Sanctionné par les Etats-Unis, le Swaziland sur la voie de la réforme?
Le premier janvier 2015, le Swaziland ne fera plus partie de l'AGOA (African Growth and Opportunity Act), le programme américain destiné à favoriser les échanges économiques avec l'Afrique subsaharienne. L'administration américaine a annoncé que les efforts de Mbabane, la capitale, en matière de droits de l'Homme étaient depuis plusieurs années insuffisants pour prétendre à l'aide américaine. Dans le même temps, les Etats-Unis ont réintégré Madagascar, écarté depuis le Coup d'état de 2010.
Economiquement, le Swaziland est en mauvaise position. Durement frappé par la crise économique en 2011, son taux de chômage oscille aujourd'hui autour des 40%. Sa croissance stagne autour des 2% par an (contre 5% de moyenne pour le reste de l'Afrique), la Banque mondiale l'a classée 123ème sur 195 des meilleurs pays pour un investissement et la corruption reste importante selon Transparency International. Pire, la baisse des budgets de santé depuis la crise n'a rien fait pour enrayer l'épidémie du sida. Aujourd'hui, le pays est le plus infecté au monde.
Une nouvelle volonté économique
Mais le retrait de l'AGOA fait figure d'électrochoc pour la classe dirigeante. Sans le soutien de Washington, les exportations swazies (textile et produits agricoles) ne sont plus compétitives par rapport à ses concurrents.
Le Swaziland a donc lancé un plan de réformes économiques ambitieux. Intitulé «The route to a First World Kingdom» (la voie vers un royaume développé), le document décrit une série de mesures destinées à ramener le chômage à 15% d'ici à 2018 et à faire passer le pays dans les 60 meilleurs secteurs d'investissement dans le classement de la Banque mondiale. Le programme comprend essentiellement des procédures de simplification de la bureaucratie, l'éloignement de la monarchie de la gestion économique et des mesures de dérégulation.
Ambitieux. Mais le pays a des atouts à faire valoir. Tout d'abord, son système de justice (essentiellement opéré par des juges sud-africains) est resté indépendant du pouvoir monarchique. L'éducation primaire y est universelle, et le taux d'inscription dans l'éducation secondaire se situe autour des 60%. Enfin, les infrastructures, en terme de transport et de communication, sont bien développées, ayant profité des investissements du grand voisin sud-africain.
Après l'économie, une réforme sociale?
Ce plan économique ne comprend aucun effort sur les droits de l'Homme. C'était pourtant le principal motif du retrait du Swaziland de l'AGOA. Le pays est une monarchie absolue, où le roi Mswati III conserve le contrôle total du pouvoir executif et de pouvoir législatif. Selon les mots d'Amnesty International : «Nous sommes concernés par des violations du droit au rassemblement, des droits d'association et d'expression. Les leaders pro-démocratie subissent des arrestations abusives, sont battus, torturés, leurs maisons et leurs bureaux fouillés. Des manifestations pacifiques sont souvent dissipées violemment par les forces de l'ordre. La société civile, les syndicats, les médias subissent une surveillance et un harcèlement constant. »
Mais la réforme économique peut-elle aboutir sans une profonde réforme politique? Dans un premier temps...Probablement. Les exemples de dictatures connaissant une croissance forte grâce à des exportations de ressources naturelles ne manquent pas en Afrique. Mais l'inscription de ces résultats dans la durée demande des efforts politiques.
Toutes les plus belles «success stories» africaines sont des démocraties fonctionnelles, comme le Ghana ou le Mozambique. La Zambie ou le Zimbabwé, des pays pauvres qui ont tous atteint les taux de croissance dont le Swaziland rêve, sont passés par des réformes politiques. Pour retrouver l'AGAO, le roi Mwasi III devra sans doute faire des concessions.
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