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Nigeria : pourquoi il faut prendre l'annonce de la libération des lycéennes avec des pincettes

La présidence du Nigeria a annoncé la conclusion d'un accord avec Boko Haram sur la libération des lycéennes otages du groupe islamiste. Mais dans ce dossier, la plus grande prudence s'impose.

Article rédigé par Louis San, Ariane Nicolas
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Un manifestant pose avec un message demandant la libération des lycéennes nigérianes enlevées par Boko Haram, à Colombo (Sri Lanka), le 9 mai 2014. (ISHARA S.KODIKARA / AFP)

Prudence, prudence. L'armée et la présidence nigérianes ont déclaré, vendredi 17 octobre, avoir conclu un accord avec le groupe islamiste armé Boko Haram qui prévoit la libération de plus de 200 lycéennes enlevées mi-avril, et un cessez-le-feu.

Dans la soirée, cette annonce a été commentée par François Hollande, qui s'est félicité un peu vite de leur libération, ces jeunes filles étant encore aux mains des ravisseurs. Le président, qui dit détenir "des informations" sur leur libération prochaine, a été contraint de corriger ses propos. Francetvinfo explique pourquoi il faut accueillir cette nouvelle avec réserve.

Parce que les fausses annonces sont nombreuses dans le conflit entre l'Etat nigérian et Boko Haram

La méfiance est fondée. Il suffit de jeter un coup d'œil dans le rétroviseur pour constater que le manque de sérieux des annonces. Par exemple, en septembre, l'armée nigériane annoncé, pour la troisième fois, la mort d'Aboubakar Shekau, le chef de Boko Haram. Sauf que le principal intéressé est apparu tout sourire dans une vidéo, le 2 octobre, pour démentir une nouvelle fois l'information.

Parce que l'interlocuteur de Boko Haram est inconnu des experts

Le premier secrétaire de la présidence, Hassan Tukur, dit avoir représenté le gouvernement nigérian lors de deux rencontres avec les insurgés islamistes au Tchad, sous la médiation du président tchadien Idriss Deby.

Hassan Tukur présente Danladi Ahmadu comme son interlocuteur au sein de Boko Haram. Mais le sérieux de ce négociateur est mis en doute par des spécialistes. "Je n'ai jamais entendu parler de ce Monsieur, et si Boko Haram voulait déclarer un cessez-le-feu, cela viendrait de leur chef, Abubakar Shekau", a estimé Shehu Sani, un spécialiste de Boko Haram qui a négocié à plusieurs reprises avec le groupe.

Parce que les services de sécurité nigérians démentent l'information

Le porte-parole des services de sécurité nigérians a affirmé, vendredi soir, qu'aucun accord n'avait encore été conclu pour la libération des lycéennes. "Cet aspect n'a pas encore abouti mais nous nous en rapprochons de plus en plus", a déclaré le responsable du Centre national d'information, Mike Omeri, contredisant ainsi la présidence du pays.

Parce que le président nigérian prépare sa campagne présidentielle

Goodluck Jonathan est censé annoncer sa candidature à sa propre succession, en février prochain. Au Nigeria, les questions de sécurité sont au cœur du débat politique, et l'annonce d'un cessez-le-feu avec Boko Haram lui permet de marquer des points.

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