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Maroc : le coronavirus change les routes du cannabis vers l'Europe

La fermeture de la frontière entre le Maroc et l'Espagne, suite à la crise sanitaire du Covid-19, perturbe les voies d’acheminement du cannabis à destination de l'Europe.

Article rédigé par franceinfo Afrique avec AFP
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Temps de lecture : 3min
La police détruit un champ de cannabis à Elkolla, à 100 km de la ville de Larache, dans les montagnes du Rif au nord du Maroc, le 7 juillet 2005. (ABDELHAK SENNA / AFP)

Les trafiquants, on le sait, s’adaptent en permanence. Alors que les routes habituelles vers l'Europe sont fermées par la pandémie de coronavirus, les trafiquants de drogue marocains cherchent des voies alternatives. Selon la police marocaine, ils chargent des camions puis des bateaux de pêche dans les ports de la côte atlantique pour acheminer le cannabis local vers le Vieux continent.

Routes plus longues

Le Maroc a imposé depuis mars un verrouillage interne qui a stoppé la plupart des déplacements entre les villes. Il a aussi fermé ses frontières aériennes et maritimes dans le but de ralentir la propagation du coronavirus. Ce qui a eu pour effet de bloquer la voie normale des drogues. Habituellement, les contrebandiers transportent le cannabis, cultivé dans les montagnes du Rif septentrional, sur la courte distance qui les séparent de la côte méditerranéenne. La résine rejoint ensuite l'Espagne en hors-bord ou dissimulée dans les cales des bateaux de commerce.

Mais les récentes saisies de contrebande montrent qu'ils ont été forcés d'adopter une route alternative plus longue. "Ils chargent des camions de nourriture à travers le Maroc, puis des bateaux de pêche partant des ports de l'Atlantique", a déclaré le porte-parole de la police et des renseignements nationaux, Boubker Sabik. La police réussit à perturber les réseaux de contrebande pendant le confinement (maintenu jusqu'au 10 juin), ce qui indique un "changement radical" dans les méthodes de trafic, a-t-il dit à l'AFP.

Les gangs optent pour des côtes éloignées de l'Europe, nécessitant de longues et coûteuses sorties en mer dans le but de trouver un itinéraire plus sûr

Boubker Sadik, porte-parole de Sécurité nationale marocaine

à l'AFP

Alors que seulement 14 km séparent Tanger de l'Espagne à travers le détroit de Gibraltar, la route qui monte sur la côte atlantique nécessite un long voyage et un rendez-vous en mer avec des passeurs européens dans les eaux internationales. Cela implique également de conduire la drogue, pendant des heures, depuis le Rif jusqu'aux plages isolées de Sidi Abed, à 217 km au sud de Rabat, en utilisant des camions de restauration dont les chauffeurs ont des autorisations de circulation, a déclaré Boubker Sabik.

La police a saisi 32,6 tonnes de résine de cannabis, connue sous le nom de haschisch, pendant la période de confinement, et 62 tonnes depuis le début de l'année, contre 210 tonnes saisies l'année dernière.

Moins de cocaïne

Les saisies de drogue en Afrique du Nord et au Moyen-Orient montrent cependant que les restrictions visant le coronavirus n'ont pas réussi à arrêter le commerce des stupéfiants.

Dans le même temps, le Maroc affirme vouloir réduire la culture du cannabis concentrée dans la région du Rif, en offrant des subventions aux agriculteurs afin qu'ils commencent d'autres cultures. D’après les chiffres officiels du gouvernement marocain, les terres utilisées pour les champs de cannabis seraient passées de 134 000 hectares en 2003 pour se stabiliser il y a six ans à 47 000 hectares. Mais depuis, les rendements à l'hectare ont fortement augmenté.

Cependant, alors que le trafic de cannabis se poursuit, les restrictions sur le coronavirus ont fortement perturbé les expéditions de cocaïne sud-américaine transitant par le Maroc, étape sur le chemin de l'Europe, confirme Boubker Sabik.

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