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Chrétiens persécutés en Afrique: les convertis risquent la mort à tout moment

Avec la Corée du Nord, deux pays africains, la Somalie et le Soudan figurent en bonne place du classement de l’Index mondial de persécution des chrétiens rendu public le 11 Janvier. Mais si le nombre des victimes a baissé jusqu’à six fois en 2016, c’est surtout grâce au fait que le groupe Boko Haram est sur la défensive au Nigeria, explique à Géopolis Michel Varton de l'ONG Portes Ouvertes.
Article rédigé par Martin Mateso
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Messe à l'église orthodoxe copte Saint Simon le Tanner, le 6 janvier 2016 au Caire, pour la célébration de l'anniversaire du baptême et de la naissance du Christ. (Photo AFP/Anadolu Agence)

Si les chrétiens assassinés ont été moins nombreux dans le monde en 2016, qui affiche un bilan de 948 tués contre 5747 en 2015, c’est largement dû à ce qui se passe dans deux pays africains, le Kenya et le Nigeria.
 
Le directeur de l’ONG Portes Ouvertes/France Michel Varton explique à Géopolis que le recul du groupe djihadiste Boko Haram, aujourd'hui sur la défensive face à l’armée nigériane, a été bénéfique pour les chrétiens du pays. Il y a eu moins d’exactions et donc moins de morts. 600 victimes en 2016. C’est six fois moins qu’en 2015.
 
«Le problème, c’est que Boko Haram n’est pas le seul persécuteur des églises. Il y a un deuxième phénomène au Nigeria. Il s’agit des groupes peuls nomades, les Foulanis. Ils estiment que les terres qui appartiennent aux chrétiens leur reviennent et qu’ils ont le droit de les prendre. Les chrétiens sont chassés de chez eux et malheureusement toujours tués. 600 personnes tuées pour leur foi au Nigeria l’année dernière.» 

Au Kenya, les assassinats ont tous eu lieu dans des régions à majorité musulmane où le groupe al-shebab, venu de Somalie, entend éliminer toute présence chrétienne. Le 2 avril 2015, des islamistes shebabs équipés d’explosifs et d’armes à feu avaient pris d’assaut le campus universitaire de Garissa, à près de 200 km de la frontière somalienne, tuant de nombreux étudiants. Ils avaient épargné les musulmans.
 
Des populations de plus en plus radicalisées
Il y a eu moins de persécutions violentes en 2016, constate Michel Varton. Mais il relève que l’oppression au quotidien a gagné du terrain. Là où les mouvements extrémistes violents passent, la population finit par se radicaliser, explique-t-il.
 
«C’est la pression de la société. C’est ce qu’on vit tous les jours. C’est la discrimination, c’est l’exclusion. C’est par exemple dans un village africain le fait d’interdire aux chrétiens d’avoir accès aux puits pour avoir de l’eau. Ou de payer plus cher les semences. Des pressions sur des gens qui décident de devenir chrétiens. Ces conversions ne sont pas acceptées y compris au sein de la famille. Une jeune femme qui se convertit sera mariée de force à un musulman pour qu’elle reste sous l’égide de l’islam. Ce sont des choses moins visibles.» 
 
Michel Varton raconte à Géopolis l’histoire d’une jeune femme égyptienne qui voulait devenir chrétienne. Elle avait commencé à fréquenter une église avant de disparaître subitement.
 
«Son pasteur s’est rendu dans son quartier et a posé des questions aux habitants pour savoir ce qu’elle était devenue. Vous parlez de la jeune femme qui est tombée de sa fenêtre?», lui demandent les habitants. Il a aussitôt compris ce qui s’était passé. «Cette femme qui voulait changer de religion et devenir chrétienne a été victime soi-disant d’un accident. En fait, la communauté s’est débarrassée d’elle», soupire-t-il.
 
Le 11 décembre 2016, l’attaque contre une église copte au Caire avait provoqué la colère de la minorité chrétienne du pays. 25 personnes avaient trouvé la mort alors que plusieurs centaines de paroissiens coptes célébraient la messe. Le président égyptien avait vivement condamné cet acte.
 
«Le président Sissi a voulu s’identifier avec l’église. Il assiste à des messes. Pour la première fois, on voit un chef d’Etat égyptien qui reconnaît publiquement l’existence d’une église. Le problème, c’est que la persécution continue au niveau des villages, à la campagne où les chrétiens sont persécutés.»

Les chrétiens, grands perdants de la montée de l'islam radical 
Comme partout dans le monde, les chrétiens en Afrique sont les grands perdants de la montée de l’islam radical, note Michel Varton. Mais il affirme que l’église est loin de disparaître du paysage africain malgré les nombreuses persécutions dont elle est victime.
 
«La bonne nouvelle en Afrique, est que ce n’est pas une église qui est en train de se replier. L’église africaine grandit. C’est là où l’église grandit le plus vite dans le monde entier. L’Afrique est un continent où l’église grandit malgré les persécutions.»
 
Selon les chiffres du journal La Croix, le nombre de chrétiens en Afrique subsaharienne devrait dépasser le milliard d’ici 2050. Dans le même temps, le nombre de musulmans devrait augmenter plus rapidemment.

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