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Nigeria : le président Buhari ouvre un nouveau front contre la mafia du pétrole

Selon les estimations, les vols et les détournements de pétrole brut au Nigeria représentent 4,3 milliards d’euros par an. C’est l’équivalent de 10% de la production nationale de ce pays classé premier producteur d’or noir en Afrique. Les sommes d’argent détourné se retrouvent sur des comptes bancaires individuels. Le nouveau président, Muhammadu Buhari, veut récupérer cette manne financière.
Article rédigé par Martin Mateso
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Installations pétrolières de Bonga dans la région de Lagos. (Photo Reuters/Akintunde Akinleye)

Récupérer l’argent volé du pétrole. C’est le nouveau pari du président nigérian, Muhammadu Buhari. Lequel a déclaré la guerre à la mafia du pétrole qui gangrène son pays depuis de longues années. Les sommes détournées sont parfois supérieures aux budgets annuels de certains pays africains.
 
Les vols et les détournements représentent l’équivalent de 250.000 barils de pétrole par jour. C’est plus de 4 milliards d’euros qui s’évaporent chaque année, selon Muhammadu Buhari. Ces sommes sont placées sur des comptes personnels et dans les paradis fiscaux. «Nous allons demander à ce que ces comptes soient gelés et nous allons poursuivre ces individus», a déclaré le nouveau président du Nigeria. Il compte sur la collaboration des partenaires de son pays, et notamment celle des Etats-Unis pour pister «les voleurs».
 
Dépot de pétrole à Lagos au Nigéria. 20 milliards de dollars de revenus pétroliers n'ont pas été versés au budget de l'Etat entre 2012 et 2014, selon l'ancien gouverneur de la banque centrale Sanusi Lamido. (Photo Reuters/George Esiri)

Une mafia très organisée
Selon une étude réalisée par Chatham House, l’institut britannique des relations internationales basé à Londres, «une partie de l’or noir pillé est transformé dans le pays par des apprentis raffineurs qui l’écoulent ensuite auprès de réseaux de revendeurs. Les trafiquants les plus organisés détournent le pétrole des pipelines à terre ou offshore dans le Delta du Niger.»
 
Ces vols plutôt insignifiants à la fin des années 70 ont atteint aujourd’hui un niveau industriel, note l’institut britannique. «Militaires et hommes politiques se sont engouffrés dans cette nébuleuse mafieuse où on trouve aussi des barons locaux, des avocats véreux, des banquiers corrompus, des rébellions locales et des traders internationaux». 
 
Les produits blanchis dans des centres financiers mondiaux sont utilisés pour acheter des actifs au Nigeria et à l’étranger, précise Chatham House.
 
Le président Buhari enfonce le clou en révélant que certains anciens ministres ont vendu jusqu’à un million de barils par jour. «Nous allons pister et rapatrier cet argent», a-t-il promis dans un communiqué de son porte-parole repris par l’AFP.
 
Site illégal de raffinage artisanal dans l'Etat de Bayelsa, le 27 novembre 2012. (Photo Reuters/Akintunde Akinleye)

60% de la population vit avec moins d'un euro par jour
Mettre un terme au vol de pétrole, c’est ce que réclame depuis plusieurs années le militant écologiste nigérian, Nnimmo Bassey. Il s’est illustré par le combat qu’il a mené contre la pollution pétrolière et les marées noires qui ont défiguré le Delta du Niger. «De notre point de vue, ce pays a autant de pétrole volé que de pétrole officiellement vendu sur le marché. Quand les dirigeants nous disent que nous avons encore 41 ans de pétrole devant nous, c’est tout bonnement une fiction, car si vous ignorez combien de pétrole on vous enlève, vous ignorez aussi ce qu’il vous reste», explique Nnimmo Bassey dans une interview à Afrique renouveau.
 
Du pétrole, la grande majorité des Nigérians vivant dans les zones pétrolières n’en connaissent que les méfaits : la pollution provoquée par les marées noires. 60% de la population vit encore avec moins d’un euro par jour. Ils attendent de voir les effets des promesses faites par leur tout nouveau président.
 
Muhammadu Buhari a donné le ton. Il a d’ores et déjà dissous le conseil d’administration de la compagnie pétrolière nationale et ordonné une enquête au sein de cette entreprise qui gère la manne pétrolière.

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