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Congo: les forces armées traquent le pasteur Ntumi dans les forêts du Pool

Les violences ont repris au sud du Congo, après la réélection contestée en 2016 du président Denis Sassou Nguesso. Des embuscades tendues par les hommes du pasteur Ntumi ont fait des dizaines de morts parmi les soldats de l’armée congolaise. La traque du chef rebelle, déclenchée il y a un an par le régime, piétine malgré des bombardements intenses. Retour sur 20 ans de guerre dans le Pool.
Article rédigé par Michel Lachkar
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
L'opposant congolais Frédéric Bitsangou, alias pasteur Ntumi, en 2005. Figure de la résistance au régime de Sassou NGuesso. (GUY-GERVAIS KITINA / AFP)

Le conflit entre le président Denis Sassou Nguesso et Frédéric Bitsamou, alias pasteur Ntumi, commencé il y a plus de 20 ans, a repris de plus belle. Les autorités ont émis un mandat d’arrêt contre le Robin des Bois congolais qui s’est réfugié dans les forêts du Pool, département du sud du pays. Ntumi et ses miliciens Ninjas ont repris le chemin de la forêt et de la lutte depuis «l’élection truquée» de 2016.
 
La traque du pasteur rebelle et de ses hommes par les soldats du président Sassou s’enlise. Le 18 avril 2017, une embuscade tendue par les hommes de Ntumi dans la province de Kindamba aurait fait une vingtaine de morts dans les rangs de l’armée congolaise. Laquelle pilonne les campements rebelles à l’aide d'avions de combats et d’engins blindés et n’épargne ni les écoles ni les églises.

Malgré leurs lourds moyens militaires, les forces armées congolaises se heurtent à une résistance farouche. «Entre 10.000 et 30.000 personnes auraient quitté leurs villages», affirme l'observatoire congolais des droits de l'Homme.  
 
Un pasteur guérillero 
Avant d’endosser sa tenue de combat en 1997, le pasteur recueillait les handicapés mentaux dans les rues de Brazzaville et les soignait. C’était dans les années 90. Les Ninjas sont composés de tous ces jeunes qui l'ont rejoint, originaires des quartiers Bacongo ou Makélékélé de Brazzaville et la population du Pool (ethnie Lari).

Entre 1998 et 2003, le pasteur Ntumi et ses groupes combattants ont participé à la résistance contre le régime de Sassou qui a pris le pouvoir en 1997 à l’issue d’un coup d’Etat sanglant mené avec sa milice tribale (les Cobras), avec l’aide militaire de l’armée Angolaise, de la garde présidentielle de Mobutu, d'Elf et de la France.


Sassou aurait fait tuer plus de 15.000 civils dans la région du Pool, après que les Ninjas du révérend Ntumi eurent mis en déroute des contingents de soldats de Sassou sous les commandes du colonel Tsourou et du général Mokoki.

Ce conflit, à la fois ethnique et politique, a opposé les partisans du président Pascal Lissouba, ceux de l'actuel président Sassou Nguesso et les partisans du maire de Brazzaville Bernard Koléla, de juillet 1993 à décembre 1999. Avec ces prolongations jusqu'en 2002, Il aurait fait près de 400.000 victimes, soit pas moins de 10% de la population congolaise.

Le président Sassou est également soupçonné d’avoir fait tuer de sang-froid 530 jeunes de retour d’exil quelques heures après leur arrivée à l’embarcadère de Brazzaville, dans «l’affaire des disparus du Beach».

Réconciliation ratée 
Pour autant, en avril 2007, le pasteur Ntumi signe un accord avec le gouvernement. Il obtient même un poste de vice-ministre en échange du désarmement de sa milice, forte de 5000 combattants. Le pasteur espère ainsi pouvoir aider sa région, largement oubliée des politiques de développement.
 
Candidat de son mouvement, le Conseil national de la résistance (CNR), il est même élu le 28 septembre 2014 conseiller départemental du Pool dans la circonscription du Mayama. Mais lors de la dernière élection de 2016, estimant que le président Sassou à une nouvelle fois volé l’élection présidentielle, il reprend les armes dans le Pool avec ses partisans. «Le peuple congolais tout entier souffre. Le peuple réclame un changement. Malheureusement, Denis Sassou Nguesso a volé sa victoire», affirmait le pasteur en avril 2016.

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