes, et d'Aqmi en particulier».

Une radio contre les terroristes
D’autres mesures ont été prises par les autorités mauritaniennes pour contrer l’avancée idéologique des islamistes radicaux. Entre autre, l'organisation d'un Grand concours de récitation du Coran pour «réconcilier le citoyen avec le vrai islam», la tenue de débats entre imams et terroristes ou la création de Radio Coran, censée porter la voix d’un islam modéré.

Autre grand projet : l’instauration d’un «programme de déradicalisation». Une soixantaine de djihadistes repentis en sont sortis. Et selon les autorités, seul l'un d'entre eux serait reparti faire le djihad.

Des militants du groupe terroriste Ansar Dine actifs dans le Sahel, le 16 juin 2012. (REUTERS / Adama Diarra)

La sécurité, jusqu’à quand ?
Pour l’instant, la France entretient une force de 3 500 soldats dans le Sahel dans le cadre de l’opération Barkhane. Une force qui, en principe, n’est pas destinée à rester à long terme. Or si elle devait partir, les pays du « G5 » sahélien (Burkina Faso, Mali, Mauritanie, Niger et Tchad) risquent de se trouver bien démunis face à des mouvements qu’ils n’arrivent pas à éradiquer.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.