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Soudan du Sud: Washington retire sa confiance au président Salva Kiir
Sans aller jusqu’à la rupture avec son ancien allié du Soudan du Sud, Washington met une pression maximale sur le président Salva Kiir. Après une tournée en Afrique pour revoir les conditions de l’aide américaine, Nikki Haley, cheffe «bis» de la diplomatie américaine, a dénoncé les atrocités commises par le pouvoir. Elle a également mis en demeure le président d’y remédier dans un futur proche.
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C’est depuis un lieu hautement symbolique que Nikki Haley a décoché ses flèches contre le pouvoir en place à Juba.
Dans un discours prononcé le 15 novembre 2017 au musée du Mémorial de l’holocauste des Etats-Unis à Washington, l’ambassadrice des Etats-Unis à l’ONU a dénoncé la «responsabilité» du président Salva Kiir dans «les atrocités» commises dans son pays, ravagé par la guerre civile.
Salva Kiir, «premier responsable de meurtres sur la base de l'ethnie»
De retour d’une tournée en Ethiopie, au Soudan du Sud et en République Démocratique du Congo, pour réexaminer les conditions de l’aide américaine, la femme qui fait office de porte-voix de la diplomatie américaine s’est exprimée sans détours.
«Le gouvernement est engagé dans une campagne militaire brutale et prolongée» contre l’opposition armée, a-t-elle déclaré. Reconnaissant que «les deux parties sont responsables d’atrocités contre les civils», elle accuse ouvertement le gouvernement d’être «le premier responsable de meurtres sur la base de l’ethnie» et de bloquer «délibérément l’acheminement de l’aide humanitaire».
Relatant sa visite dans les camps de réfugiés sud-soudanais en Ethiopie, Nikki Haley a expliqué qu’elle n’était «pas préparée pour le niveau de souffrance» qu’elle a vu. «Rien ne vous prépare à ça», a-t-elle insisté.
Les histoires de violences sexuelles sont inimaginables, selon Nikki Haley
Les conditions de vie des réfugiés sud-soudanais font ressembler d’autres camps à des «villages de vacances», a-t-elle précisé, visiblement encore sous le choc de sa mission.
«Presque toutes les femmes ont été violées, parfois à plusieurs reprises», et «les histoires de violences sexuelles sont inimaginables», a-t-elle rapporté, évoquant le récit d’une mère forcée à manger la chair de son propre bébé, jeté dans les flammes sous ses yeux.
La diplomate américaine raconte également avoir montré au président Kiir, qu’elle a rencontré à Juba, les photos de la visite de ces camps et qu’il «n’a pas tenté de nier».
Dans son discours, la première émissaire de Donald Trump sur le continent, qui a rang de ministre, a rappelé le soutien américain à l’indépendance du jeune Etat africain et les «grandes espérances» placées en Salva Kiir, encore chef rebelle à l’époque.
Des espérances transformées aujourd’hui en «dégoût pour ce qu’il a laissé faire et pour ce qu’il a lui-même fait à son peuple», a-t-elle déploré.
Pour Washington, Salva Kiir sera jugé sur ses actes
Toutefois en dépit de la violence de ces propos, Washington semble vouloir laisser encore une chance à leur ancien allié. Nikki Haley a assuré, sans plus de précisions, avoir signifié au président sud-soudanais «une série de choses que nous attendons dans un futur proche» et aussi ce qui l’attend s’il n’obtempère pas.
Selon elle, un premier «signe prometteur» et «bienvenu» vient d’être émis par Juba: Salva Kiir aurait ordonné d’accorder aux organisations humanitaires «un accès libre et sans entrave» aux populations en souffrance.
«Nous le jugerons sur ses actes», a-t-elle toutefois prévenu, car «il a déjà rompu ses promesses» par le passé.
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