L'espoir de paix revenu en Casamance
Le déclic qui a ouvert une nouvelle perspective date du 9 décembre 2012. Huit otages, dont des militaires sénégalais détenus depuis un an par les rebelles de la rébellion du Mouvement des forces démocratiques de Casamance (MFDC), ont été libérés. Une libération obtenue grâce à la médiation de Sant’Egidio, une communauté catholique basée à Rome, qui s’implique dans les crises en Afrique. C'est le signe d’une volonté de dialogue de Salif Sadio, le chef de la tendance dure de ce groupe, qui souhaite qu'un dialogue sincère s'instaure hors de l'Afrique.
Une médiation bienvenue
En dehors de ce courant principal favorable à l'évolution actuelle, le MFDC comprend d’autres tendances militaires. Lesquelles , selon le chercheur Jean-Claude Marut, ont «soit déposé les armes, soit ont versé dans le grand banditisme».
Le mouvement pour l’indépendance, qui a débuté le 16 décembre 1982 à Ziguinchor, la ville principale de Casamance, animé principalement par le charismatique abbé Augustin Diamacoune Senghor (1928-2007), va peut-être voir les premiers fruits de toutes ces années de lutte.
Le changement de climat politique n’est peut-être pas étranger à l’évolution constatée. Durant nombre d’années, les deux présidents qui se sont succédés, Abdou Diouf (1980-2000) et Abdoulaye Wade (2000-2012), se sont contentés de promesses sans lendemain. Plusieurs accords de paix, le dernier signé en 2004, sont restés sans suite.
Le président sénégalais se veut optimiste
Dès sa prise de fonction, le nouveau chef de l’Etat, Macky Sall, s’est distingué par une rapide implication dans le dossier de cette région située entre le nord du Sénégal et la Gambie, prouvant qu’il s’agissait pour lui d’une priorité. En juin 2012, il s’est déclaré prêt à «ouvrir des discussions» avec les rebelles et avec tous les acteurs intervenant dans le processus de paix
Pour tracer un avenir, il a mis l’accent sur le développement. «Différents projets ont été passés en revue pour assurer le désenclavement de la Casamance, afin de mieux exploiter ses potentialités», a indiqué M.Sall, après un conseil des ministres décentralisé à Ziguinchor.
La gestion de cette crise se fera «en association avec les pays voisins de Gambie et Guinée-Bissau», a-t-il ajouté. Une preuve du rôle important joué par ces derniers dans le conflit. Pour Jean-Claude Marut, «ces deux pays ont servi de base arrière au MFDC». Selon le site Senenews.com, qui cite un rapport d’un service de renseignements, le président gambien Yaya Jammeh, a été le principal mécène et soutien du mouvement rebelle de Salif Sadio.
Aujourd’hui, l’autocrate gambien, d’ordinaire peu réceptif aux pressions internationales, a eu des gestes d’apaisement vis-à-vis du Sénégal. Déjà en 2011, Dakar et Banjul avaient commencé à effectuer une patrouille commune au Nord-Sindian (Basse Casamance) afin de mater Atika, la branche armée du MFDC.
Malgré les belles déclarations, les actes ont du mal à suivre
Si Macky Sall s’est rendu à Banjul, le 18 février 2013, en tant qu’invité d’honneur pour l’anniversaire du 48e anniversaire de l’accession à l’indépendance de la République de Gambie, il a juste échangé quelques mots avec Yaya.Jammeh. Il n’a pas été question du conflit casamançais entre les deux hommes.
En octobre 2012, le gouvernement sénégalais et les médiateurs liés aux responsable de Sant'Egidio ont recherché des lieux pour cantonner les combattants du MDFC qui seraient démobilisés. Une initiative trop rapide pour certaines franges de la rébellion. Depuis lors, aucun développement d’envergure n’a été signalé.
La société civile n’est pas en reste d’idées pour faire avancer le processus
La diaspora casamançaise souhaiterait que la population locale puisse élire les gouverneurs dont les décisions seraient au plus près des gens.
Quant au maire de Ziguinchor, il pense que les négociations entamées sous l’égide de Sant’Egidio mettent la charrue avant les boeufs et qu’il faut réunir toutes les factions du MFDC avant de désigner un négociateur unique.
L’économie, clef du conflit
En tout état de cause, les avancées vers la paix ne pourront se consolider qu’avec des progrès économiques. Benoît Sambou, le ministre sénégalais de la Jeunesse et de l’Emploi constate qu’en raison des tensions «les jeunes vivent dans l’oisiveté. Ils faut qu’ils sortent de la précarité car ils peuvent être tentés de rejoindre le maquis».
Dans cette catégorie de petits pas vers une normalistion, il fait noter les progès dans le déminage de la Casmance, qui permet aux paysans de reprendre les travaux des champs. Courant 2012, 235 mines ont été enlevées dans six localités, à 25 km à l’est de Ziguinchor. Et depuis février 2008, 350.000 m² ont été débarrassés de ce fléau…
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