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Au Nigeria, aller à l’école c’est combattre Boko Haram
L'éducation occidentale est une cible revendiquée par Boko Haram. Et le groupe a plutôt réussi dans son entreprise en faisant chuter la scolarité dans le nord du Nigeria. Pourtant la tendance s'inverse, favorisée par le recul des terroristes. Aller à L'école est désormais un acte de résistance. Mais les carences du pays en matière d'éducation restent patentes.
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Selon l’Unicef, depuis 2009, Boko Haram a assassiné 2300 enseignants et détruit plus de 1400 écoles, généralement en les incendiant. En 10 ans, le groupe terroriste a provoqué l’exode de trois millions de personnes. Sa lutte contre l’éducation occidentale a sans doute connu son apogée lors de l’enlèvement des 276 lycéennes de Chibok en 2014.
Après une chute massive des enfants scolarisés, moins 50% en dix ans, la tendance s’inverse. Une contre-offensive se développe et le champ de bataille est hors normes.
Classes en plein air
On en trouve l’expression dans ces classes en plein air au beau milieu d’un camp de réfugiés. «Aller à l’école est notre façon de combattre Boko Haram». Aiha a été privée d’école durant trois ans dans un camp de réfugiés au Niger. Aujourd’hui âgée de 19 ans, il lui reste un an d’études à suivre dans un internat de Maiduguri. «Ils n’aiment pas l’éducation, ils n’en veulent pas. Alors, juste en étudiant, nous les combattons.»
Les opérations humanitaires de scolarisation se multiplient, notamment dans le nord du pays, désormais un peu moins placé sous la coupe de Boko Haram. L’ONG Plan International espère scolariser plus de 150.000 enfants, notamment par un système d’écoles mobiles. Des enseignants se déplacent de villages en villages. Parallèlement, plus de 70 écoles en dur sont en cours de construction ou déjà construites.
L’éducation en ruine
Le Partenariat mondial de l’éducation dresse un tableau catastrophique du système éducatif au Nigeria. Le pays regroupe 20% des enfants non scolarisés dans le monde. La menace Boko Haram arrange bien des familles qui ne tiennent pas à envoyer leurs enfants à l’école. Cela coûte cher et elles n’en voient pas l’intérêt. Et l'enfant à l'école, ce sont des bras en moins à la maison.
Moins de la moitié des jeunes femmes savent lire. Dans le nord du pays, deux élèves sur trois sont illettrés. Des élèves qui dans les écoles n’apprennent rien, et Boko Haram n’est pas le seul responsable de cet état de fait.
«Dans ce pays, les écoles coraniques sont souvent les structures de l’éducation où un maître-marabout enseigne à lire le coran aux enfants. Souvent les enfants ne bénéficient que de cette éducation», explique Afrik.com. Dans l’Etat de Kano, le pouvoir local expérimente l’intégration de nouvelles disciplines dans l’enseignement coranique, histoire, géographie, anglais, etc.
Maîtres-marabout
Les régions du nord doivent aussi améliorer la qualité de l’accueil dans l’éducation, notamment en limitant à 40 le nombre d’élèves par classe.
Vu leur grand nombre dans le territoire, ces écoles coraniques ont dû être également des cibles de Boko Haram. Et bon nombre des établissements détruits ne devaient probablement pas enseigner les maths ou l’anglais, ces piliers de l’éducation occidentale rejetée par les terroristes.
Alors Boko Haram s’en prend-t-il uniquement au symbole? Ne faut-il pas voir dans ces attaques, outre l’aspect idéologique, un moyen de recrutement de garçons en âge de combattre et d’enlèvement de futures épouses, comme à Chibok?
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