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"J’avais 18 ans quand il m’a violée" : l’ex-Miss Gambie ose témoigner contre Yahya Jammeh

Au cours de ses 22 ans de "règne", qui a pris fin en 2017, l'ancien président gambien a utilisé son pouvoir pour piéger et abuser sexuellement des jeunes femmes, selon une enquête de Human Rights Watch.

Article rédigé par Eléonore Abou Ez
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2min
Fatou "Toufah" Jallow, Miss Gambie 2014. (Human Rights Watch)

Trois Gambiennes accusent l’ex-président Yahya Jammeh, aujourd’hui en exil, de les avoir contraintes à des relations sexuelles en usant de pressions en tout genre, souligne un rapport de Human Rights Watch. L’organisation, qui a mené une enquête avec l’ONG suisse TRIAL international, a rencontré des victimes présumées dont une ancienne reine de beauté, Fatou "Toufah" Jallow.

Il m’a dit : ‘Aucune femme ne m’a jamais rejeté. Alors toi, tu te prends pour qui ? (…) Il hurlait : ‘Ça aurait pu être si bien, car j’étais amoureux de toi, mais tu as voulu te la jouer féministe avec moi !

Fatou Jallow, ex-Miss Gambie

à Human Rights Watch

Couronnée, puis harcelée


Fatou Jallow a été élue Miss Gambie en 2014. Le concours de beauté, organisé par l’Etat, est présenté comme un moyen pour les jeunes femmes de "prendre leur vie en main", c’est-à-dire d’être autonome. A la clé, une bourse pour suivre des études à l’étranger.


Mais au lieu de ça, elle reçoit des avances du président de plus en plus pressantes, une demande en mariage et des convocations au palais présidentiel, où elle est un jour enfermée dans une pièce. Elle raconte qu'elle crie avant d'être giflée et menacée. "Si tu bouges, je te tuerai de mes propres mains",  lui dit Yahya Jammeh qui la viole. 

"J’avais 18 ans quand il m’a violée", dit la jeune femme. Traumatisée par cette agression, Fatou Jallow s’enfuit au Sénégal voisin. Et puis, grâce à l'aide d'ONG  et de l'ONU, elle obtient l'asile dans un pays tiers où elle réside aujourd'hui.

Des " protocol girls "

Et l’histoire de Fatou n’est pas unique, selon Human Rights Watch. L’organisation qui se base sur plusieurs témoignages affirme que le président et ses collaborateurs avaient recours à la coercition et à la tromperie pour obtenir des faveurs sexuelles. Yahya Jammeh recrutait personnellement des "Protocol girls", des assistantes censées être au service de l’Etat et qui se trouvaient harcelées. Certains médias ont même comparé les filles qui travaillaient au service du protocole à des "esclaves sexuelles" qui vivaient à State House, la résidence présidentielle, sans être autorisées à partir.

Yahya Jammeh a traité les Gambiennes comme ses choses. (…) Le viol est un crime et Jammeh n’est pas au-dessus des lois

Reed Brody, avocat

à Human Rights Watch

Des crimes impunis ?

Les femmes qui ont raconté leur histoire à Human Rights Watch veulent briser le silence et encourager d’autres victimes à se manifester. L’une d’elles, Fatoumatta Sandeng, fille de l’opposant Solo Sandeg mort en prison, a lancé une campagne internationale pour traduire l’ex-président et ses principaux collaborateurs en justice. La Commission vérité et réconciliation qui enquête sur les crimes de Jammeh prévoit de consacrer bientôt des séances aux violences sexuelles.

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