Guinée : la Cédéao décide de prendre des "sanctions graduelles" contre la junte
Les chefs d'Etats d'Afrique de l'Ouest souhaitent le retour rapide des civils au pouvoir après la série de putschs qu'a connue la région.
Les dirigeants des Etats ouest-africains, réunis en sommet extraordinaire le 22 septembre 2022 à New York, ont imposé des "sanctions graduelles" contre la junte qui dirige la Guinée face à l'inflexibilité des militaires sur une date de retour des civils au pouvoir.
Les leaders des pays de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao, 15 pays membres) se sont enfermés plusieurs heures à huis clos dans un hôtel new-yorkais, en marge de l'Assemblée générale de l'ONU, dans un climat tendu entre certains de ses membres.
Selon le communiqué issu de leur rencontre, la Guinée fait l'objet de "sanctions graduelles au niveau diplomatique, économique et financière". Ces sanctions comprennent "le rappel pour consultations" des ambassadeurs des Etats membres de l'organisation sous-régionale, mais surtout "la suspension de toute assistance et transaction financière en faveur de la Guinée par les institutions financières" de la Cédéao ainsi que des sanctions "ciblées à l’encontre des personnes et groupes de personnes" figurant sur une liste déjà établie.
Les dirigeants de la Cédéao ont menacé les autorités guinéennes "de sanctions plus sévères" si elles n'acceptaient pas "dans un délai d’un mois, à compter du 22 septembre 2022, une durée de transition raisonnable". La Cédéao préconise une durée de 24 mois contre celle de 36 mois voulue par la junte guinéenne.
Le sommet de New York a été précédé par des invectives de la junte guinéenne. Elle a dénigré avec virulence, le 22 septembre, un sommet très loin de l'Afrique et a critiqué le président en exercice de la Cédéao, le Bissau-Guinéen Umaro Sissoco Embalo. Ce dernier avait prévenu la veille que la Guinée allait au devant "de lourdes sanctions" si la junte persistait à vouloir se maintenir au pouvoir pendant trois ans.
Empêcher les militaires de rester indéfiniment au pouvoir
L'Afrique de l'Ouest a vu se succéder les coups de force de colonels et de lieutenants-colonels en moins de deux ans : putsch le 18 août 2020 au Mali, suivi d'un autre parachevant le premier le 24 mai 2021, putsch le 5 septembre 2021 en Guinée et putsch encore le 24 janvier 2022 au Burkina Faso.
Alarmée par le risque de contagion dans une région vulnérable, la Cédéao multiplie les sommets, les médiations et les pressions pour abréger les périodes dites de transition avant un retour des civils à la direction de leur pays. Elle est confrontée à des autorités qui n'entendent pas lâcher les commandes de sitôt.
Les nouveaux gouvernants en uniforme invoquent la gravité des crises auxquelles ils sont confrontés, sécuritaire au Mali et au Burkina, sociale et politique dans les trois pays. Ils veulent avoir le temps nécessaire à ce qu'ils présentent comme leur entreprise de "refondation" de leur Etat, et à l'organisation d'élections crédibles.
La Cédéao a infligé en janvier un sévère embargo commercial et financier au Mali. La junte dirigée par le colonel Assimi Goïta s'est depuis engagée sous la pression à organiser des élections en février 2024, et la Cédéao a levé l'embargo.
La junte guinéenne avait été parmi les rares à se solidariser avec le Mali face aux sanctions, et avait maintenu les frontières ouvertes. Son chef, le colonel Mamady Doumbouya, a pris part le 22 septembre au côté de son homologue malien, le colonel Assimi Goïta, aux célébrations du 62e anniversaire de l'indépendance du Mali. C'était sa première sortie depuis sa prise de pouvoir en septembre 2021.
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