Des employés de l'OMS mis en cause dans une série de violences sexuelles en République démocratique du Congo
Une enquête indépendante confirme les allégations de plusieurs femmes victimes de violences sexuelles lors de l'épidémie d'Ebola.
Une commission indépendante chargée d’enquêter sur les violences sexuelles présumées commises par des employés de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) en République démocratique du Congo (RDC) dénonce de graves manquements. Il s’agit à la fois de "défaillances structurelles" et de "négligences individuelles". Retour sur cette affaire qui a failli passer inaperçue.
Rapports sexuels contre emplois
L’affaire éclate en septembre 2020 grâce à la publication d’une enquête journalistique de l’agence The New Humanitarian et la Fondation Thomson Reuters. Elle révèle, témoignages à l’appui, que des dizaines de femmes ont été exploitées ou abusées sexuellement par des travailleurs humanitaires, notamment ceux de l’OMS, lors de l’épidémie d’Ebola dans l’est de la RDC. Les victimes présumées étaient manipulées par des hommes qui leur proposaient un emploi en échange de rapports sexuels. Les allégations ont été confirmées par une nouvelle enquête, menée cette fois-ci à la demande de l'OMS.
"Tout le monde avait des relations sexuelles en échange de quelque chose. C'était très courant. On m'a même proposé d'avoir des rapports sexuels si je voulais obtenir une bassine d'eau pour me laver dans le camp de base où nous étions hébergés pendant la riposte (contre Ebola)"
Une victime d'abus sexuels à Béni, dans l'est de la RDCRapport de la Commission Indépendante mandatée par l'OMS
"Absence totale" de signalement
La commission indépendante, qui a interrogé des dizaines de femmes, a pu établir que les victimes présumées étaient des femmes vulnérables qui se voyaient promettre des emplois, ou étaient exploitées sexuellement pour conserver le leur. Ces abus sexuels ont été commis par des travailleurs ou des collaborateurs recrutés en urgence au Congo lors de l’épidémie d’Ebola, mais pas seulement. Des membres internationaux de l’OMS ont également été mis en cause et dans tous les cas de figure, il y avait "une absence totale" de signalement de cas , selon le rapport. En cause, des "défaillances structurelles" et des "négligences personnelles". C'est ainsi que pendant près de deux ans, des femmes vulnérables âgées entre 13 et 43 ans ont dû subir des "expériences dégradantes", en toute impunité.
"Je suis désolé, désolé de ce qui vous a été imposé par des personnes qui étaient employées par l'OMS pour vous servir et vous protéger"
Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur général de l'OMS
Quelles sanctions ?
Au-delà des excuses du président de l’OMS Tedros Ghebreyesus et de ses proches collaborateurs, l’organisation a promis des "conséquences sévères" aux auteurs présumés de ces abus sexuels. La commission en a identifié 83, dont 21 étaient des employés de l'OMS. Depuis la publication du rapport, quatre ont été licenciés et ceux qui avaient des contrats de courte durée seront bannis de l’organisation.
L’OMS s’est engagée par ailleurs à transmettre les allégations de viol aux autorités nationales de RDC et aux autres pays d’origine des auteurs présumés. Une décision symbolique lorsque l’on sait que le harcèlement sexuel et le viol sont banalisés et impunis. A ce stade, pas de condamnation juridique des auteurs des agressions, ni de réparations aux victimes présumées.
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