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"Les attentats sont la macabre célébration du premier anniversaire de l'Etat islamique"

Mathieu Guidère, spécialiste du terrorisme islamiste, craint que les attaques perpétrées vendredi en Isère, à Sousse (Tunisie) et à Koweït City ne soient le début d'une vague d'attentats lancée par l'organisation jihadiste.

Article rédigé par Hervé Brusini - Propos recueillis par
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Des jihadistes présumés du groupe Etat islamique apparaissent sur une photo diffusée sur Twitter, le 11 juin 2014. (ALBARAKA NEWS / AFP)

Un homme a tiré à la kalachnikov sur une plage de Sousse, tuant 38 personnes, vendredi 26 juin. Trois mois après le massacre du musée du Bardo, la Tunisie plonge à nouveau dans le cauchemar terroriste. Mathieu Guidère, spécialiste de géopolitique et du terrorisme islamiste, est justement originaire de ce pays. Pour francetv info, il analyse l’attentat commis à Sousse et le rapproche des autres attaques perpétrées en France et au Koweït le même jour. 

Francetv info : Que vous inspire cette série d'attaques en France, en Tunisie et au Koweït ?

Mathieu Guidère : Cela fait un an maintenant qu’est apparu au grand jour l’Etat islamique (EI). Et l’on ne peut que constater qu’il a lancé les "festivités" de cet anniversaire, malgré les bombardements qu’il subit. Tout cela accompagne le début du ramadan la semaine dernière. L’EI a appelé la quasi-totalité de ses sympathisants à fêter cette première année par tous les moyens et partout dans le monde. Selon moi, les attentats perpétrés à Saint-Quentin-Fallavier (Isère), à Sousse et à Koweït City s’inscrivent dans cette macabre célébration. C’est un terrible pied de nez adressé à la communauté internationale. Et ce n’est que le début. 

Pourquoi cela ? 

Souvenons-nous : l'EI a commencé son offensive au début du ramadan 2014. Il a déclaré le califat le 30 juin 2014. Je pense donc que cela risque de culminer dans les semaines à venir. En outre, le mois de ramadan est considéré comme propice au jihad. Je crains donc que nous soyons face au lancement d’une campagne d’attentats. 

En Tunisie spécifiquement, y a-t-il une continuité entre l’attentat du musée du Bardo en mars et la tuerie de Sousse ? 

Absolument. A Sousse, l’action a été conduite par un groupe qui a fait allégeance à l'EI. Et il a clairement décidé de détruire le tourisme tunisien. Il l’a lui-même affirmé en déclarant : vous accueillez trop d’étrangers, la Tunisie n’est pas une terre pour héberger des étrangers, qui de surcroît bombardent nos frères en Syrie et en Irak. D’où la décision qui a été prise de s’attaquer systématiquement aux infrastructures du tourisme tunisien et donc, dans un premier temps, au musée du Bardo. Ce groupe s’intitule "les soldats du califat en Tunisie". 

Comment prévenir la vague d’attentats dont vous parlez ? 

Par une prévention active, concrète. En Tunisie, par exemple, il faut installer des caméras de vidéosurveillance, pratiquer des contrôles d’accès aux lieux publics. En France, il faut sécuriser les lieux par ce même genre de dispositifs. En revanche, je suis très réticent sur la présence de soldats en faction devant les lieux sensibles. Ils peuvent à leur tour devenir des cibles. 

Les pouvoirs publics sont-ils conscients des risques qui, selon vous, nous guettent ? 

Je ne le crois pas. Le fait de bombarder l’EI et de le dire publiquement peut pousser des individus à commettre des attentats en France. Mais surtout, on n’est pas assez conscients de la portée symbolique des dates et des lieux. Désormais, l'EI se considère comme un Etat, gère les territoires comme tel, avec un gouvernement, une administration et un agenda. Nous sommes bel et bien face à un Etat terroriste.

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