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Maroc: Téhéran accuse Rabat de semer la discorde dans le monde musulman

Malgré la rupture de leurs relations diplomatiques, la guerre verbale se poursuit entre le Maroc et l’Iran. En visite à Washington, le chef de la diplomatie marocaine a demandé à l’administration Trump son soutien pour contrer les visées hégémoniques iraniennes en Afrique du Nord et de l’Ouest. En riposte, Téhéran accuse Rabat de vouloir semer la discorde et la division dans le monde musulman.
Article rédigé par Alain Chémali
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Le ministre des Affaires étrangères du Maroc, Nasser Bourita (à gauche), a rencontré le secrétaire d'Etat américain Michael Pompeo au département d'Etat américain, à Washington, le 17 septembre 2018.  (Jim WATSON/AFP)

«Les allégations du ministre marocain des Affaires étrangères ne sont pas seulement fausses, elles relayent également une iranophobie visant à semer la discorde et la division dans le monde musulman», a déclaré le porte-parole de la diplomatie iranienne, le 18 septembre 2018.
 
Téhéran dénonce une administration «ennemie de l'Afrique» à la Maison blanche
«Les relations de l’Iran avec les pays africains sont toujours basées sur le respect mutuel de la souveraineté nationale et le développement de la coopération dans les domaines communs», a encore expliqué Bahram Ghassemi dans ses déclarations rapportées par le site iranien Mehr Informations.
 
Il répondait ainsi à l’entretien du chef de la diplomatie marocaine, Nasser Bourita, accordé au site d'information américain de la droite dure Breibart News à l’occasion de son déplacement à Washington et sa rencontre le 17 septembre avec le secrétaire d’Etat américain, Michael Pompeo.

Ghassemi a même déploré que le ministre marocain ait choisi pour s’exprimer ce site «le plus extrémiste et le plus raciste des médias américains», preuve d’une collusion avec une administration «ennemie de l’Afrique» à la Maison Blanche, a-t-il dit.
 
Dans cet entretien, Nasser Bourita dénonçe en effet la menace que représentent les opérations multiformes menées par l’Iran contre le Maroc avec la coopération du Hezbollah chiite libanais.
 
Par deux fois, le royaume chérifien a rompu ses relations diplomatiques avec la République islamique. La première fois en 2009, en réalisant le prosélytisme déployé par l’Iran, par le biais des livres et des bourses d’études accordées aux jeunes Marocains, tant dans le pays que dans la diaspora en Europe.
 
Rabat dénonce des menées militaires et financières par le biais du Hezbollah

«Nous sommes passés de 10 à 120 personnes (par an) qui ont reçu des bourses pour étudier à Qom. De 2009 à 2016, nous n'avons eu aucune relation avec l'Iran à cause de ce qu'ils faisaient», a indiqué le chef de la diplomatie.
 
La deuxième fois, le 1er mai 2018, en raison d’une assistance directedu Hezbollah – «la Légion étrangère» de l’Iran – au Front Polisario au Sahara occidental. Selon Rabat, des agents du Parti de Dieu avaient livré des missiles sol-air SAM 9 et SAM 11 dans des camps d’entraînement des indépendantistes sahraouis.
 
Rappelant l’arrestation, en mars 2017 à Casablanca sur mandat d’Interpol, d’un financier proche de la milice chiite libanaise, Kassem Tajeddine, et son extradition aux Etats-Unis, Bourita a insisté sur l’idée que l’Iran et le Hezbollah ne constituaient pas qu’une menace militaire.
 
«En Afrique, nous le considérons également comme une menace économique. Ce M.Tajeddine blanchissait de l'argent en Afrique. Tous les avantages pour l’Iran de la part du Hezbollah sont réinvestis en Afrique. Ils achètent des hôtels, des supermarchés. Donc, ne sous-estimez pas ce que fait l’Iran en Afrique subsaharienne, également à travers des actions financières», a-t-il prévenu.

Renforcer les pays arabes sunnites pour affaiblir l'Iran
«Nous pensons que ce qui se passe avec le Polisario n’est qu’une partie d’une approche agressive de l’Iran envers l’Afrique du Nord et de l’Ouest. Nous avions remarqué avant certaines activités au Sénégal, en Guinée, en Côte d'Ivoire, même en Guinée Bissau», a-t-il précisé.

Dénonçant une recrudescence d’attributions de bourses religieuses, de constructions de mosquées et d’implantations d’organisations humanitaires comme autant d'éléments de l’offensive iranienne, Nasser Bourita a clairement sollicité l’aide de Washington pour y faire face.

«Je pense que la première chose à faire est d’aider les Etats qui peuvent faire face à l’Iran par la religion, l’idéologie et la crédibilité. Je pense qu'il est important que l'affaiblissement de l'Iran passe aussi par le renforcement de certains pays arabes sunnites», a-t-il conclu.

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